Le 6 novembre 2023, S.M. le Roi Mohammed VI annonçait le lancement de l'Initiative Atlantique, une proposition géopolitique de grande ampleur destinée à transformer la façade ouest-africaine. Visant à connecter les pays enclavés du Sahel – Burkina Faso, Mali, Niger et Tchad – aux ports marocains de l'Atlantique, cette initiative dépasse les logiques logistiques : elle incarne une vision stratégique du développement inclusif, de la souveraineté énergétique et de l'interconnexion continentale. Adossée à des corridors logistiques, énergétiques et numériques, l'Initiative Atlantique vient combler un vide historique d'infrastructures. « Il s'agit d'offrir à ces pays un accès stratégique à l'Atlantique pour sortir de l'enclavement, stimuler le commerce, et garantir leur souveraineté alimentaire et énergétique », soulignait S.M. le Roi dans son discours de la Marche verte, le 6 novembre 2024. Ce projet trouve un écho naturel dans le méga gazoduc Nigeria-Maroc, infrastructure transnationale de 5 600 kilomètres soutenue par la Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) et la Banque islamique de développement, et conçue pour desservir jusqu'à 400 millions d'habitants. Le Maroc, de plus en plus perçu comme une puissance de liaison entre Afrique de l'Ouest, Méditerranée et Europe, ambitionne ainsi de devenir la colonne vertébrale de l'intégration continentale. Cet activisme économique s'accompagne d'une redéfinition méthodique de la présence diplomatique marocaine sur le continent. Depuis 2010, plus de 30 ambassades ont vu le jour en Afrique, tandis que plusieurs Etats du continent ont choisi d'ouvrir des consulats à Laâyoune et Dakhla, reconnaissant de facto la souveraineté du Maroc sur le Sahara. Dans cette dynamique, la coopération militaire avec des pays comme le Sénégal, le Tchad, la Côte d'Ivoire ou encore le Gabon traduit une stratégie de stabilisation à travers la formation, les exercices conjoints et le partage d'expertise sécuritaire. Mais l'influence marocaine ne se limite pas à l'Afrique. Dans l'espace arabe et islamique, le Royaume poursuit une diplomatie d'équilibre, fondée sur des principes constants et une autonomie revendiquée. Fidèle à la cause palestinienne, S.M. le Roi préside depuis 2000 le Comité Al-Qods, émanation de l'Organisation de la Coopération Islamique (OCI), et supervise, à travers l'Agence Bayt Mal Al-Qods, plus de 200 projets socio-éducatifs à Jérusalem. Le soutien au peuple palestinien s'est maintenu même après la reprise des relations diplomatiques avec Israël en 2020, dans le cadre des Accords d'Abraham, où Rabat a réitéré son attachement à la solution à deux Etats avec Jérusalem-Est comme capitale palestinienne. Par ailleurs, le Royaume adopte une posture de médiation discrète dans les crises régionales, notamment en Libye – où les accords de Skhirat en 2015 restent un jalon diplomatique reconnu –, au Yémen, ou encore en Syrie. Lire aussi : Héritage, rupture et promesse d'un Maroc moderne Multilatéralisme africain : Le Maroc comme force de proposition Sur la scène multilatérale, le Maroc s'impose comme un acteur structurant, articulant ses prises de position autour de trois axes : l'universalité des droits, l'équité Nord-Sud, et la défense des intérêts africains. Le Royaume est aujourd'hui membre de plus de 80 organisations internationales et co-préside plusieurs initiatives onusiennes, notamment en matière de migrations, de terrorisme et de dialogue interreligieux. L'organisation à Marrakech, en octobre 2023, des Assemblées annuelles du FMI et de la Banque mondiale, a illustré cette stature. L'événement a réuni plus de 14 000 participants, symbolisant le basculement progressif des centres de gravité vers le Sud. Le Maroc y a porté un plaidoyer structuré en faveur d'un accès équitable au financement climatique, d'une réforme des droits de vote au sein des institutions de Bretton Woods, et d'une gestion solidaire de la dette. Un plaidoyer pour l'Afrique dans la gouvernance mondiale À l'ONU, le Maroc plaide pour une réforme en profondeur des institutions internationales. Dans son message du 20 septembre 2022 à l'Assemblée générale, S.M. le Roi appelait à l'octroi d'un siège permanent pour l'Afrique au Conseil de sécurité, dans le cadre du consensus d'Ezulwini. Ce soutien constant à la représentativité du Sud se double d'une implication active dans les négociations climatiques. Depuis la COP22 à Marrakech, le Royaume défend une vision centrée sur l'adaptation, l'innovation locale, et la solidarité climatique. Il a notamment cofondé en 2021 l'Alliance pour le financement durable en Afrique, avec la BAD et l'Union européenne. Lors du Sommet africain sur le climat à Nairobi en 2023, Rabat a plaidé pour l'élargissement des mécanismes de financement vert et la reconnaissance des marchés carbone africains. En cohérence avec l'Initiative Atlantique, cette stratégie vise à positionner l'Afrique non plus comme périphérie, mais comme centre de solutions pour le XXIe siècle. À travers l'Initiative Atlantique, le Maroc redessine les contours d'une diplomatie transversale, où les logiques de développement, de sécurité, de spiritualité et de coopération convergent. En se positionnant à la fois comme ancrage régional et acteur global, le Royaume trace les lignes d'un leadership africain singulier, à la fois enraciné, pragmatique et ambitieux.