La crise diplomatique entre le Brésil et les Etats-Unis s'intensifie : Washington a imposé mercredi des sanctions au juge de la Cour suprême Alexandre de Moraes, invoquant des atteintes aux libertés. Une décision aussitôt rejetée par Brasilia, dans un contexte déjà marqué par des frictions autour de l'affaire Bolsonaro. Le département du Trésor américain a invoqué la loi Magnitsky, qui permet de sanctionner des responsables étrangers impliqués dans de graves violations des droits humains ou des faits de corruption. Alexandre de Moraes, selon le Trésor, est responsable d' »une campagne de censure oppressante, de détentions arbitraires, et de procès à motivation politique, notamment contre l'ancien président Jair Bolsonaro ». Dans un communiqué, le secrétaire au Trésor, Scott Bessent, a affirmé que Moraes « s'est autoproclamé juge et jury pour orchestrer une chasse aux sorcières illégale contre des citoyens et entreprises américaines et brésiliennes », avertissant que d'autres personnalités pourraient bientôt être ciblées. Les sanctions incluent le gel de tous les actifs du juge aux Etats-Unis et l'interdiction pour toute personne ou entité américaine d'effectuer des transactions avec lui. Elles s'ajoutent à la révocation du visa américain de Moraes et de ses proches, décidée le 18 juillet dernier, ainsi que d'autres membres de la Cour. Lire aussi : Tensions Brasilia-Washington : la Cour suprême brésilienne réfute les accusations de Trump au sujet de Bolsonaro La Cour suprême brésilienne a précisé que le magistrat ne possédait aucun bien ni compte bancaire aux Etats-Unis, soulignant le caractère avant tout symbolique, mais politiquement lourd, de cette mesure. L'initiative de Washington intervient alors que le procès contre Jair Bolsonaro pour une tentative présumée de coup d'Etat après sa défaite à la présidentielle de 2022 face au président Lula da Silva, est entrée dans la phase finale. Alexandre de Moraes supervise plusieurs enquêtes clés liées à ces faits, dont celles sur les événements du 8 janvier 2023, lorsque des partisans de l'ex-président ont pris d'assaut les sièges des pouvoirs à Brasilia, dans un épisode évoquant l'assaut du Capitole à Washington. Le Trésor américain reproche également au juge ses décisions contre des plateformes sociales comme X (ex-Twitter) et Rumble, temporairement suspendues au Brésil pour avoir refusé de se conformer à des décisions judiciaires. Washington considère que Moraes a ainsi violé la liberté d'expression, y compris celle de citoyens américains. Le gouvernement brésilien a dénoncé une ingérence « inacceptable ». « L'application arbitraire et injustifiable par les Etats-Unis de sanctions économiques (…) contre un membre de la magistrature nationale représente une attaque grave et inacceptable contre la souveraineté de notre pays. », a déclaré sur X, Jorge Messias, avocat général de l'Union (AGU). Cette crise diplomatique intervient dans un contexte bilatéral déjà très tendu. Le retour de Donald Trump à la Maison Blanche, début 2025, a ravivé les liens entre Washington et l'entourage de Jair Bolsonaro, ancien président brésilien (2019–2022) et proche allié de Trump. Bolsonaro, proche allié de Trump, dénonce une « persécution politique » destinée à l'écarter de la présidentielle de 2026. Outre le port d'un bracelet électronique, Bolsonaro est contraint de rester chez lui soir et week-end, et interdit de recourir aux réseaux sociaux et de contacter ambassades et autorités étrangères. Il risque jusqu'à 40 ans de prison. Dans la foulée des sanctions contre Moraes, Trump a signé un décret imposant une surtaxe de 50 % sur les exportations brésiliennes, évoquant une « menace inhabituelle et extraordinaire » que représenterait, selon lui, le Brésil pour la sécurité nationale des Etats-Unis. Une décision que Brasilia considère comme des représailles politiques directement liées aux procédures engagées contre Bolsonaro.