Réunis à New York en marge de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations unies, les ministres des Affaires étrangères du Maroc, du Tchad, du Mali, du Niger et du Burkina Faso ont tenu une concertation inédite, plaçant au cœur de leurs discussions l'initiative atlantique portée par le roi Mohammed VI. Cette rencontre, qui s'inscrit dans un contexte régional marqué par des incertitudes économiques et sécuritaires, traduit la volonté de bâtir des synergies concrètes entre Rabat et les pays de l'Alliance des Etats du Sahel (AES). La Mission permanente du Royaume du Maroc à New York a accueilli cette réunion autour du ministre Nasser Bourita. À ses côtés, ses homologues sahéliens — Dr Abdoulaye Sabre Fadoul (Tchad), Abdoulaye Diop (Mali), Bakary Yaou Sangaré (Niger) et Karamoko Jean-Marie Traoré (Burkina Faso) — ont affiché leur convergence de vues sur la nécessité d'accélérer l'opérationnalisation de l'initiative atlantique. L'objectif est clair : permettre aux pays enclavés du Sahel de briser l'isolement géographique qui entrave leur développement. La vision marocaine consiste à mettre à disposition des infrastructures portuaires et logistiques de premier plan — Tanger Med, Dakhla Atlantique, Nador West Med — au service des pays sahéliens. En facilitant leur accès aux flux commerciaux mondiaux, il s'agit de créer de nouveaux corridors économiques et de stimuler l'intégration régionale. Pour le Burkina Faso, le Mali et le Niger, dont les exportations de minerais, de produits agricoles ou d'hydrocarbures dépendent aujourd'hui de routes longues et coûteuses, cette ouverture atlantique pourrait transformer en profondeur leurs modèles économiques. Lire aussi : À l'ONU, le Maroc annonce la tenue à Rabat de la première Conférence sur les victimes africaines du terrorisme Au-delà des enjeux commerciaux, la coopération entre le Maroc et les pays de l'AES revêt une dimension sécuritaire incontournable. La région sahélienne reste confrontée à la montée en puissance des groupes armés et aux trafics transnationaux. L'accès à l'Atlantique, s'il est maîtrisé collectivement, permettrait de sécuriser les routes d'approvisionnement, de mieux contrôler les flux et de renforcer les dispositifs de lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée. Le Maroc, fort de son expérience en matière de sécurité maritime et de coopération militaire, apparaît comme un allié stratégique pour accompagner les armées sahéliennes dans cette tâche. La rencontre de New York a également une portée symbolique : elle démontre que l'avenir du Sahel peut être envisagé à travers une coopération Sud-Sud fondée sur la solidarité et la complémentarité, plutôt que sur une dépendance exclusive vis-à-vis d'acteurs extérieurs. En renforçant le dialogue politique et en mutualisant les moyens économiques et sécuritaires, le Maroc et les pays de l'AES posent les bases d'un partenariat durable et équilibré. L'initiative atlantique n'est pas seulement un projet d'infrastructures ; elle représente une vision politique de long terme. En connectant le Sahel à l'Atlantique, il s'agit de créer une communauté d'intérêts où les défis sécuritaires et les opportunités économiques sont abordés conjointement. Ce rapprochement pourrait, à terme, contribuer à stabiliser une région clé pour l'avenir de l'Afrique de l'Ouest et du Nord.