Stabilité, puis redémarrage ; les services numériques et l'outsourcing marocains confirment leur rôle d'amortisseur économique, avec un mix dominé par l'ITO et le CRM, mais désormais dynamisé par l'ingénierie externalisée et le BPO. Au-delà des chiffres, la modernisation statistique de l'Office des Changes et la feuille de route Digital Morocco 2030 installent des bases solides pour une montée en valeur durable. En 2024, les exportations marocaines de services numériques et d'outsourcing se sont établies à 26,2 milliards de dirhams, en très légère progression de 0,2% d'après l'Office des Changes. Dans un environnement international chahuté, cette stabilité vaut signal de résistance : le socle tient, les activités restent performantes, et la perspective 2025 se dessine déjà plus nerveuse, tirée par l'ingénierie externalisée et la montée en sophistication des prestations. Le cœur de l'appareil exportateur demeure porté par l'ITO, à 10,578 milliards de dirhams, soit un peu plus de 40% du total. La gestion de la relation client suit à 9,797 milliards de dirhams, représentant 37,4% des recettes. Ensemble, ces deux piliers concentrent plus des trois quarts des flux et confirment l'avantage compétitif du Royaume sur les services nearshore alignés sur les attentes européennes : compétences multilingues, continuité opérationnelle et coûts maîtrisés. Autour de ce noyau dur, les trajectoires divergent. L'externalisation des services d'ingénierie progresse de 7,1% pour atteindre 3,462 milliards de dirhams, appuyée par la demande en intégration systèmes, en tests et en data engineering. Le BPO avance plus vite encore, près de +17%, à 2,334 milliards de dirhams, porté par l'industrialisation des back-offices et des chaînes de traitement documentaire. À contre-courant, le KPO recule à 48 millions de dirhams contre 78 millions un an plus tôt, indice d'un marché encore étroit pour des prestations à forte densité analytique et juridique. Lire aussi : Un Conseil des ministres à portée stratégique : Réformes, partenariats et nouvelles nominations Les données trimestrielles confirment des cycles prononcés. Le CRM atteint un point haut au troisième trimestre 2024, à 2,814 milliards de dirhams, puis reflue au quatrième à 2,183 milliards, reflet classique des calendriers commerciaux et des campagnes de fin d'année côté clients. Le BPO, lui, corrige un creux observé au deuxième trimestre et se redresse sensiblement au troisième, illustrant la dépendance de certains volumes externalisés aux pics d'activité sectoriels. Dès le premier semestre 2025, une inflexion haussière se précise avec 13,4 milliards de dirhams d'exportations, soit +3,5% par rapport aux 12,9 milliards de la même période en 2024. L'ingénierie externalisée apparaît comme le principal accélérateur, avec 2,587 milliards de dirhams engrangés en six mois, quasi au niveau annuel de 2023. Cette dynamique s'explique par une demande plus soutenue en ingénierie applicative, par une offre de talents STEM mieux structurée et par un appareil productif qui a gagné en maturité et en fiabilité. La trajectoire s'inscrit dans la feuille de route « Digital Morocco 2030 », qui vise le positionnement du Royaume en hub régional de l'économie numérique. Dans ce cadre, l'Office des Changes, en coordination avec le ministère de la Transition Numérique et de la Réforme de l'Administration, modernise les instruments statistiques pour affiner la lecture par segments et améliorer la traçabilité des contrats offshore. L'objectif consiste à mieux piloter les politiques publiques : formation et certification, incitations ciblées, connectivité internationale, infrastructures cloud et data centers. Trois lignes d'effort se détachent pour changer d'échelle. D'abord, élargir la création de valeur vers l'analytics, l'IA et la R&D appliquée afin d'ouvrir davantage l'horizon du KPO ; ensuite, amortir la saisonnalité par la diversification des marchés et des verticales (finance, santé, industrie) ; enfin, renforcer la confiance numérique via la sécurité, la conformité et la souveraineté des données. En résumé, 2024 a consolidé la base, tandis que 2025 s'annonce comme l'année du regain d'allure, sous l'effet combiné de l'ingénierie externalisée et d'une montée en gamme désormais tangible.