L'adoption de la résolution 2797, consacrant la centralité du plan d'autonomie marocain, rebat les cartes au sein de l'Union africaine. Elle interroge la légitimité de la pseudo « RASD » et met en évidence le décalage entre le droit onusien contraignant et une architecture statutaire africaine encore dépourvue de mécanismes clairs d'expulsion susceptibles de rétablir la cohérence institutionnelle africaine. L'évolution récente du dossier du Sahara marocain, marquée par une série de résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies réaffirmant la centralité du plan d'autonomie marocain, notamment la résolution 2797 adoptée le 31 octobre 2025, a ravivé un débat juridique et politique majeur au sein de l'Union africaine. La présence de la pseudo « République arabe sahraouie démocratique » (RASD) en tant que membre de l'organisation panafricaine est de plus en plus perçue comme une anomalie au regard du droit international, posant la question de son éventuelle expulsion. Cette problématique met en lumière la tension entre les références normatives onusiennes et les mécanismes statutaires qui encadrent la composition de l'Union africaine (UA). Le cœur de l'argumentaire juridique repose sur la force contraignante des décisions du Conseil de sécurité des Nations unies. Conformément à l'article 25 de la Charte des Nations unies, les Etats membres s'engagent à accepter et appliquer les décisions du Conseil de sécurité. Des experts en relations internationales soulignent que ces résolutions possèdent une valeur obligatoire et contraignante équivalente à une loi. En qualifiant le plan d'autonomie marocain de solution prééminente, le Conseil de sécurité établit un nouveau paradigme juridique qui devrait, en principe, s'imposer à toutes les organisations internationales et régionales. Cette obligation est d'autant plus prégnante que le dossier est traité sous l'égide du maintien de la paix, conférant aux résolutions une autorité renforcée dans l'ordre juridique international. Lire aussi : Sahara marocain : Quelle est la prochaine étape du dossier après la résolution 2797 ? Par conséquent, il incombe à toutes les institutions internationales, continentales ou régionales, y compris l'Union Africaine, d'aligner leurs positions sur cette évolution, sous peine de créer une dissonance avec l'organe suprême de maintien de la paix et de la sécurité internationales. La participation de la « RASD », une entité non reconnue comme Etat par l'ONU et une majorité de la communauté internationale, à des sommets birégionaux comme ceux de la TICAD avec le Japon ou le prochain sommet UE-UA prévu en Angola les 24 et 25 novembre, devient ainsi une source de contradictions diplomatiques et juridiques majeures pour les partenaires de l'Afrique. Comment l'Union européenne pourrait-elle accepter la présence d'une « république » créée en 1975 et que le Conseil de sécurité vient d'invalider en parlant de souveraineté marocaine sur le Sahara ? Cette question capitale illustre l'urgence d'une clarification du statut de cette entité au sein des instances africaines. Toutefois, malgré la solidité de l'argumentaire fondé sur le droit onusien, la procédure d'expulsion se heurte à un vide juridique dans les textes fondateurs de l'Union africaine. L'analyse des statuts de l'organisation révèle une architecture conçue pour l'inclusion et la stabilité, mais peu préparée à l'exclusion d'un membre, même si son admission est contestée. L'Acte constitutif de l'UA, en son article 30, ne prévoit que la suspension des gouvernements ayant accédé au pouvoir par des moyens anticonstitutionnels, une disposition qui ne s'applique manifestement pas au cas de la « RASD ». L'article 31, quant à lui, régit uniquement le retrait volontaire d'un Etat membre après notification et un délai d'un an, ce qui dépend entièrement de la volonté du membre concerné. Aucune procédure d'expulsion forcée n'est donc mentionnée dans les textes actuels, créant ainsi une lacune statutaire majeure. L'Union africaine sommée d'ajuster ses textes aux résolutions onusiennes La seule solution juridiquement viable pour résoudre cette contradiction serait d'amender l'Acte constitutif de l'UA, comme le permet l'article 32. Ce processus est cependant long et politiquement exigeant. Il nécessiterait qu'un Etat membre soumette une proposition d'amendement au président de la Commission, qui devrait ensuite la communiquer à tous les Etats membres dans un délai de trente jours. La Conférence de l'Union, sur avis du Conseil exécutif, examinerait alors cette proposition et devrait l'adopter par consensus ou, à défaut, à la majorité qualifiée des deux tiers, soit 37 des 55 Etats membres. Enfin, pour entrer en vigueur, cet amendement devrait être ratifié par les deux tiers des membres, conformément à leurs procédures constitutionnelles nationales respectives, trente jours après le dépôt des instruments de ratification. Cette exigence de majorité qualifiée constitue un défi politique considérable dans un contexte où plusieurs Etats africains reconnaissent encore le Polisario et appréhendent les réactions algériennes. Les experts estiment qu'il faudrait poursuivre l'élan diplomatique pour convaincre ces pays que la dernière résolution du Conseil de sécurité est venue « signer le décret de mort » de cette entité. La présence de la « RASD » au sein de l'UA repose, selon les anciens diplomates, sur une base juridique fragile, car cette entité est « entrée par effraction » dans l'organisation alors qu'elle ne possède pas les attributs d'un Etat juridiquement constitué. Dans l'attente d'une réforme statutaire, certains suggèrent que l'Union africaine pourrait, à tout le moins, geler le statut de cette entité jusqu'à la résolution définitive du différend. Si la dynamique insufflée par le Conseil de sécurité des Nations unies offre un argumentaire juridique puissant en faveur d'une reconsidération du statut de la « RASD » au sein de l'Union Africaine, sa traduction concrète est conditionnée par la volonté politique des Etats membres de l'UA d'engager une réforme de leurs propres textes fondateurs. La résolution de cette question ne dépendra pas seulement de la poursuite de l'élan diplomatique marocain, mais aussi de la capacité de l'organisation panafricaine à adapter ses instruments juridiques aux réalités du droit international contemporain et à résoudre les contradictions héritées d'une période où le Royaume du Maroc n'était pas membre de l'Union.