CAN U20 : Ouahbi affiche ses ambitions avant d'affronter la Sierra Leone    AFD pledges €150 million for development in Morocco's southern provinces    Polisario leadership under fire with as petition calls for Brahim Ghali's departure    Caftan Week Marrakesh celebrates 25 years with a tribute to the Moroccan Sahara    Marrakech : Le défilé de la Caftan Week 2025 célèbre le Sahara    Doha : 287 candidats en lice pour la 11e édition du Prix Cheikh Hamad pour la traduction    IA : Des recommandations pour son l'intégrer dans les secteurs de la santé et l'éducation    La France renforce sa présence en matière de développement dans les villes du Sahara marocain par un investissement massif    Enquêtes... Accusations directes contre Tebboune et son régime d'implication dans un scandale d'espionnage en France    Liga / J35 : Ce dimanche, un après-midi de Clasico !    Mikel Arteta accélère le dossier Bilal El Khannouss    Le dirham s'apprécie de 0,6% face à l'euro du 2 au 7 mai (BAM)    L'Afrique a-t-elle une place dans la nouvelle route des Indes ? Décryptage avec Yasmina Asrarguis    Le nouveau livre percutant de Xavier Driencourt sur les relations franco-algériennes : une radioscopie sans fard d'un face-à-face toxique et inégal    Partenariats stratégiques maroco-chinois pour renforcer la coopération industrielle et financière    Botola D1 / J30 : Ce soir, le lever des dernières incertitudes de la saison 24-25 !    Plus de 50 millions de personnes en Afrique de l'Ouest et du Centre risquent la famine, avertit l'ONU    USA: le secrétaire au Trésor demande le relèvement du plafond de la dette fédérale    L'Egyptien Ahmed Wadi dévoile les contours de l'implantation de sa plateforme de tontine en ligne « Daret » au Maroc    Marketplace. Alibaba avance encore ses pions au Maroc    Maroc–Mauritanie : une synergie sahélo-africaine au service des échanges intercontinentaux    Le Caire: Le Trophée de la meilleure Nation de tennis en Afrique remis au Maroc pour la 7è année consécutive    Liverpool : Arne Slot évoque Hakimi en parlant du successeur d'Alexander-Arnold    Cristiano Ronaldo pose ses conditions pour rester à Al-Nassr    Comment le Maroc, grâce à la Coupe du monde 2030, est devenu le fer de lance d'un arrimage transméditerranéen et catalyseur d'un arc ferroviaire atlantique euro-africain    Le Belem, voilier légendaire du 19è siècle, fait escale à Tanger    Donald Trump salue des avancées majeures dans les négociations commerciales avec la Chine    Le Club des magistrats du Maroc s'apprête à renouveler ses instances dirigeantes lors d'un congrès national à Rabat    Près de 6 918 comprimés psychotropes saisis à Oujda : un couple interpellé    Formation professionnelle : la Mauritanie souhaite bénéficier davantage de l'expérience marocaine    Températures prévues pour le lundi 12 mai 2025    Donald Trump signe un décret établissant « l'auto-expulsion » des illégaux    Plus de 160.000 personnes confinées en Catalogne en raison d'un nuage toxique de chlore    L'AFD annonce des investissements de 150 millions d'euros au Sahara    MAGAZINE : Mohamed Choubi, la mort ne ment pas    Polisario : Depuis Tindouf, des appels au départ de Brahim Ghali    Trêve entre l'Inde et le Pakistan sous médiation américaine : Washington annonce un accord de cessez-le-feu et le lancement d'un dialogue global    Riyad : le Maroc prend part au Forum de dialogue des villes arabo-européennes    Cinéma d'animation et jeu vidéo : le grand croisement au FICAM    Le Pavillon Temporaire : un nouveau chapitre s'ouvre au Jardin Majorelle    Le Maroc honore de manière exemplaire ses engagements financiers aux Nations unies, au milieu d'un marasme financier dans un contexte budgétaire tendu    Biennale de Venise : SM le Roi a accordé à la culture et aux arts la place qui leur échoit dans un Maroc moderne (Mehdi Qotbi)    Le Président mauritanien reçoit le président de la Chambre des représentants    Le temps qu'il fera ce samedi 10 mai 2025    Le Directeur Général de l'AFD en visite dans les provinces du Sud    Mondial de Beach soccer : Le Sénégal lorgne la finale cet après-midi    Signature d'une convention-cadre entre l'Académie du Royaume et la Fondation Mohammed VI des Sciences et de la Santé    Caftan Week : La jeunesse taille sa place dans la haute couture marocaine    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Mohamed Kouam, homme de science et de conscience
Publié dans Maroc Diplomatique le 16 - 09 - 2016

Mohamed Kouam était de ces êtres rares, qui creusent avec patience leurs sillons loin des projecteurs, les ensemencent avec efficience de graines de connaissance et lèguent leurs jardins de sagesse aux générations futures. Un cultivateur des savoirs fertiles, économe des discours inutiles, imperméable aux gratifications futiles, qui n'avait d'autre conviction que sa foi profonde dans l'intelligence humaine. Derrière la rigueur du scientifique, le pédagogue soucieux de l'épanouissement intellectuel de ses étudiants, derrière le président d'université, l'anthropologue attentif aux véritables attentes de la société civile, derrière le directeur de la Fondation Maison du Maroc, le promoteur de la renaissance culturelle de la vieille institution parisienne, tombée dans la somnolence des gestions routinières. L'homme du devoir se voyait, dans ses missions d'intérêt général, comme une modeste lanterne éclairant les chemins entrouverts. La démocratisation qualitative de la culture était sa constante andragogie, l'analyse projective son inaltérable méthodologie.
Nous partageâmes le bonheur de réaliser deux événements d'arts plastiques, il en était l'ordonnateur, j'en étais le directeur artistique. De nos longues conversations, nous sortions mutuellement enrichis. Sous l'exquise politesse, la sobre élégance, la désarmante gentillesse, je découvris progressivement le dialecticien connecteur de contradictions fécondatrices, le maïeuticien accoucheur d'idées novatrices, le praticien concrétiseur de visions germinatrices. Son approche clarificatrice démêlait avec la même souplesse les dossiers volumineux et les sujets épineux. Il avait l'art de conjuguer les contraires, d'explorer les solutions inventives pour résorber les antagonismes, de ménager les susceptibilités idéologiques sans jamais renoncer à son exigence éthique. Il naviguait entre stimulante complexité du réel et vitalisante diversité des possibles. Nous parlions des mutations civilisationnelles impulsées par la Révolution numérique, des transformations sociétales induites par les nouvelles technologies, des implications philosophiques des performances génétiques, du décalage entre les méthodes éducatives traumatogènes et leurs environnements sociaux allergènes, de l'obsolescence des modélisations technocratiques sans d'autre finalité que leur fonctionnalisme stérilisateur, de l'impérieuse nécessité d'une pensée créatrice, qui relève les formidables défis des temps présents. L'humaniste évoquait volontiers, en privé, l'inconsolable remords d'Albert Einstein d'avoir révélé les secrets de l'atome, et le cauchemardesque parallélisme entre fanatisme religieux et scientisme ravageur. La sentence irréfutable de François Rabelais, «Science sans conscience n'est que ruine de l'âme», était sa ligne de conduite.
L'exposition «Femmes-vibrations» d'Elisabeth Bouillot-Saha n'était pas évidente, tant par sa thématique invoquant les déesses-mères des origines, remémorant les sociétés matriarcales sans conflits et sans guerres, que par son esthétique déclinant dans leur nudité allégorique, des archétypes féminins délivrés de toute entrave, dans un établissement officiel traversé par les luttes intestines des fondamentalistes et des modernistes. Mohamed Kouam fit preuve d'une liberté de décision transcendant, avec délicatesse, les affrontements idéologiques, désarmant par anticipation les polémiques improductives, plaçant la raison, créative de l'art, au dessus de la politique restrictive de la raison. Il eut le même courage pour offrir sa vitrine parisienne à deux artistes marocaines transgressives, Souad Byad et Samira Aït El Maalam, activistes inspirées des droits humains, indomptables batailleuses du féminisme dans une société hantée par les voiles de l'ignorantisme. Deux plasticiennes surdouées bravant, sur leurs toiles subversives, la censure morale et les réactions viscérales, dénonçant, sans ménagement, les traditions fossilifères, les tabous plombifères, les interdits mortifères. Le rationalisme organisationnel de Mohamed Kouam s'accompagnait toujours d'une indéfectible ouverture d'esprit. Il ouvrait sans cesse les vannes émancipatrices de la liberté de création, de la liberté d'expression, de la liberté d'expérimentation. L'ingénieur, matérialisateur de l'imaginaire, est un utopiste par définition, concepteur de projets improbables dans le scepticisme ordinaire, réalisateur de prouesses inimaginables dans l'admiration processionnaire. Victor Hugo ne disait-il pas : «Les utopies d'aujourd'hui sont les réalités de demain» ? Depuis l'âge de pierre, la culture s'immerge dans l'invention, l'invention du sens dans le nihilisme chaotique, l'invention de la liberté dans le messianisme apocalyptique, l'invention de la dignité dans l'obscurantisme despotique. Il n'est d'humaine humanité que dans la culture. Un homme de qualité s'en va, son héritage demeure.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.