Il était environ minuit, dans la nuit du dimanche au lundi, quand un individu s'est introduit au domicile des Laâbi (Abdellatif et Jocelyne) à Harhoura, près de Rabat, et les a assaillis à l'arme blanche. Le mobile de l'attaque reste encore flou pour le poète marocain, qui a été également cambriolé quelques jours auparavant. Les faits Alors qu'il entendait des bruits dans la serrure de la porte, Abdellatif Laâbi a été ouvrir… pour se retrouver face à une furie qui l'a immédiatement blessé avec un couteau à longue lame au niveau du cou. Puis l'agresseur s'est dirigé vers son épouse Jocelyne, lui a cassé un vase sur la tête avant de lui asséner un violent coup au visage. Le poète, heureusement, n'a finalement qu'une plaie superficielle au cou, la lame ayant évité la carotide, mais son épouse a eu en revanche besoin de cinq points de suture pour refermer sa blessure au crâne. Le couple a pu alerter les voisins qui ont eux-mêmes appelé la gendarmerie, laquelle a pu très rapidement appréhender l'agresseur. L'enquête révélera bientôt les dessous de cette affaire. Abdellatif Laâbi, toujours égal à lui-même, calme et lucide, s'interroge sur les motifs de l'agression. « L'homme a fait montre d'une hargne incompréhensible, et je n'ai pas très bien compris quel était le mobile de son acte… ». Quelques jours auparavant, la serviette de l'intellectuel avait été dérobée, avec les pièces d'identité, la carte bancaire et des documents personnels. Qui est Abdellatif Laâbi ? Né en 1942, Abdellatif Laâbi est l'un des plus grands intellectuels marocains, tant par l'œuvre abondante que par son engagement militant incessant. Il est également l'un des écrivains majeurs en langue française. Il a été co-fondateur de Souffles, la revue qui s'est révélée d'une grande influence sur les mouvements intellectuels naissants dans le Maroc post-indépendance des années 60. Arrêté et torturé en 1972, il a été condamné à 10 ans de prison, puis libéré en 1980, après 8 ans passés à la Centrale de Kenitra. Dans sa biographie publiée sur son blog, il est écrit qu' « il s'exile en France en 1985. Depuis, il vit (le Maroc au cœur) en banlieue parisienne. Son vécu est la source première d'une œuvre plurielle (poésie, roman, théâtre, essai) sise au confluent des cultures, ancrée dans un humanisme de combat, pétrie d'humour et de tendresse. Il a obtenu le prix Goncourt de la poésie en 2009 et le Grand Prix de la francophonie de l'Académie française en 2011 ». Traduit en plusieurs langues dont l'arabe, l'espagnol, l'anglais, l'allemand et le turc, Abdellatif Laâbi est un auteur très prolifique : des romans, comme L'Œil et la nuit (2003), Le Chemin des ordalies (2003), Chroniques de la citadelle d'exil (2005), Les Rides du lion (2007), Le Livre imprévu (2010), pour les romans… et des recueils de poésie : Le soleil se meurt (1992), L'Etreinte du monde (1993), Le Spleen de Casablanca (1996), Les Fruits du corps (2003), Tribulations d'un rêveur attitré (2008), Œuvre poétique I et II (2006 ; 2010)… Poème, janvier 2015 J'atteste qu'il n'y a d'Être humain que Celui dont le cœur tremble d'amour pour tous ses frères en humanité Celui qui désire ardemment plus pour eux que pour lui-même liberté, paix, dignité Celui qui considère que la Vie est encore plus sacrée que ses croyances et ses divinités J'atteste qu'il n'y a d'Être humain que Celui qui combat sans relâche la Haine en lui et autour de lui Celui qui dès qu'il ouvre les yeux au matin se pose la question : Que vais-je faire aujourd'hui pour ne pas perdre ma qualité et ma fierté