Il a 93 ans et il dispose de la sagesse qui va avec, et de cette propension à dire les choses clairement que lui confère son âge. Lui, c'est Mhamed Boucetta, en retrait depuis plusieurs années de son parti, qu'il a dirigé durant un quart de siècle, de 1974 à 1998. L'ancien SG de l'Istiqlal a tenu à être présent à la commémoration du 11 janvier 1944 et à parrainer la réconciliation (historique, un terme cher aux Istiqlaliens) entre le patron du parti Hamid Chabat et celui qui devait l'être, Abdelwahed el Fassi. Après trois ans de conflits internes et de luttes intestines entre la direction officielle du parti de l'Istiqlal et le courant Bila Haouada (intransigeance) mené par le clan el Fassi et dirigé par Abdelwahed el Fassi, fils de son père Allal, le fondateur, l'heure est au rapprochement. Les armes sont rangées et les sourires réapparaissent sur les visages, encore un peu tendus. Hamid Chabat, depuis qu'il a été élu en 2012 SG de l'Istiqlal, a superbement ignoré Mhamed Boucetta, mais aujourd'hui, il en a cruellement besoin, surtout qu'en dépit de sa bruyante réconciliation avec son ennemi el Fassi, il doit affronter une fronde au sein de son Comité exécutif, dont la moitié des membres n'étaient pas au rendez-vous ce 11 janvier. Chabat et el Fassi se sont donc donné l'accolade, et Boucetta était là pour apporter son onction, historique, donc... et il a dit des vérités : 1/ Le Maroc est un pays en développement, pas sous-développé, mais en développement : 2/ Le parti a besoin d'unité et non de dissensions afin que, main dans la main, il participe à la marche du Maroc : 3/ Le 11 janvier 1944 fut le jour de l'unité des résistants à l'occupation française, et le 11 janvier 2016 est celui de l'unification des rangs de l'Istiqlal ; 3/ Il ne fallait pas sortir du gouvernement, cette décision ayant été une erreur de jugement car en pareille période, il ne faut pas s'éloigner des centres de pouvoir et de décision. Encore un peu, et Mhamed Boucetta aurait rejoint Abdelilah Benkirane en demandant en public à Chabat qui lui avait suggéré de quitter le navire gouvernemental en pleine tempête... mais il ne l'a pas fait. L'heure était à la fête, à la réconciliation entre « frères » et, surtout, à la préparation de l'élection législative dont personne ne connaît encore la date précise, pour cause d'entremêlement de dates et de calendriers à la rentrée (retour de vacances, rentrée scolaire, pèlerinage, aïd el-Kébir, Cop 22...).