Lors de notre visite du chantier des Jardins de Moulouya en janvier dernier (cf reportage), la direction d'Urbatlas, filiale de GFM détenue par Addoha et Fadesa Martinsa, promettait de livrer les 2000 appartements restant en temps et en heure, en respectant scrupuleusement le calendrier du protocole d'accord signé il y a plus d'un an avec Acia. Un engagement qui n'a pas été tenu. Fin mars dernier, près de 600 appartements n'ont pas été livrés. J-32 avant le Smap Immo de Paris, le grand salon de l'immobilier marocain en France. Alors que les promoteurs marocains préparent l'évènement et que leurs commerciaux peaufinent leurs argumentaires de vente pour séduire les 50 000 visiteurs prévus, du côté des clients lésés des Jardins Moulouya à Saïdia, le ras-le-bol monte d'un cran. Et pour cause. Alors que près de 600 appartements devaient être livrés par Urbatlas - filiale de GFM détenue à 50% par Addoha et 50% par Fadesa Martinsa - fin mars dernier, les clients concernés n'ont rien reçu. Objectif : Smap Immo «D'après le protocole d'accord que le promoteur est censé suivre à la lettre, nous devions être livrés de 500-600 appartements fin mars dernier, mais nous n'avons rien reçu. Nous nous sommes tus durant plus de 3 mois pour laisser le promoteur faire son travail et en retour, il ne tient pas sa promesse», déplore Mohamed El Halfa, porte parole de l'association Acia, représentant les intérêts des clients lésés. «On lui a envoyé un mail pour connaître les raisons de ce retard, il nous a affirmé qu'il allait revenir vers nous.» espère-t-il. De son côté, Yabiladi a également contacté le promoteur pour connaitre les raisons du retard. Il affirme répondre à nos questions après sa rencontre prévue la semaine prochaine, avec Acia à Paris. Tandis que le promoteur peine à respecter ses engagements de livraison, l'association quant à elle, a planifié son mois d'avril, un mois avant le Smap Immo de Paris. Après la rencontre avec la direction d'Urbatlas, Acia prévoit une assemblée générale avec tous les membres, d'ici deux semaines. Objectif : discuter des actions à mener lors du SMAP Immo de Paris. Du pain béni pour l'association pour sensibiliser les futurs acheteurs MRE souhaitant investir au Maroc. De plus, les clients lésés des Jardins Moulouya ne sont plus seuls. D'autres clients lésés dans des projets immobiliers à Bouskoura et à Tanger se joignent à eux. Acia est-elle trop «molle» ? Cependant, même si Acia gagne de nouveaux membres, elle en perd aussi. Plusieurs personnes ont déserté l'association car elles en ont assez de la manière dont Acia gère le dossier. Elles la trouvent trop laxiste et pas assez virulente envers Urbatlas. «Certains de nos adhérents nous traitent de tous les noms !», confie Mohamed El Halfa. Certains de ses adhérents auraient aimé, par exemple, qu'Acia écrive un courrier au Président Hollande pour qu'il puisse s'entretenir avec le roi Mohamed VI au sujet de leur calvaire, lors de sa visite au Maroc. L'association pour le droit et la justice au Maroc représentant les victimes de spoliations immobilières s'était jetée sur l'occasion de cette visite pour se faire entendre. «On a pensé à écrire ce courrier et on a, au final, laissé tomber. Ce n'est pas une affaire d'état. C'est une affaire qui concerne avant tout des clients MRE et une société marocaine. Il n'y a pas mort d'homme», répond d'un ton calme Mohamed El Halfa. Acia a raté Hollande Pas mort d'homme. Pourtant, pour des centaines de familles, ne pas voir la couleur de leur appartement depuis 7 ans (3 ans d'après Urbatlas) est un véritable supplice. Certains couples ont dû divorcer ou se séparer suite aux querelles incessantes suite à cet achat d'appartement. Sans oublier, les économies d'une vie pour d'autres familles plus modestes, investies dans un appartement fantôme. Des familles qui n'arrivent pas à joindre les deux bouts en France, entre les charges et l'éducation de leurs enfants. Avec la visite de Hollande, Acia a certainement perdu là une bonne occasion de ne pas se taire, d'autant que les autorités marocaines se moquent de la détresse de ces centaines de familles MRE depuis bien longtemps. «Nous n'avons jamais reçu de réponse de la part du ministère des MRE, ni encore moins des parlementaires marocains à qui nous avions envoyé un courrier !», rappelle Mohamed El Halfa. Dorénavant, face aux retards des livraisons, le promoteur Urbatlas se retrouvera, non plus, devant un seul interlocuteur, qui était Acia, mais des dizaines de clients en colère et difficiles à calmer. Plusieurs d'entre eux prévoient de manifester lors du SMAP Immo de Paris. Certains envisagent même de se mettre en grève de la faim. D'autres, ont déjà pris des avocats pour entamer des actions judiciaires contre le promoteur. Les médias français ne les lâchent pas Alors que les autorités et médias marocains ont lâché ces MRE lésés, leur dernier espoir réside dans les médias français, intéressés par leur histoire. Deux grandes chaînes françaises, Al Jazeera et des quotidiens français veulent réaliser des reportages sur des clients lésés à l'occasion du Smap Immo de Paris. «Hormis Yabiladi, on a été déçu de la manière dont les médias marocains ont parlé de notre affaire. Quand je pense à la manière dont L'Economiste titrait son article sur nous «Fin heureuse pour les Jardins de la Moulouya" en janvier dernier ! Quelle fin heureuse ? On n'a toujours pas été livrés ! Et ce n'est pas demain la veille !», conclut- il.