Un système de valeurs éthique et cohérent...    L'Equateur s'apprête à ouvrir une ambassade au Maroc en juin prochain    Une trentaine d'entreprises égyptiennes projette d'implanter des unités industrielles au Maroc d'ici 2028, le Caire envoie une délégation à Rabat en septembre    La Chine inaugure une nouvelle ère dans le secteur des transports avec le lancement de la première flotte de camions électriques entièrement autonomes    Course aux élections 2026 : L'Istiqlal au-dessus des mêlées précoces    Développement durable : L'ONCF réduit son empreinte carbone de 26 % en 2024    Le Maroc, quatrième partenaire commercial arabe de l'Egypte avec un milliard de dollars d'échanges en 2024    Cri d'alarme de l'OMM : Quand les extrêmes climatiques menacent le Maroc    Le président français Emmanuel Macron écarte une visite à la Grande Mosquée de Paris, sur fond de tensions avec Alger et de soupçons d'entrisme islamiste    Le Royaume-Uni déconseille tout déplacement dans plusieurs zones frontalières de l'Algérie    Botola DI I / J30 : Cet après-midi, KACM-USYM décisif pour le titre et la montée; CAYB-MCO décisif pour les barrages ! !    CAN U20 : le Nigeria décroche le bronze aux dépens du pays hôte    Ouahbi/CAN U20 : les joueurs ont fait de leur mieux, focus désormais sur le Mondial    Finale CAN U20 : Les onze Lionceaux du coup d'envoi    CAN U20 : Les Lionceaux passent à côté de leur finale !    Casablanca : arrestation d'un individu en possession de 4 400 comprimés d'ecstasy et de cocaïne    Rachida Dati visite le pavillon marocain au Festival de Cannes    MAGAZINE : Bouchaib Habbouli, extinction des lumières    Festival des musiques sacrées du monde : Jajouka, une transe qui a du Stones !    Ismael Saibari et Couhaib Driouech sacrés Champions d'Eredivisie    RKC : Mohamed Ihattaren fait ses adieux avec un dernier but    Akhannouch représente Mohammed VI à l'inauguration du pontificat du pape Léon XIV    El Guerguerat : 3t de haschisch saisies, une tentative de trafic international de drogue déjouée    Cerrada desde 2012, el rey Mohammed VI ordena la reapertura de la embajada en Damasco    Laayoune: El RNI de Akhannouch busca ganar terreno en el bastión del Istiqlal    Fermée depuis 2012, le roi Mohammed VI ordonne la réouverture de l'ambassade à Damas    Sécurité: La DGSN, un modèle de police moderne salué par Maghreb Insider    CAN U20 : L'Afrique du Sud décroche le titre face au Maroc    Renault Maroc : services préférentiels au profit du personnel de la Sûreté nationale    Un musée américain restitue à la Chine de précieux trésors historiques datant de l'époque des Royaumes Combattants    Le Moussem de Tan-Tan, un événement culturel majeur qui incarne la richesse du patrimoine et des valeurs authentiques des provinces du Sud (M. El Bouari)    Plus de 270 migrants secourus au large de la Tunisie par SOS Méditerranée    Messe inaugurale pour le Pape Léon XIV    Tragédie à New York après la collision d'un navire mexicain avec le pont de Brooklyn : morts et blessés    La DGSN encourage l'innovation dans le domaine de l'IA pour faire face aux défis sécuritaires    Akhannouch représente le Roi à l'inauguration officielle du pontificat du Pape Léon XIV    Un geste de fidélité : la DGSN soutient les familles des martyrs du devoir    Températures prévues pour le lundi 19 mai 2025    INDH : deux décennies d'investissement social    Jeu dangereux...    À El Jadida, 420 000 visiteurs dès la première journée des JPO de la DGSN    Talbi Alami: «Nous ne sommes pas en campagne électorale»    Contrôle à l'origine : le Maroc resserre l'encadrement des importations    Ukraine : Trump va s'entretenir lundi avec Poutine    Les musées, gardiens des patrimoines et acteurs du renouveau culturel    Le sommet arabe soutient la candidature du Maroc au Conseil de sécurité    Helsinki célèbre l'amitié avec le Maroc à travers une nouvelle association    La princesse Lalla Hasnaa inaugure la 28e édition du festival de Fès des musiques sacrées du monde    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Femmes séropositives au Maroc : La triple peine
Publié dans Yabiladi le 28 - 06 - 2017

Dans une étude consacrée à la sexualité des Marocaines atteintes du VIH, le sociologue Bouchaib Majdoul analyse la perception du sida dans l'inconscient collectif marocain et les conséquences qui en résultent sur les femmes.
Difficile entreprise que l'étude de la sexualité féminine et du rapport au corps dans les pays arabo-musulmans, de surcroît lorsqu'il s'agit de femmes séropositives. Bouchaib Majdoul, professeur de sociologie et d'anthropologie à la Faculté des lettres et sciences humaines Ibn Zohr d'Agadir, s'est pourtant attelé à cette épineuse question, ô combien taboue.
Dans une étude intitulée «Sexualité des femmes séropositives au Maroc» publiée le 24 juin, le sociologue a compilé des témoignages qu'il a glanés dans les locaux de l'Association de lutte contre le sida (ALCS) à Casablanca. Ouvrières, prostituées, étudiantes, salariées, femmes au foyer, jeunes et moins jeunes ; les propos recueillis dressent un panorama varié en termes d'appartenances socioprofessionnelles, de statut matrimonial, d'âge («de 17 ans jusqu'à 40 et plus») et d'appartenance géographique («des femmes du sud comme du nord»).
La femme, première source de propagation ?
Après une longue introduction qui voit s'opposer la sociologue Fatima Mernissi à Freud sur la sexualité féminine, la première reprochant au second le caractère ethnocentré de sa théorie («En définitive, Fatima Mernissi reproche essentiellement à Freud d'avoir voulu construire 'une théorie scientifique, avec tout ce que cela implique d'objectif et d'universel', à partir d'une conjoncture qui 'n'est que le résultat défini de sa propre culture'»), Bouchaib Majdoul revient longuement sur la manière dont les chercheurs et les professionnels de santé ont façonné le VIH dans l'inconscient collectif marocain. Il écrit : «Dès le début de l'épidémie, les chercheurs ont construit des 'groupes à risque', pour désigner des ensembles d'individus exposés en fonction de leur comportement. La dynamique des programmes nationaux et internationaux, les programmes marocains de lutte contre le sida ont désigné en premier lieu : les prostituées de sexe féminin, groupe présenté par les acteurs de santé comme principal vecteur de la contamination.»
«Si les 'prostituées' ont été incriminées dès le début de la prise en compte de la maladie, au Maroc comme dans d'autres pays africains (Desclaux, 1996), c'est parce que le sida - maladie qui se transmet par le sang et les relations sexuelles - est trop chargé symboliquement pour être appréhendé autrement que dans le cadre de la déviance sexuelle et sociale», poursuit Bouchaib Majdoul. Au début perçu comme une maladie «purement masculine», le sida s'est peu à peu mué en un virus féminin en raison de l'assimilation des prostituées à un «groupe à risque».
«Le processus de féminisation de la maladie a très tôt associé femmes et sida dans les représentations sociales de la maladie», explique le sociologue. Une association femme-sida qu'il juge «fondatrice de l'histoire marocaine du sida et tout se passe comme si les programmes de lutte ne pouvaient que la développer et la confirmer. Le sida, désigné comme maladie de la prostitution et par extension de l'inconduite, reste pensé comme une maladie dont les femmes sont la source et le vecteur et où l'homme n'est qu'un intermédiaire dans le processus de propagation».
La maladie de l'Ailleurs
Si d'autres professions composent ces «groupes à risque», notamment les «transporteurs, camionneurs, chauffeurs de taxi et marins», reste que la prostitution s'affiche comme le principal vecteur de propagation, d'après des études sur les prostituées et les ouvrières réalisées ces dernières années. «Ce groupe corrobore aussi parfaitement cette version de l'épidémie. En effet, les membres de ce groupe voyagent, traversent les frontières et sont donc censés entretenir des relations sexuelles avec des prostituées. Le sida est donc une maladie de la prostitution, de la débauche, il menace le pays de l'intérieur ; maladie de l'Autre (l'étranger, le touriste, l'Européen et l'Africain), il le menace de l'extérieur», écrit Bouchaib Majdoul.
«Pourquoi moi ?»
A l'intérieur, la menace est bel et bien incarné par la femme ; la mère en l'occurrence :
«Les mères sont les seules responsables de l'infection de leurs enfants et les pères sont au-delà de tous soupçons. Les femmes sont donc présentées comme contaminants aux deux bouts de la chaîne.»
Ces mères séropositives écopent ainsi d'une double peine : «la souillure et la dangerosité». L'une d'elle raconte : «Même si c'est mon mari qui m'a contaminée, les autres me voient comme coupable et seule responsable, et avec la mort de mon mari et de ma petite fille je représente désormais un danger pour les autres (...).»
Au regard culpabilisant de la société, s'ajoute un sentiment d'injustice, surtout lorsque le virus se transmet dans le cadre d'une relation conjugale, trahissant ainsi un adultère. Une autre s'insurge : «(...) C'est injuste, (...) je n'ai rien fait de mal, je n'ai jamais eu de relations sexuelles extraconjugales, ni avant mon mariage ni après. (...) C'est le virus qui est venu me chercher chez moi (...) Pourquoi les milliers de prostituées qui sont dans la rue n'ont rien, alors que les femmes comme moi souffrent à cause d'une faute qu'elles n'ont pas commise ?»
Dans le miroir, l'image s'en voit bientôt déformée, abîmée. Le rapport au corps se fait plus dur, lui aussi : «L'imputation de la responsabilité directe de la propagation de la maladie aux femmes affecte profondément la représentation des femmes d'elles-mêmes et leur perception de leur propre corps.» La double peine devient triple : culpabilité, injustice, dévalorisation.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.