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Le rééquilibrage des pouvoirs dans la nouvelle Constitution marocain
Publié dans Albayane le 24 - 07 - 2012

De la Constitution marocaine de 1962, le professeur Mohammed Lahbabi avait dit qu'il s'agissait d'une Constitution «mon bon plaisir». Les évolutions constitutionnelles ultérieures, à l'exception de la Constitution de 1970, ont toutes amorcé puis entretenu un mouvement de redistribution des pouvoirs entre les diverses institutions constitutionnelles. Mais ce mouvement restait limité et l'alternance intervenue en 1998 n'avait rien changé à cet égard. Bien plus, on était en mesure de dire que les Premiers ministres qui se sont succédé à la tête du gouvernement n'avaient sans doute pas utilisé comme ils l'auraient pu, les pouvoirs dont ils disposaient sur la base de la Constitution de 1996. Quoi qu'il en soit, nombreux étaient les leaders politiques à penser qu'il conviendrait qu'une révision de la Constitution accroisse la marge de manœuvre du parlement et du gouvernement, afin de s'orienter vers un régime plus parlementaire. Les événements du «printemps arabe» vont inciter Sa Majesté le Roi Mohammed VI à initier, dans la lignée des réformes politiques qu'il avait entreprises jusque-là, une profonde révision de la Constitution, une révision globale, qui s'est traduite notamment par une redistribution des prérogatives du Roi et par un réaménagement des attributions du gouvernement et du parlement, tandis que l'indépendance du pouvoir judiciaire était également renforcée.
Le pouvoir royal demeure naturellement le point central du régime politique, en raison de la double qualité du Roi, chef religieux et chef d'Etat. A la différence des anciens textes constitutionnels, ces deux fonctions sont désormais distinguées dans les articles 41 et 42 de la Constitution. Ce sont naturellement les attributions du chef de l'Etat qui sont concernées par le rééquilibrage.
Le chef de l'Etat conserve évidemment des pouvoirs d'arbitre capable de garantir le bon fonctionnement des institutions constitutionnelles.
Il préside ainsi le Conseil des ministres dont la composition et les compétences sont précisées dans les articles 48 et 49. C'est au sein de ce Conseil que sont débattues et arrêtées les grandes décisions concernant la marche de l'Etat, mais après que le Conseil de gouvernement aura de son côté pris position, étant précisé que le gouvernement fait partie du Conseil des ministres.
Le Roi préside par ailleurs le Conseil supérieur de sécurité nouvellement créé par la Constitution, en vertu de son article 54. Ce Conseil comporte, outre le chef du gouvernement, certains de ses membres ainsi que des responsables des forces armées et des services de sécurité. Enfin, l'article 59 maintient la possibilité de proclamer l'état d'exception au cas où l'intégrité du territoire ou le fonctionnement des institutions seraient compromis, mais dans des conditions mieux encadrées que ce n'était le cas dans les constitutions antérieures, notamment en ce qui concerne le maintien des droits et libertés.
Pour l'accomplissement de ses missions, le Roi exerce par dahir les pouvoirs qui lui sont expressément dévolus par la Constitution. Ce qui exclut l'exerce de pouvoirs qui seraient déduits de façon implicite des missions qui lui sont confiées. Il y a dans cette disposition un respect du partage des compétences opéré par la nouvelle Constitution, et donc un rééquilibrage des pouvoirs au profit du gouvernement et du parlement.
A l'égard du gouvernement, les pouvoirs du Roi sont désormais plus limités qu'il s'agisse de la désignation de son chef qui doit être choisi au sein du parti majoritaire aux élections, ou qu'il s'agisse des ministres qui sont nommés par le Roi sur proposition du chef du gouvernement. Par ailleurs, le gouvernement n'est plus responsable devant le Roi, mais seulement devant le parlement, et spécialement devant la Chambre des représentants dans les conditions initiales de l'investiture lorsque le chef du gouvernement présente son programme, et ultérieurement dans les conditions de l'engagement de sa responsabilité, soit à son initiative (article 103), soit à celle de la Chambre des représentants par une motion de censure (article 104).
Désormais, seule la démission du chef du gouvernement entraîne la cessation des fonctions du gouvernement. Toutefois, le Roi peut démettre un ou plusieurs ministres après en avoir conféré avec le chef du gouvernement. Ce droit est d'ailleurs reconnu de façon symétrique au chef du gouvernement.
Le gouvernement est investi de la plénitude du pouvoir exécutif, conformément à l'article 89, et son chef dispose du pouvoir réglementaire. Il existe désormais un partage du pouvoir de nomination aux emplois de l'Etat. Les articles 91 et 92 déterminent les emplois qui relèvent de la nomination du chef du gouvernement, ou ceux dont la nomination est décidée en Conseil de gouvernement. Outre le pouvoir de nomination aux emplois militaires, le Roi ne conserve, quant à lui, que le pouvoir de nommer à certains hauts emplois énumérés par l'article 49, étant entendu qu'une loi organique pourra déterminer les autres emplois réservés à la nomination en Conseil de gouvernement et surtout la fixation des conditions de ces nominations, notamment le respect de l'égalité des chances et des principes de mérite.
Vis-à-vis du parlement, le Roi conserve un certain nombre de prérogatives. Il peut adresser des messages au parlement et à la nation qui sont lus devant les deux chambres. Il préside l'ouverture de la première session annuelle et peut demander une nouvelle lecture d'une loi ; mais outre l'obligation de promulgation de la loi qui incombe au Roi dans le délai d'un mois à partir de sa transmission au gouvernement, elle doit être publiée dans un même délai à compter de la promulgation. Toutefois, cette obligation de publication incombe au gouvernement et constitue une garantie de son application.
Le chef du gouvernement peut dissoudre la Chambre des représentants par décret en Conseil des ministres, après consultation du Roi, du président de la Cour constitutionnelle et du président de la Chambre des représentants. Enfin, le Roi peut dissoudre les deux chambres du parlement ou seulement l'une d'entre elles par dahir après consultation du président de la Cour constitutionnelle, du président de la Chambre concernée et information du chef du gouvernement.
Le rôle du parlement est réévalué de diverses manières, notamment par une extension importante du domaine de la loi, mais aussi par l'accroissement de son pouvoir de contrôle de l'action du gouvernement. Ce dernier, outre les moyens de contrôle, questions et commissions d'enquête, auxquels il était déjà soumis, devra annuellement présenter un bilan d'étape de l'exécution du programme sur la base duquel il a été investi de la confiance de la Chambre des représentants sans oublier la discussion et l'évaluation une fois par an des politiques publiques qu'il conduit.
Le pouvoir judiciaire connaît également un renforcement de son indépendance par rapport à tous les autres pouvoirs y compris, dans une certaine mesure, à l'égard du pouvoir royal. La substitution de l'appellation, « pouvoir judiciaire », à « justice », est déjà un signe évident de la volonté du constituant de rehausser son prestige. D'abord, le statut des magistrats relèvera désormais d'une loi organique et le nouveau Conseil supérieur du pouvoir judiciaire doit veiller au respect de ce statut. Ensuite, le Roi reste le garant de l'indépendance du pouvoir judiciaire dont il est dit qu'il est indépendant du pouvoir exécutif et du pouvoir législatif, mais un aménagement institutionnel limite son pouvoir d'intervention. Si le Roi préside le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire, aux termes de l'article 115, la composition de celui-ci fait une place plus importante aux magistrats désormais au nombre de dix à y siéger, aux côtés des trois plus hauts magistrats du royaume, du Médiateur, du président du Conseil national des droits de l'Homme et de cinq personnalités nommées par le Roi sur la base de la compétence et de l'intégrité dont un membre présenté par le Conseil supérieur des ouléma.
Cela dit, c'est le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire qui nomme les magistrats, le Roi se bornant à approuver ces nominations. Les magistrats dont l'indépendance est assurée peuvent faire appel au Conseil s'il leur apparaît que cette indépendance est menacée. Enfin, ils rendent désormais la justice au nom du Roi et de la loi. Cette précision témoigne de la volonté du constituant de faire des magistrats les serviteurs exclusifs de la loi, dans sa généralité et pour son impartialité.
*Créé en 2004 à Rabat, le Centre d'Etudes Internationales (CEI) est un groupe de réflexion indépendant, intervenant dans les thématiques nationales fondamentales, à l'instar de celle afférente au conflit du Sahara occidental marocain. La conflictualité structurant la zone sahélo-maghrébine constitue également l'une de ses préoccupations majeures. Outre ses revues libellées, «Etudes Stratégiques sur le Sahara» et «La Lettre du Sud Marocain», le CEI initie et coordonne régulièrement des ouvrages collectifs portant sur ses domaines de prédilection. Sous sa direction ont donc été publiés, auprès des éditions Karthala, «Une décennie de réformes au Maroc (1999-2009)» (décembre 2009), «Maroc-Algérie : Analyses croisées d'un voisinage hostile» (janvier 2011) et « Le différend saharien devant l'Organisation des Nations Unies» (septembre 2011). En avril 2012, le CEI a rendu public un nouveau collectif titré, «La Constitution marocaine de 2011 – Analyses et commentaires ». Edité chez la LGDJ, ce livre associe d'éminents juristes marocains et étrangers à l'examen de la nouvelle Charte fondamentale du royaume.
Professeur honoraire à la faculté de droit de Grenoble
Conseiller auprès du Centre d'Etudes Internationales


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