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Mohamed Benjeddi, le baroudeur des planches qui a défié son handicap
Publié dans Albayane le 16 - 12 - 2015

Courir, grimper, jouer au football...tous ces gestes anodins par lesquels les enfants se font plaisir et vont à la découverte des objets, des êtres et du monde les entourant, ne faisaient plus partie du quotidien du dramaturge mondialement connu Mohamed Benjeddi depuis qu'il s'est retrouvé, un jour des années 50 du siècle dernier, incapable de bouger ses membres, alors qu'il était encore un gamin plein d'énergie et d'appétit de vivre.
Poignant et rebelle à tout traitement, le handicap semblait être le sort du petit Mohamed. Jusqu'au jour où son père a décidé, face à la détresse de son fils, de plier bagage pour aller s'installer à Sellaouite, un douar près de Debdou dans la région de l'Oriental connu pour son climat sain et idéal pour les malades. Comme par miracle, l'enfant infirme retrouva l'usage de ses membres, à l'exception de sa jambe gauche qui boite sévèrement.
«Pour quelque chose malheur est bon» : cet adage s'applique parfaitement au cas de Mohamed Benjeddi, qui n'a jamais imaginé que son infirmité sera son tremplin vers la notoriété et la gloire. Il l'a acceptée comme une fatalité, l'ignorait autant que faire se peut et se laissait absorber par l'école, se préparant à un avenir sans éclat. Mais le sort en a décidé autrement.
Alors qu'il jouait en toute insouciance avec des copains non loin de la maison parentale dans un quartier populaire de Jerada, Mohamed est approché par une personne dépêchée par son père qui lui demande de rentrer chez-lui en urgence. Il apprendra, une fois devant son père, que le directeur de l'école en personne l'a convoqué pour une raison mystérieuse. Il n'en fallut pas plus pour que le gamin panique, se préparant au mieux à un blâme sévère, au pire à une belle raclée.
Il s'avèra, en fin de compte, que le petit infirme était sollicité pour camper le premier rôle dans une pièce de théâtre du célèbre écrivain russe Maxim Gorki, rejouée au Maroc par une troupe française. Les organisateurs cherchaient un élève dont le profil correspondait au personnage, un enfant boiteux, et le directeur les a orientés sans hésitation vers Mohamed.
Pour sa première fois sur les planches, le gamin a assuré et avec brio. Il a pris cette première expérience théâtrale comme un défi personnel, une opportunité en or pour prouver, à lui-même avant les autres, que ni les barrières physiques, ni psychologiques ne sauraient entamer l'élan d'une âme intrépide et passionnée qui veut se dépasser, s'émanciper et s'épanouir par l'art et la création.
En montant sur les planches ce jour-là, Mohamed Benjeddi a en effet monté le premier échelon vers la gloire et l'accomplissement de soi. Se produire devant un public, jouer un personnage qui lui ressemble et s'y identifier, se sentir comme quelqu'un «tout à fait normal», apprécié et admiré de surcroît, a été pour lui une expérience enchanteresse voire une thérapie. Depuis, l'amour du théâtre ne l'a jamais quitté.Après des débuts plutôt difficiles, il a réussi à se faire un nom sur la scène artistique aux plans national et international, occupant au passage le poste de secrétaire général du conseil de la Fédération internationale du théâtre amateur, puis de vice-président et de membre permanent de cette même entité. A ce jour, il a écrit et réalisé des dizaines de pièces de théâtre, qui ont été jouées dans plusieurs pays du monde.
Le combat qu'il a dû livrer pour surmonter à la fois son handicap, le poids des stigmates sociaux et les difficultés que rencontre n'importe quel artiste en herbe - a fortiori s'il est handicapé- pour s'imposer et se faire connaître, a fait de lui une personne forte, «capable de déplacer des montagnes» et dotée en plus d'une sensibilité, d'une passion et d'un talent qui forcent l'admiration et l'estime, indique à la MAP son ami et confère, le dramaturge belge Alain Duval. «Je n'ai jamais senti que Mohamed était atteint d'une quelconque infirmité», assure-t-il.
«Qui pouvait croire un instant que cet enfant infirme allait un jour réaliser ce qui semblait impossible à tout le monde avec une seule jambe? C'est l'espoir, l'ambition et la détermination qui m'ont aidé à en arriver là», confie Mohamed Benjeddi à la MAP.
Malgré son succès à l'international, ce natif de Jerada a toujours préféré vivre loin des feux de la rampe et s'est fait un devoir de promouvoir la région de l'Oriental dans les milieux culturels européens, comme l'assure une de ses connaissances, l'universitaire et dramaturge Mustapah Ramdani.
Au service de cette noble cause, il a mis à profit ses relations dans le monde culturel et les manifestations théâtrales d'envergure qu'il organisait et dans lesquelles il rendait toujours hommage à sa terre natale et à la région où il a vu le jour. En la matière, la région de l'Oriental ne pouvait trouver meilleur ambassadeur, souligne M. Ramdani.
Homme de culture engagé et patriotique, Benjeddi a offert à plusieurs troupes nationales l'opportunité de se produire dans des festivals internationaux, de même qu'il a convaincu plusieurs troupes étrangères de participer à des manifestations organisées au Maroc.
«Benjeddi est un artiste qui travaille dans la discrétion et ne ménage aucun effort pour soutenir les événements théâtraux partout au Maroc», témoigne Brahim Demnati, un des fondateurs du Festival international du théâtre professionnel de Fès.
Ni la notoriété, ni les préoccupations professionnelles et quotidiennes n'ont pu éloigner cet artiste autodidacte de son pays et de sa ville natale. En prêtant son concours à l'organisation de festivals et d'activités théâtrales dans des localités enclavées de l'Oriental, il a grandement contribué à l'animation de la scène culturelle et artistique régionale.
Grand passionné de la littérature mondiale, il a adapté, rédigé et mis en scène plusieurs oeuvres en français et en anglais. Il a également collaboré avec le réalisateur portugais Carlos Caballero dans l'adaptation au théâtre de l'épopée de Oued Al Makhazen, une superproduction théâtrale à laquelle ont participé 106 acteurs et qui a été jouée dans plusieurs villes portugaises.
En 2014, Mohamed Benjeddi, qui a raconté des dizaines de vies et de destins au fil d'une carrière aussi foisonnante qu'originale, verra sa propre vie jouée sur les planches et campera son propre personnage dans une pièce de théâtre écrite par Françoise Olivier. L'intitulé de cette oeuvre, qui retrace son parcours atypique dans la vie et le théâtre, est on ne peut plus expressif: «L'Homme qui vivait debout».
Benjeddi a été encensé par la critique et le public français pour sa prestation aussi grandiose qu'émouvante dans ce «biopic» décrivant le combat quotidien livré par un homme qui vivait debout, fier, digne et alerte, sans jamais plier l'échine.
Ce que cette pièce de théâtre n'a pas révélé, c'est que Benjeddi, après ce parcours du combattant dans lequel il s'est investi corps et âme, venant à bout des plus lancinants des obstacles, n'a pas pu vaincre la maladie qui s'est emparée de lui vers la soixantaine. Une maladie aiguë a alité «L'Homme qui vivait debout».
Face au poids physique, psychique et matériel de cette épreuve, le baroudeur des planches ne baisse pas les bras. Stoïcisme, ténacité et amour de la vie - traits marquants de sa personnalité-, sont ses seules armes dans le nouveau combat qu'il mène. Même avec une seule jambe et un corps miné par la maladie, l'artiste n'est pas prêt à prendre sa retraite, ni de l'art ni de la vie.


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