Mohamed Jadri : "Si elle se maintient, cette croissance pourrait marquer une rupture avec les précédents taux"    Sahara : Pour freiner la dynamique marocaine, l'Algérie promet 1 MM $ aux pays africains    Syrie : Un parti appelle le président Al-Charaa à désigner le Polisario une organisation terroriste.    Aéronautique : les exportations augmentent de 10,5% à fin mai    Hammouchi reçoit le chef du service des renseignements de l'Etat des Emirats Arabes Unis    Démarrage des premières Assises nationales de l'intelligence artificielle à Rabat    Rugby : Les Lions de l'Atlas visent la CAN et le Mondial 2027    AMFS 2025 : les Marines américains réaffirment la place centrale du Maroc en Afrique    La Bourse de Casablanca clôture dans le vert    Premières Assises de l'IA au Maroc : vers une souveraineté technologique affirmée    Afrique : Maroc, Mauritanie, Sénégal et Gambie lancent une alliance parlementaire sans l'Algérie    Algérie : Boualem Sansal condamné à cinq ans de prison pour ses déclarations sur l'héritage colonial    Contrats, mendicité et vie privée : le ministre de la Justice précise sa position    Coupe du monde des clubs : Bounou héroïque, élimine City et qualifie Al Hilal en quarts    «Born Winners», le slogan de la CAN 2024 féminine de football    Handball : Cinq joueurs de l'équipe du Maroc fuient lors des compétitions en Pologne    Azilal: Le feu de forêt maitrisé après l'intervention des Canadairs    Formación en IA clave para el crecimiento sostenible y la competitividad en Marruecos    Premios CX 2025: Intelcia galardonada por su proyecto de IA al servicio de las ventas y la experiencia del cliente    China: La Universidad de Tsinghua lanza su primera beca para estudiantes marroquíes y árabes    Fiasco Mawazine : Sherine menace de poursuites judiciaires pour atteinte à son honneur    CDM 25 : Fluminense file en quart de finale !    Moyen-Orient : Israël cherche à imposer une nouvelle réalité géographique en Syrie    Le Maroc aspire à attirer 1 million de touristes Chinois à l'horizon 2030 (ONMT)    Batteries lithium-ion : Tianci Materials installe sa production au Maroc pour conquérir l'Europe    Gestion fiscale : Benchmark, analyse d'impact, audit... le modèle marocain est-il efficace ?    Dakhla : Un élément des Forces auxiliaires poursuivi dans une affaire de harcèlement et d'extorsion    Pénurie de plus de 600 médicaments : La Fédération des droits du consommateur tire la sonnette d'alarme    Concours des grandes écoles : Faute d'orientation, ruée massive vers les Centres de préparation    Palestine : Les malades palestiniens condamnés à une mort certaine    « Ce qu'il faut savoir sur les liens de Zohran Mamdani avec le groupe anti-Israël Democratic Socialists of America »    Le Pakistan arrête un trafiquant impliqué dans le naufrage au large du Maroc survenu en début d'année    Bâtir une coopération mondiale axée sur la paix, le développement et la communauté d'intérêts    Cinq ans de prison pour l'écrivain Boualem Sansal... Un symbole vivant qui dénonce la dictature du régime algérien ?    "Dbibina" rentre dans la tête de Jerando et voilà ce qu'il y trouve    Mehdi Hijaouy au cœur d'un réseau d'extorsion de plusieurs millions de dirhams, dévoilent les investigations en cours    Madrid enterre une motion sécuritaire sur Sebta et Melilla    Marrakech inaugure l'année de la jeunesse du monde islamique    Yassine Bounou renverse Manchester City et file en quarts    Mondial des clubs : quatre Lions de l'Atlas en quarts, d'autres pourraient suivre    Trafic des biens culturels : Bensaid expose les mesures prises par le Maroc    L'Afghanistan participe au Forum sur la finance islamique au Maroc    Séville : Akhannouch prend part à la Conférence de l'ONU sur le financement du développement    Casablanca Music Week 2025: franc succès pour la première édition    Archéologie : le Maroc primé pour son passé pré-agricole    Mehdi Bensaïd dénonce le fléau du trafic culturel et appelle à une riposte concertée    UNESCO: Essaouira accueillera la Conférence des Villes créatives, une première africaine et arabe    Jazzablanca 2025 : L'édition qui fait vibrer tout Casablanca au son du jazz    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Mohamed Benjeddi, le baroudeur des planches qui a défié son handicap
Publié dans Albayane le 16 - 12 - 2015

Courir, grimper, jouer au football...tous ces gestes anodins par lesquels les enfants se font plaisir et vont à la découverte des objets, des êtres et du monde les entourant, ne faisaient plus partie du quotidien du dramaturge mondialement connu Mohamed Benjeddi depuis qu'il s'est retrouvé, un jour des années 50 du siècle dernier, incapable de bouger ses membres, alors qu'il était encore un gamin plein d'énergie et d'appétit de vivre.
Poignant et rebelle à tout traitement, le handicap semblait être le sort du petit Mohamed. Jusqu'au jour où son père a décidé, face à la détresse de son fils, de plier bagage pour aller s'installer à Sellaouite, un douar près de Debdou dans la région de l'Oriental connu pour son climat sain et idéal pour les malades. Comme par miracle, l'enfant infirme retrouva l'usage de ses membres, à l'exception de sa jambe gauche qui boite sévèrement.
«Pour quelque chose malheur est bon» : cet adage s'applique parfaitement au cas de Mohamed Benjeddi, qui n'a jamais imaginé que son infirmité sera son tremplin vers la notoriété et la gloire. Il l'a acceptée comme une fatalité, l'ignorait autant que faire se peut et se laissait absorber par l'école, se préparant à un avenir sans éclat. Mais le sort en a décidé autrement.
Alors qu'il jouait en toute insouciance avec des copains non loin de la maison parentale dans un quartier populaire de Jerada, Mohamed est approché par une personne dépêchée par son père qui lui demande de rentrer chez-lui en urgence. Il apprendra, une fois devant son père, que le directeur de l'école en personne l'a convoqué pour une raison mystérieuse. Il n'en fallut pas plus pour que le gamin panique, se préparant au mieux à un blâme sévère, au pire à une belle raclée.
Il s'avèra, en fin de compte, que le petit infirme était sollicité pour camper le premier rôle dans une pièce de théâtre du célèbre écrivain russe Maxim Gorki, rejouée au Maroc par une troupe française. Les organisateurs cherchaient un élève dont le profil correspondait au personnage, un enfant boiteux, et le directeur les a orientés sans hésitation vers Mohamed.
Pour sa première fois sur les planches, le gamin a assuré et avec brio. Il a pris cette première expérience théâtrale comme un défi personnel, une opportunité en or pour prouver, à lui-même avant les autres, que ni les barrières physiques, ni psychologiques ne sauraient entamer l'élan d'une âme intrépide et passionnée qui veut se dépasser, s'émanciper et s'épanouir par l'art et la création.
En montant sur les planches ce jour-là, Mohamed Benjeddi a en effet monté le premier échelon vers la gloire et l'accomplissement de soi. Se produire devant un public, jouer un personnage qui lui ressemble et s'y identifier, se sentir comme quelqu'un «tout à fait normal», apprécié et admiré de surcroît, a été pour lui une expérience enchanteresse voire une thérapie. Depuis, l'amour du théâtre ne l'a jamais quitté.Après des débuts plutôt difficiles, il a réussi à se faire un nom sur la scène artistique aux plans national et international, occupant au passage le poste de secrétaire général du conseil de la Fédération internationale du théâtre amateur, puis de vice-président et de membre permanent de cette même entité. A ce jour, il a écrit et réalisé des dizaines de pièces de théâtre, qui ont été jouées dans plusieurs pays du monde.
Le combat qu'il a dû livrer pour surmonter à la fois son handicap, le poids des stigmates sociaux et les difficultés que rencontre n'importe quel artiste en herbe - a fortiori s'il est handicapé- pour s'imposer et se faire connaître, a fait de lui une personne forte, «capable de déplacer des montagnes» et dotée en plus d'une sensibilité, d'une passion et d'un talent qui forcent l'admiration et l'estime, indique à la MAP son ami et confère, le dramaturge belge Alain Duval. «Je n'ai jamais senti que Mohamed était atteint d'une quelconque infirmité», assure-t-il.
«Qui pouvait croire un instant que cet enfant infirme allait un jour réaliser ce qui semblait impossible à tout le monde avec une seule jambe? C'est l'espoir, l'ambition et la détermination qui m'ont aidé à en arriver là», confie Mohamed Benjeddi à la MAP.
Malgré son succès à l'international, ce natif de Jerada a toujours préféré vivre loin des feux de la rampe et s'est fait un devoir de promouvoir la région de l'Oriental dans les milieux culturels européens, comme l'assure une de ses connaissances, l'universitaire et dramaturge Mustapah Ramdani.
Au service de cette noble cause, il a mis à profit ses relations dans le monde culturel et les manifestations théâtrales d'envergure qu'il organisait et dans lesquelles il rendait toujours hommage à sa terre natale et à la région où il a vu le jour. En la matière, la région de l'Oriental ne pouvait trouver meilleur ambassadeur, souligne M. Ramdani.
Homme de culture engagé et patriotique, Benjeddi a offert à plusieurs troupes nationales l'opportunité de se produire dans des festivals internationaux, de même qu'il a convaincu plusieurs troupes étrangères de participer à des manifestations organisées au Maroc.
«Benjeddi est un artiste qui travaille dans la discrétion et ne ménage aucun effort pour soutenir les événements théâtraux partout au Maroc», témoigne Brahim Demnati, un des fondateurs du Festival international du théâtre professionnel de Fès.
Ni la notoriété, ni les préoccupations professionnelles et quotidiennes n'ont pu éloigner cet artiste autodidacte de son pays et de sa ville natale. En prêtant son concours à l'organisation de festivals et d'activités théâtrales dans des localités enclavées de l'Oriental, il a grandement contribué à l'animation de la scène culturelle et artistique régionale.
Grand passionné de la littérature mondiale, il a adapté, rédigé et mis en scène plusieurs oeuvres en français et en anglais. Il a également collaboré avec le réalisateur portugais Carlos Caballero dans l'adaptation au théâtre de l'épopée de Oued Al Makhazen, une superproduction théâtrale à laquelle ont participé 106 acteurs et qui a été jouée dans plusieurs villes portugaises.
En 2014, Mohamed Benjeddi, qui a raconté des dizaines de vies et de destins au fil d'une carrière aussi foisonnante qu'originale, verra sa propre vie jouée sur les planches et campera son propre personnage dans une pièce de théâtre écrite par Françoise Olivier. L'intitulé de cette oeuvre, qui retrace son parcours atypique dans la vie et le théâtre, est on ne peut plus expressif: «L'Homme qui vivait debout».
Benjeddi a été encensé par la critique et le public français pour sa prestation aussi grandiose qu'émouvante dans ce «biopic» décrivant le combat quotidien livré par un homme qui vivait debout, fier, digne et alerte, sans jamais plier l'échine.
Ce que cette pièce de théâtre n'a pas révélé, c'est que Benjeddi, après ce parcours du combattant dans lequel il s'est investi corps et âme, venant à bout des plus lancinants des obstacles, n'a pas pu vaincre la maladie qui s'est emparée de lui vers la soixantaine. Une maladie aiguë a alité «L'Homme qui vivait debout».
Face au poids physique, psychique et matériel de cette épreuve, le baroudeur des planches ne baisse pas les bras. Stoïcisme, ténacité et amour de la vie - traits marquants de sa personnalité-, sont ses seules armes dans le nouveau combat qu'il mène. Même avec une seule jambe et un corps miné par la maladie, l'artiste n'est pas prêt à prendre sa retraite, ni de l'art ni de la vie.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.