Cinquante ans de coopération médicale sino-marocaine ont permis de soigner 6,7 millions de patients    Hammouchi en visite de travail en Turquie    Akhannouch : la santé, priorité absolue du gouvernement    Bourse de Casablanca : une semaine dans le vert    Le Monde : Une mobilisation sécuritaire sans précédent en Algérie après la fuite de l'ex-chef du renseignement    Infantino visite le Grand Stade de Tanger    Le Maroc, troisième nationalité la plus représentée en Liga 2025/26    Interview avec Unielle Oupolo : La «diplomatie gastronomique» se met à table    Botola D1 / J2 : Victoire limpide du MAS à Agadir    Inclusion sociale : Tanger accueille le 2ème forum régional sur les droits des personnes âgées    La policía de Casablanca investiga un incidente entre un influencer y un taxista    Abdellatif Hammouchi leads Moroccan security delegation to Turkey for IGEF 2025    Diaspo #407 : Mohamed Boufarss, de Kelaat M'gouna à une carrière internationale inspirante    Un projet maroco-britannique met en lumière le patrimoine artisanal de Fès    Australie : objectif de réduction des émissions porté à 62-70% d'ici 2035    La CDT critique l'absence de la ronde de septembre du dialogue social et reproche au gouvernement son désengagement répété    CAN 2025: Le Maroc instaure un visa électronique pour huit pays    Renforcement du réseau électrique de la LGV Kénitra-Marrakech: Colas Rail retenu pour 157 MDH    Safi accueille une nouvelle unité industrielle de préfabrication portée par Ménara Préfa    CAN 2025 : Pas d'entrée au Maroc sans e-visa ! Tout savoir    Benguérir: L'UM6P lance la première Junior NBA League de Basketball au Maroc    Naoufal Bannis signe son retour en Eredivisie    Le Maroc et la Syrie scellent un mémorandum postal lors du 28e Congrès universel dubaïote    Le ministre des Affaires étrangères de Chine : Le Maroc a été pionnier dans le rapprochement avec nous... Pékin est prête pour un partenariat plus large et plus profond    La crise de discipline au sein de l'armée algérienne révèle la fragilité du régime militaire et son manque de cohésion interne    Akhannouch déterminé à mener à bien la réforme de la Santé    Rabat inaugure une chaire Unesco pour l'égalité des genres dans l'éducation et l'emploi scientifiques    Le Mali met le régime militaire algérien sur le banc des accusés devant la Cour internationale de justice    Alerte maximale en Algérie et dispositif sécuritaire massif déployé après la disparition de l'ancien chef du renseignement intérieur    Cinéma : voici les jurys du 30e Festival de cinéma méditerranéen de Tétouan    Festival : le 23e L'Boulevard bat son plein    Bonus INTGVIEW. Mohamed Saâd Berrada: «Tout a été mis en place pour une rentrée scolaire réussie»    Deloitte fait de Casablanca un bastion de cybersécurité    Com' et RP: La SMIT renouvelle sa confiance à Weber Shandwick    Glovo Maroc, la mainmise allemande se précise    Maroc–USA : Une relation stratégique appelée à un nouveau souffle    Agadir: FRANKIVEL ART, l'upcycling en pleine lumière à La Passerelle des Arts    À Xi'an, M. Amara, président de l'UCESA, appelle à un partenariat sino-africain plus renforcé, mutuellement bénéfique et porteur de prospérité    La police de Casablanca enquête sur un incident entre un influenceur et un chauffeur de taxi    Hicham Jerando diffuse une archive de 2016 pour attiser la polémique autour d'un hôpital de Tiznit    Le groupe britannique Idox ouvre son premier centre régional de données au Maroc et accroît la souveraineté numérique des grands projets nationaux d'infrastructure    Maroc-Mexique: Les opportunités de partenariat mises en avant à Mexico    Le Brésil sera doté de la première centrale thermique à éthanol à grande échelle au monde    Mondial U20 : Mohamed Ouahbi confiant malgré un groupe de fer    Le CIJ confirme la plainte malienne contre l'Algérie après la destruction d'un drone et Alger dénonce une démarche «paradoxale»    TV5MONDE consacre une soirée spéciale «destination francophonie au Maroc»    Institut Français d'El Jadida : Alionor Vallet, Une vision ouverte et innovante !    La Fête du cinéma 2025 : Près de 60 000 spectateurs au rendez-vous dans tout le Maroc    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



La cinéphilie de Minuit
Publié dans Albayane le 10 - 09 - 2017

Durant les festivités célébrant le cinéma africain chaque année, un événement d'une ampleur considérable et d'un impact sans commune mesure vient illuminer et distinguer les cieux cinématographiques de la ville de Khouribga. Il s'agit des séances de cinéphilie et des débats de minuit qui s'étendent jusqu'au petit matin à la grande satisfaction des cinéphiles, des cinéphages et des omnivores culturels.
Après les douze coups de minuit, d'étranges événements ont lieu de par le monde : les loups-garous qui sévissent, Cendrillon qui retrouve son état normal, certaines salles de cinéma qui déversent leurs spectateurs, d'autres (les salles de Midnightmovie) qui projettent des nanars à des spectateurs inconscients... Mais à Khouribga, concomitamment au festival du film africain, et à la différence de l'ensemble des autres grands festivals du Maroc, un essaim de vaillants cinéphiles et «d'omnivores culturels» s'apprêtent à savourer les délices de la fraicheur nocturne/matinale de Khouribga en compagnie de quelques perles rares du patrimoine cinématographique mondial, africain ou marocain ; ou autour d'un débat savoureux portant sur des questions et problématiques de grande teneur. Rituel bien ancré dans les mœurs des festivaliers où la magie se confond avec l'image et où la chrysalide culturelle se métamorphose en photogrammes nomades ! Rituel où la symphonie du djembé, de la kora, du shékéré, du kalimba entre en parfaite osmose avec le concert des krakech, du luth, du guenbri, du qanoun...C'est à minuit que la cinéphilie déploie son manteau magique sur l'écran multicolore de nos nuits blanches!
Les rendez-vous de la cinéphilie de Minuit de Khouribga sont devenus un lieu incontournable, une célébration cérémonielle, pour les cinéphiles participant au festival ou non. Lieu où l'image rare et précieuse déploie toute sa souveraine démesure et où la parole libre prend son envol majestueux. Adieu Morphée ! Vivent les 9 muses de l'art ! Adieu Léthé ! Vivent les griots et les conteurs de la mémoire de demain!
C'est que les films et les débats de minuit à Khouribga ont un goût particulier. Le goût d'une cinéphilie qui oscille entre la fin d'une journée et le commencement d'une autre, qui surfe entre la perception soporifique et onirique et la perception de l'éveil matinal, et qui titille les paroles politiquement correctes et incorrectes.
Ce sont à proprement parler ces moments d'hésitation, d'ambigüité sémantique et de polysémie qui trônent à la source du sentiment artistique. C'est cet entre-deux délicieusement flou qui nous place au centre de la tectonique artistique et qui nous fait surfer sur les vagues des rencontres interculturelles. Les écrans blancs de Khouribga regorgent de juteuses harmonies polychromes, de baobabs qui s'enracinent dans l'universel, d'œuvres ouvertes sur l'infini et de quêtes inachevées...
C'est sans doute la conscience de notre finitude et de l'inachèvement de nos œuvres qui nous rend meilleurs !
La cinéphilie, qu'elle soit dilettante ou omnivore, est le plat des gourmets du cinéma. C'est notre bien immatériel qui prolonge et enrichit notre patrimoine oral africain. En demandant mille excuses à A. Hampatéba, auteur de la fameuse «Un vieillard qui meurt, c'est une bibliothèque qui brûle», je dirais aujourd'hui : un film qui n'est pas vu, c'est une cinémathèque africaine qui ne sera jamais construite ! La cinéphilie, en tant que patrimoine immatériel, est l'humus du cinéma de demain, le vent qui dissémine les pollens de l'intelligence, le ferment qui permet d'«élargir le cercle des connaisseurs». (B.Brecht)
Les séances de minuit sont à vrai dire des moments où s'installent des transitions multiples et diverses : transition de la nuit et du jour, transition artistique, transition des idées, transition intergénérationnelle, transition géographique, transition entre tradition et modernité, transition entre élite et peuple, transition entre les volcans de la subjectivité et les lacs de l'objectivité, etc. Transitions qui se muent vite en transmissions, legs et générosités sans frontières!
Si les journées chaudes de Khouribga se déroulent avec des films imposés, compétition et diplomatie obligent, les nuits de la cinéphilie sont ponctués et agrémentés par des films et des débats savamment choisis et délicatement appréciés. Films dont le scintillement illumine et ouvre le ciel noir de Khouribga. Films dont les résonances et le magnétisme se propagent au-delà des frontières du Maroc et de l'Afrique.
Une véritable et élégante invitation au voyage. Voyage vers des altérités salvatrices qui nourrissent notre identité castratrice. Voyage dans les rhizomes de la culture africaine ! Sur la terre de l'Homo Sapiens, des milliers d'Homo Cinematograficus africains, promesses de créativité et d'humanisme, sont en train d'éclore et de prendre leur envol magique.
Le jour pour explorer les films récents, la nuit pour explorer les souterrains de la création et pour sonder la mémoire artistique et cinéphilique du monde.
Savourer un film à minuit à Khouribga, confluent des cultures africaines, arabes et mondiales, vaut les mille et un films du quotidien. Saveur dont on ne sort pas indemne et dont on ne guérit jamais. La cinéphilie est un mal étrange qui s'attrape ad vitam aeternam!
Quoi de plus beaux que cette poésie onirique de 3h du matin, que cette fantaisie nocturne sans commune mesure où les films du patrimoine se savourent comme la madeleine de Proust, où les découvertes filmiques se dégustent comme des fruits exotiques, et où les idées se partagent comme des vents qui ensemencent les terres arides mais riches de promesses culturelles.
Du Guépard de Visconti à Victoria de S. Schipper, en passant par des documentaires savoureux (Sembene Ousmane, Ahmed Bouanani, Nostalgie de la lumière...) et des cycles originaux, les séances de minuit sont des moments privilégiés pour la découverte ou la redécouverte des films cultes du patrimoine mondial ou africain, des instants de quête d'exigence et de sublime qui n'hésitent pas à mettre le curseur aussi haut que possible aux niveaux technique, artistique, symbolique et culturelle.
Les films et les débats de minuit ont pour vocation, non seulement la rétrospective de ce qui existe de meilleur, mais aussi la préparation prospective pour un cinéma africain aux dimensions humaines et artistiques, pour un cinéma qui touche les cœurs et non pas les poches, pour un cinéma qui dure malgré les séductions de l'amnésie et malgré les tentations de l'obsolescence.
La cinéphilie de minuit à Khouribga est certainement un hymne à la diversité, à la suprématie de l'Art, à la profondeur humaine, à la vérité de la beauté. Elle est surtout un acte de résistance face à la machine de la médiocrité qui uniformise et lamine tout, face aux méga-récits sans profondeur humaine. Elle est surtout un appel à des lendemains enchanteurs pour notre cinéma et pour nos arts africains.
Après les veillées cinématographiques,... le chant du coq et la brise matinale nous invitent à un sommeil apaisant et riche de rêves. Rêves de cinéphilie solaire. Rêves de cinéphilie généreusement fertile et délicatement irisée. Rêves de diversité prometteuse!
Youssef Ait hammou


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.