Maghreb : Un accord Maroc-Algérie négocié par les Etats-Unis redéfinirait la coopération    Le rôle clé de la France dans l'adoption de la résolution de l'ONU sur le Sahara    Maroc : 16,6 millions de touristes (+14%) en dix mois    Morocco nears early completion of Tit Mellil–Berrechid highway and key Casablanca interchanges    La CAF y SuperSport anuncian un acuerdo de transmisión para la CAN Marruecos 2025    CAN 2025: Walid Regragui promete «el mejor protocolo posible para que Achraf Hakimi regrese al 100%»    Espagne : Inauguration d'une exposition photographique dédiée à la Mache verte à Tarragone    Walid Regragui : « On va mettre en place le meilleur protocole possible pour qu'Achraf revienne à 100 pc contre les Comores »    Décès du militant Sion Assidon après trois mois au coma    Kanye West cherche la rédemption auprès du rabbin marocain Yoshiyahu Pinto    L'humeur : Quand il fait nuit, Essaouira luit    La Bourse de Casablanca bascule dans le rouge à la clôture    Le régime algérien propage des mensonges... La vérité : 100 % des besoins du Maroc en gaz proviennent des Etats-Unis, de la Norvège, du Nigeria et de l'Arabie saoudite    Le Parti du Front national du Botswana soutient l'initiative marocaine d'autonomie au Sahara    France : Nicolas Sarkozy plaide lundi pour sa mise en liberté    Washington et ses alliés parient sur une "nouvelle Syrie"    Catastrophes: la FICR veut doubler son fonds d'urgence humanitaire d'ici 2030    Seghrouchni : 52% des effectifs du ministère sont des femmes    Le come-back de Romain Saïss : atout d'expérience ou poids du passé ?    Le Maroc, invité d'honneur de la Fieracavalli 2025 à Vérone    CAN 2025 : Walid Regragui rassure, Achraf Hakimi sera bien présent !    Plateformes numériques : vers une réforme adaptée à l'ère digitale    Lekjaa: Le programme d'aide sociale directe a atteint plus de 44 milliards de dirhams    La Chine trace les contours de son avenir : le 15e plan quinquennal vers une modernisation intégrale    Universités publiques : signature des contrats de développement 2025/27    Le Royaume du Maroc brillamment élu au Conseil Exécutif de l'UNESCO pour le mandat 2025-2029    Le Maroc entre dans l'ère de la vitesse ultra-rapide : Maroc Telecom lance officiellement la 5G dans plusieurs grandes villes    La Kabylie devant l'Histoire : le jour décisif pour la liberté, la souveraineté et l'indépendance    Rabat : le MMVI célèbre les 50 ans de la Marche Verte à travers une exposition hommage    Jeux de la solidarité islamique (futsal) : Large victoire du Maroc face au Tadjikistan    Fierté du LOSC, Hamza Igamane élu « Dogue du mois d'octobre »    FRMF: Le coach national annonce aujourd'hui sa liste pour Maroc-Mozambique et Maroc-Tanzanie et Maroc-Ouganda    La ville espagnole de Saragosse atteint 727 475 habitants dont 8 095 Marocains selon le recensement municipal d'octobre    Maroc : Un Israélien au passé criminel arrêté après une tentative d'entrée irrégulière    Campagne antidrogue au Venezuela : Le USS Gerald R. Ford en veille stratégique au large du Maroc    Maroc Telecom adopte un nouveau logo rouge pour entrer dans l'ère numérique    5G network officially launched in Morocco by Orange, inwi, and Maroc Telecom    Abdellatif Hammouchi accorde une promotion posthume à un officier de police principal tombé en service à Salé    Augusto Gomes: « Le financement de la santé n'est pas une dépense, c'est un investissement »    «Finternet». Le Ghana entre dans une nouvelle ère numérique    Le groupe chinois Boway Alloy annonce un investissement de 150 millions de dollars au Maroc pour une usine de matériaux électroniques avancés    Paul Biya prête serment devant la Nation camerounaise    Maroc : Rabat accueille les CAF Awards 2025 le 19 novembre    Dakar Gorée Jazz Festival : une décennie de musique    Découverte de vestiges romains près de Volubilis par une mission maroco-polonaise    L'UM6SS de Rabat, un pôle académique d'excellence pour un personnel de la santé hautement qualifié    50 Projets qui ont changé le Sahara (4/5)    New York, tu m'étonneras toujours!    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Le lieu de soi: Un roman qui fait parler le silence
Publié dans Albayane le 13 - 09 - 2020

M'hammed Mellouki, Le lieu de soi. Rabat : Editions Marsam, 2019
Par Tijania Fertat
L'enfant assiégé
Dans L'enfant assiégé, la première partie du roman concernée par cette note critique, Fadi le narrateur qui n'est autre que l'auteur lui-même mène une quête pour trouver un apaisement à son âme tourmentée.
Fadi est un homme qui a réussi sur le plan social et professionnel, mais souffre d'un mal-être qui l'empêche de goûter aux joies de la vie. Il avait trouvé vingt ans plus tôt refuge au Canada croyant pouvoir se défaire de son passé gros de souffrance. En vain. Il décide donc de faire un retour au Maroc, son pays d'origine, dans l'espoir de trouver une explication à «des tonnes de souvenirs acides, de pensées négatives, de sentiments corrosifs...» qu'il traîne en lui depuis son plus jeune âge.
Au long des péripéties de ce voyage, l'auteur nous livre une fine analyse d'une société où se côtoient tradition et modernité, religion et obscurantisme, pauvreté et analphabétisme, un pays où pendant que la majorité des citoyens souffre l'injustice, la faim et la maladie, une petite minorité se la coule douce peu soucieuse de l'infamie qui frappe les plus démunis, un système politique qui réprime la liberté d'opinion et craint le pouvoir de la raison.
Dans cette quête rien n'est laissé au hasard. Les moindres détails, les souvenirs les plus infimes, les personnes que Fadi a connues, aimées ou détestées, les lieux qu'il a fréquentés, le monde onirique avec ses symboles, son hermétisme, tout est analysé et prend un sens une fois placé dans le puzzle d'une vie meurtrie par la violence sous ses formes les plus dégradantes et par le déni. Il s'évertue à tout passer sous l'œil vigilant et savant de Fadi l'adulte qui possède les outils intellectuels lui permettant de se saisir de «La nature du venin qui lui empoisonne la vie».
Dans cette recherche minutieuse, Fadi nous plonge dans une autre réalité souterraine dont personne ne parle. Celle qu'on blanchit en gardant le silence, fermant les yeux ou détournant le regard. Il nous entraîne dans le monde terrifiant dans lequel vivent des enfants soumis à la brutalité et à la perversion des hommes. Deux éléments constituent la trame de fond des deux parties du roman.
Fadi ne se rappelle pas un jour de son enfance où il n'a pas été battu par son père. «Un dressage» à l'obéissance qui laisse ses traces sur le corps et sur l'âme. Une peur permanente qui s'incruste dans son cœur, ligote sa parole et marque à jamais sa personnalité. Malgré la haine qu'il voue à son père, Fadi a réalisé le «désir» obsessionnel de ce dernier qui voulait coûte que coûte que son fils fasse des études et accomplisse son rêve. Chose inimaginable pour un enfant qui a vécu la misère extrême.
De ce père Fadi retiendra l'image d'un tyran aux idées arrêtées. Il est vrai que comme le dit Jean d'Ormesson, «il y a quelque chose de plus fort que la mort, c'est la présence des absents dans la mémoire des présents». Fadi ne se souvient pas de son père, il est hanté par lui. Notre mémoire sélectionne les bons souvenirs qui nous rappellent nos morts. Dans le cas de Fadi, le père vit en lui et le persécute même dans ses rêves. Le père est lié dans ses souvenirs à cette main qui s'abat sur lui, au solide rameau d'olivier, à une corde mouillée ou tout autre objet qui pouvait servir à punir un enfant sans défense.
Frapper un enfant pour le corriger faisait partie de la vision que les anciens avaient de l'éducation. Ne dit-on pas que le bâton est sorti du paradis? Mais un père qui n'a pas vu ou su deviner la détresse de son fils ni essuyer ses larmes d'enfant écorché vif, dépasse tout entendement.
Fadi a connu l'expérience la plus scandaleuse qui puisse arriver à un enfant: des abus sexuels répétés perpétrés par le fkih et les élèves plus âgés de l'école coranique et même en famille par un cousin. Parce qu'illicite, renvoyant à la dépravation de l'agresseur tout en qualifiant l'humiliation que subit la victime, l'acte pédophile est relégué au domine du secret et du honteux.
Une autre forme de pédophilie institutionnalisée révolte l'auteur. Celle que subissent Fadéla sa sœur et Chama sa tante mariées très jeunes à des hommes beaucoup plus âgés qu'elles. Des fillettes qui ne savaient rien de l'institution maritale et n'avaient aucune idée des attentes des hommes à leur endroit. Des fillettes qui durent faire un passage brutal et traumatisant à la vie d'adulte. Elles se refusèrent autant qu'elles purent mais finirent par capituler devant les assauts nocturnes, les coups et les chantages orchestrés.
Le roman de Mellouki est une œuvre grave et bouleversante où s'alternent les moments de grande violence et les éclaircies d'une infinie tendresse. Le lecteur y est tenu en haleine du début à la fin. Avec des mots justes et forts l'auteur nous donne accès à ses secrets les plus intimes et laisse s'exprimer des émotions qu'on n'envisage même pas d'avouer à soi-même. L'enfant assiégé étale au grand jour des crimes rarement punis auxquels sont exposés des enfants sans défense au Maroc.
L'âme de Fadi se trouve-elle apaisée à ce stade de sa quête ? L'histoire se poursuit dans Le chant de la huppe.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.