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Président à part, sera-t-il aussi un ex-président à part ?
Publié dans Albayane le 19 - 01 - 2021

rêvait de «quatre années incroyables de plus à la Maison Blanche». Il la quitte aigri, incroyablement seul, et lâché par une grande partie de son camp après l'infamie d'un nouvel «impeachment» lié à l'assaut de ses partisans contre le Capitole, qui ternira à jamais son mandat.
A la fois révélateur et amplificateur des fractures de l'Amérique, celui qui jetait amusé dans la foule ses casquettes rouges Make America Great Again laisse derrière lui un pays meurtri, en plein doute et rongé par la colère.
Un pays dont l'image dans le monde est durablement abimée, loin, très loin de « la ville qui brille sur la colline », selon la célèbre formule de Ronald Reagan, icône du camp républicain.
Transgressions, provocations et propos moqueurs à l'appui, l'ancien homme d'affaires de 74 ans a écrit, grâce en particulier à son compte Twitter dont il été privé dans la dernière ligne droite, un chapitre en tous points inédit de l'histoire des Etats-Unis.
Pendant quatre ans, les Américains ont assisté – enthousiastes, médusés ou effrayés – au spectacle d'un président ne s'imposant aucune contrainte, s'affranchissant de toutes les normes.
Ironie pour un homme obsédé par les chiffres d'audiences et qui divise le monde en « winners » et « losers », il restera, contrairement à ses trois prédécesseurs directs (Barack Obama, George W. Bush et Bill Clinton), le président d'un seul mandat.
Un mandat qui a exposé la vulnérabilité mais aussi la résilience de la démocratie américaine face à un dirigeant refusant de reconnaître le verdict des urnes et agitant des théories du complot en guise d'arguments juridique.
Les images de ses sympathisants déchaînés dans le temple de la démocratie américaine, brandissant drapeaux Trump et drapeaux confédérés et laissant sur les murs des graffitis appelant à tuer les journalistes resteront une tâche indélébile sur son passage à la Maison Blanche.
«Donald Trump est l'homme le plus dangereux ayant jamais occupé le Bureau ovale», lâchera l'élu démocrate Joaquin Castro lors des débats sur sa mise en accusation.
Le 45e président de l'histoire a, de fait, testé les limites des institutions démocratiques, poussant certains à évoquer un véritable coup d'Etat.
La diplomate Fiona Hill, qui fit un temps partie de son équipe de sécurité nationale a évoqué, d'une formule ciselée, une tentative d »auto-coup », menée « au ralenti » et « en pleine lumière ».
L'armée, la justice, les élus locaux, les médias ont joué leur rôle, servi de remparts. « La bonne nouvelle pour les Etats-Unis est que l'auto-coup de Trump a échoué. La mauvaise est que ses partisans crient toujours au Grand Mensonge selon lequel il a remporté l'élection », a-t-elle résumé.
Arrivé au pouvoir en créant la plus grande surprise de l'histoire politique moderne, il a su parler à une Amérique qui se sentait « oubliée » mais a systématiquement refusé d'endosser les habits de rassembleur.
Plus que toute autre séquence dans sa présidence, la pandémie de Covid-19 – qui a fait près de 400.000 morts aux Etats-Unis – a mis en lumière cette posture.
Donald Trump a ironisé sur le port du masque, y voyant une manifestation du « politiquement correct » qu'il a brocardé en toutes occasions.
Il a attaqué Anthony Fauci, immunologue le plus respecté du pays, qui a, avant lui, travaillé avec cinq autres présidents américains et qui fut, inlassablement, la voix de la raison scientifique.
Il a minimisé la menace sanitaire en se présentant en « Superman » après avoir lui-même été testé positif, passant à côté de l'occasion qui lui était offerte, après son hospitalisation, de faire preuve d'empathie.
L'effondrement économique annoncé par certains le 8 novembre 2016, jour de son élection coup de tonnerre, n'a pas eu lieu. Nombre d'indicateurs – chiffres de l'emploi en tête – ont longtemps été au beau fixe avant l'impact ravageur du coronavirus.
Mais dans un mandat saturé de scandales, qui contraste singulièrement avec ceux de Barack Obama, le septuagénaire à la longue cravate rouge a abîmé la fonction, attaqué juges, élus et fonctionnaires, et alimenté les tensions raciales.
Au-delà de ses frontières, il a rudoyé les alliés des Etats-Unis, fait preuve d'une troublante fascination pour les dirigeants autoritaires, de Vladimir Poutine à Kim Jong Un, et donné un brutal coup de frein à la mobilisation sur le climat.
Joueur, hâbleur, visage triomphant d'un populisme décomplexé, celui qui, selon la formule assassine de l'écrivain Philip Roth, utilise « un vocabulaire de 77 mots », a fait perdre le sens de la mesure à ses admirateurs comme à ses détracteurs.
«Le show c'est +Trump+ et il se joue partout à guichets fermés. Je m'amuse en le faisant et je continuerai à m'amuser.»
La phrase, extraite d'un entretien que le magnat de l'immobilier avait accordé au magazine Playboy en 1990, pourrait avoir été prononcée hier. Et s'appliquer à chacune de ses journées à la tête la première puissance mondiale.
Doté d'un vrai talent de tribun qui a fait merveille sur les estrades de campagne, le milliardaire à l'intrigante chevelure blonde a réussi la prouesse de se positionner en porte-parole de l'Amérique des « oubliés » et des « pitoyables », selon l'expression méprisante de sa rivale démocrate de 2016 Hillary Clinton.
Démontrant un réel flair politique, il a su capter les angoisses d'une Amérique – majoritairement blanche, plutôt âgée – qui se sentait dédaignée par les « élites » de la côte Est et les stars d'Hollywood sur la côte Ouest.
Ce grand consommateur de hamburgers et de Diet Coke, qui s'était fait une solide place dans les foyers américains grâce à l'émission de télé-réalité « The Apprentice », a appliqué sans relâche une règle simple: occuper l'espace, à n'importe quel prix.
Mépris de la science, approximations, contre-vérités: ses déclarations ont contraint l'équipe de « fact-checkers » du Washington Post à créer une nouvelle catégorie: « Le Pinocchio sans fond », pour les affirmations erronées ou trompeuses répétées plus de 20 fois.
Depuis la célèbre « West Wing » de la Maison Blanche, l'ancien homme d'affaires a, en toutes occasions, creusé le fossé entre deux Amériques, la rouge (républicaine) et la bleue (démocrate).
Loin d'en appeler comme Abraham Lincoln en 1861 à « la part de lumière en chacun de nous », il a inlassablement joué sur les peurs.
En agitant, dès l'annonce de sa candidature en 2015, le spectre des migrants clandestins « violeurs ».
Et se posant, durant la campagne de 2020, comme seul garant de « la loi et l'ordre » face à une « gauche radicale » déterminée, à l'en croire, à faire des Etats-Unis « un Venezuela à grande échelle ».
Dans un pays pourtant friand de moments – même éphémères – d'unité nationale, il n'a que très rarement su ou voulu trouver le ton pour panser les plaies, même après une catastrophe naturelle ou une fusillade sanglante.
Il s'est servi de ses violentes attaques contre les médias – qualifiés de « malhonnêtes », « corrompus » et « ennemis du peuple » – pour braquer encore un peu plus une partie du pays contre l'autre.
Fait remarquable: l'ex-propriétaire des concours Miss Univers est le seul président de l'Histoire dont la cote de popularité n'a jamais atteint la barre des 50% au cours de son mandat.
Ses opposants comme ses soutiens sont d'accord sur un point: Donald Trump a, de fait, tenu une partie de ses promesses de campagne.
Comme il l'avait annoncé, il a jeté aux orties nombre de traités ou pactes âprement négociés, au premier rang desquels l'accord de Paris sur le climat, conclu par la quasi-totalité des pays de la planète pour tenter de limiter le redoutable emballement de la machine climatique.
Mais cette fidélité aux engagements de campagne s'est d'abord faite dans la déconstruction et la démolition.
Sur ses initiatives, le bilan est plus maigre. C'est frappant sur le dossier nucléaire iranien: il a déchiré l'accord durement négocié par son prédécesseur, a fait monter la pression sur Téhéran jusqu'à l'élimination du puissant général iranien Qassem Soleimani, mais n'a jamais présenté de véritable stratégie.
Le grand plan de paix au Proche-Orient, confié à Jared Kushner, gendre et conseiller paré de toutes les qualités, n'a jamais abouti.
La mort, en octobre 2019, du chef du groupe jihadiste Etat islamique (EI) Abou Bakr al-Baghdadi lors d'une opération américaine en Syrie, restera, à son actif, incontestablement comme un moment fort de sa présidence.
Sa plus grande audace, son plus grand coup, pour lequel il s'était pris à rêver à voix haute de Nobel de la paix, n'a pas eu le retour sur investissement escompté.
Les deux sommets avec le dirigeant nord-coréen Kim Jong Un, les embrassades et la complicité affichée lors d'une visite historique sur la zone démilitarisée, l' »alchimie », les lettres « magnifiques »: l'effort fut vain. Le régime n'a pas bougé sur la question centrale de la dénucléarisation.
Dans la géopolitique complexe et mouvante du XXIe siècle, Donald Trump a personnellement pris pour cible Justin Trudeau, Emmanuel Macron, Angela Merkel et Theresa May.
La mise en garde la plus cinglante n'est pas venue de ses adversaires politiques mais de Jim Mattis, chef du Pentagone. Dans sa lettre de démission, ce général rappelait, à l'adresse du président des Etats-Unis, une règle simple de la diplomatie: « Traiter les alliés avec respect ».
Dans un scénario politique inédit qu'aucun conservateur n'avait prédit, Donald Trump a, fort de sa capacité à électriser sa base électorale, mis à sa botte le parti républicain, qui l'avait au départ sous-estimé, voire ignoré.
Ponctuellement, des élus du « Grand Old Party » ont exprimé leur désaccord. Sur son attitude extraordinairement conciliante vis-à-vis de Vladimir Poutine à Helsinki, sa réaction après le meurtre du journaliste Jamal Khashoggi par des agents saoudiens, ou encore ses propos sur « des gens très bien » des deux côtés après des affrontements entre anti-racistes et néo-nazis à Charlottesville.
Mais, jusqu'aux violences du Capitole le 6 janvier 2021, ils ont fait bloc. Au grand dam de quelques voix dissidentes, comme celle de l'ancien sénateur John McCain, qui, avant sa mort en août 2018, avait mis en garde contre la tentation d'un « nationalisme bancal et fallacieux ».
Donald Trump aura toujours fonctionné selon un principe simple: pour ou contre lui, sans nuances.
L'ex-patron du FBI, James Comey, brutalement limogé, a évoqué dans ses mémoires un président qui soumet son entourage à un code de loyauté lui rappelant l'attitude des chefs mafieux observée au début de sa carrière de procureur.
Né dans le Queens, à New York, éduqué dans une école militaire, Donald J. Trump a rejoint l'entreprise familiale après des études de commerce.
Grâce a une exemption médicale qui a suscité beaucoup d'interrogations, il a échappé à la guerre du Vietnam.
Contrairement à la légende qu'il s'est construite, il n'a rien du « self-made man ». Après la Seconde Guerre mondiale, son père, Fred Trump, descendant d'un immigré allemand, avait déjà bâti un empire à New York en construisant des immeubles pour la classe moyenne dans les quartiers populaires.
Donald Trump a repris les rênes de l'entreprise dans les années 70 avec un solide coup de pouce financier de son père, « un tout petit prêt » d'un million de dollars, dira-t-il durant la campagne de 2016.
S'il a toujours vanté ses succès en affaires, la Trump Organization, société familiale non cotée installée dans la Trump Tower, sur la 5e Avenue, a connu des hauts et des bas.
Et son réseau complexe de propriétés immobilières et de parcours de golf aux Etats-Unis et à l'étranger reste entouré d'un épais mystère: Donald Trump est le seul président de l'ère moderne à avoir refusé de publier ses déclarations d'impôts.
Et lorsque le New York Times a révélé, à l'été 2020, qu'il n'avait payé que 750 dollars d'impôt fédéral sur le revenu en 2016 et que nombre des activités avaient accumulé les pertes, son image d'entrepreneur à succès en a encore pris un coup.
Père de cinq enfants nés de trois femmes différentes, dix fois grand-père, Donald Trump n'a eu de cesse de louer en public Melania, l'ancienne mannequin devenue « magnifique Première dame ».
Mais les révélations sur ses liaisons extra-conjugales présumées, en particulier avec l'actrice de films X Stormy Daniels, et les accusations d'agressions sexuelles le visant cadrent mal avec son éloge des valeurs familiales répété mot pour mot à chaque rencontre avec les chrétiens évangéliques.
Fille adorée dotée du titre de « conseillère » à la Maison Blanche, Ivanka fut très écoutée au 1600 Pennsylvania Avenue. « Elle m'appelait et elle disait: +Papa! Tu ne comprends pas! Tu dois faire ça, tu dois le faire!+ », racontait-il fin 2018 lors de la signature d'une loi de réforme sur la justice.
En s'appuyant sur un cercle familial resserré, mais aussi sur un « instinct » toujours mis en avant, Donald Trump, dont la chute a été mille fois annoncée, sera finalement allé au bout d'un mandat dont les dernières semaines ont viré au cauchemar.
En affaires, en campagne et au pouvoir, celui qui fut durant ses années new-yorkaises un grand fan de catch, aura, jusqu'au bout, fait preuve d'une étonnante résilience.
Président à part, il sera aussi – c'est une certitude – un ex-président à part.
Il apparaît inimaginable de le voir un jour participer, avec ses prédécesseurs encore en vie, à une « photo de famille », dans l'un de ces moments d'unité nationale dont l'Amérique raffole.
Donald Trump entame son exil à Mar-a-Lago affaibli, dans une solitude inouïe, même si sa capacité à mobiliser les foules paralyse toujours une partie – une partie seulement – du parti républicain.
A ceux qui imaginent que Joe Biden, vieux routier de la politique et figure apaisante, refermera par sa seule présence la parenthèse Trump et les plaies de l'Amérique, Barack Obama a lancé une mise en garde. « Je sais qu'une seule élection ne règlera pas le problème », a-t-il averti. « Nos divisions sont profondes. »


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