La Marocaine des Jeux et des Sports (MDJS) en première ligne dans la lutte mondiale contre le jeu illégal    Fihr Kettani : «Il est temps de faire des ICC un pilier structurant de l'économie marocaine»    Finances publiques : Le déficit budgétaire atteint 59,8 MMDH    CAN Maroc – 2025 : édition historique mais des primes inchangées    Tomates: le Maroc dans le top 3 mondial...    Gaza : «La mort est préférable à ce que nous vivons»    Importation de pétrole : Rabat met le cap sur les barils russes    Réforme du CNP : Recette du CNDH pour soigner les plaies de la presse    Botola D1/J2 : Yaâcoub El Mansour rêve de faire tomber le Wydad ce soir !    Botola J1 & J2 : Arbitrage : La DTNA sanctionne plusieurs arbitres    Les prévisions du vendredi 19 septembre 2025    Après le drame d'Agadir, le ministère de la Santé enchaîne les inspections dans les hôpitaux publics    Taux directeur de BAM : BKGR prévoit le maintien du statuquo    Souss-Massa et les Îles Canaries renforcent leur coopération    Lahcen Saâdi : «Ce qui est essentiel pour nous, c'est d'investir dans l'humain»    Le nouveau port de pêche de Casablanca, un levier stratégique pour promouvoir le secteur de la pêche    L'OMM alerte sur un cycle de l'eau « de plus en plus erratique et extrême »    OMS : les hôpitaux de Gaza sont "au bord de l'effondrement"    Affaire Moubdi : la défense autorisée à consulter les pièces du dossier    Des éléments du polisario kidnappent des Mauritaniens dans la région de Malahat    Migration : Le Maroc, troisième bénéficiaire de titres de séjour en Europe    La sélection marocaine de futsal en Argentine pour participer à un tournoi FIFA    Innovations et nouvelles technologies en vedette au Forum de la sécurité publique en Chine    Royaume-Uni/USA : Le Roi Charles III et Trump réaffirment et renforcent les « relations spéciales »    Zhou Zhicheng: « Promouvoir la construction d'un système de gouvernance mondiale plus juste et plus équitable »    Les températures attendues ce jeudi 18 septembre 2025    La dynamique culturelle au Maroc incarne sa richesse et sa capacité à s'ouvrir à l'universalité    Cinéma et enjeux mondiaux : mémoire, critique et universalité    Course à pied : Casablanca se donne dix mille raisons de courir    ANME. Driss Chahtane reconduit pour un second mandat    Diplomatie : Bourita en visite officielle en Chine    Royal Air Maroc ouvre une liaison directe entre Casablanca et N'Djamena, portant son réseau africain à 29 destinations    Le roi Mohammed VI inaugure pour cinq milliards de dirhams de projets portuaires à Casablanca    Classement FIFA : le Maroc grimpe au 11e rang mondial avec 1706,27 points    Jazz au Chellah change de lieu et devient Jazz à Rabat    Le Forum d'Assilah consacre sa 46e édition automnale au dialogue des cultures et prépare un hommage à Mohammed Benaïssa    Canary Islands President Clavijo to visit Agadir in 2026 to boost cooperation    Le tribunal de Rotterdam souhaite entendre le chef du renseignement marocain dans une affaire d'espionnage    Football : Le Maroc rencontre Bahreïn en match amical le 9 octobre 2025    Una manifestación organizada en Cádiz en solidaridad con Mohamed Ziane    «Sirat» : Un film tourné au Maroc représentera l'Espagne aux Oscars    Nabila Maan et Tarik Hilal amènent les sonorités marocaines au Kennedy Center de Washington    Alerte météo: Averses orageuses localement fortes avec rafales de vent ce jeudi    Meydene dévoile une programmation exceptionnelle pour septembre 2025    À Genève, la société civile internationale met en avant le modèle marocain de développement durable    Le temps qu'il fera ce jeudi 18 septembre 2025    Jazz à Rabat : un nouveau souffle pour un festival emblématique    Bibliothèque nationale du Royaume: Les travaux de rénovation confiés à Bora Construction    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Le bleu fait poème chez le poète Salah Boussrif
Publié dans Albayane le 02 - 12 - 2024

Il est un moment dans la poésie où il est légitime d'admirer, pour le simple plaisir d'admirer. Une légitimité poétique s'instaure à la découverte de mots placés de telle sorte qu'ils émerveillent de manière neuve, c'est-à-dire mis dans un ailleurs inattendu, si proche et si lointain, où s'installe l'impression, fort courtisée, de toucher leur vérité, ou la vérité qu'ils infusent.
C'est le cas ici, flagrant, évident et palpable, du poète Salah Boussrif. Ses poèmes s'imprègnent de ce qu'ils suggèrent, ce qui émane de lui, générant leur propre sens, qui peut être unique comme il peut porter une multiplicité de significations. Il n'a nullement besoin de quémander un but lyrique en soi, ni d'expliquer le monde comme le ferait un témoin visuel. Il ne désigne pas, ni ne nomme. Il fait sienne l'éclairante citation de Stéphane Mallarmé : « Nommer un objet, c'est supprimer les trois quarts de la jouissance du poème qui est faite du bonheur de deviner peu : le suggérer, voilà le rêve » (Enquête sur une évolution).
Partant de là, on doit le lire selon cette lecture décrite par Bachelard, qui est œuvre : « après l'esquisse qu'est la première lecture, vient l'œuvre de lecture » (La Poétique de l'espace, 1957, p. 38). Qu'entend-on par là ? Un élément de réponse se trouve dans l'introduction faite par Salah Boussrif à son recueil Les Vertus de l'eau : « J'ai plutôt cherché à m'alléger du fardeau de ce long travail épique, avec ces textes qui coulent et se déversent dans un lieu que j'ignore ».
Le mot est dit : lieu ignoré. Cela n'empêche guère la connaissance de s'installer, car elle n'emprunte pas les chemins de l'informatif, mais celui du révélé. Le lieu est autre, délaissé à dessein de l'espace tel qu'on l'entend. C'est le lieu de la transcendance des soufis qui lisent le texte dans l'inapparent, et cette transcendance sous-tend tous les livres de poésie de Salah Boussrif. Il les accompagne, dialogue sans cesse avec eux, relisant lui aussi le Texte, qui est Livre et Être, à la lumière de leurs Ecrits. Cela lui permet, à titre d'exemple, d'écrire : « Une corde sculpte l'âme des canaux,/Des doigts capturent l'air évanescent,/Qui éparpille/Le silence qui réside/Dans les fêlures de la langue. »
Le bleu de la poésie, présence itérative
C'est un silence de la plénitude où la langue s'introduit et colmate les fêlures sans pour autant les anéantir, car elles font partie de ce qui Est. Le poète en rend compte, émeut, sensibilise, crée le moment de l'Union, et poursuit son chemin. D'expérience en expérience, il marque la présence.
Il n'est donc pas étonnant qu'il nomme l'un de ses livres poétiques Saillies bleues. Comment un référent à l'étendue, à ce qui ne finit jamais dans sa latitude, peut-il posséder des saillies, quelque chose comme des boursouflures qui échancrent le parcours pour offrir plus de révélations ? Justement par le fait qu'elles ne sont repérables que pour le poète. Le bleu n'est pas une simple couleur : « Il est une parole / Qui glisse sur la langue, / Qui flotte dans sa mouillure, / Simple illusion pure / Se faufilant dans tant de discours », dit le poète dans Bleu…!
Ainsi, le bleu est utilisé comme vocabulaire poétique, à l'égal d'un vocabulaire plastique en art. Il n'est pas seulement une couleur désignant un aspect d'une chose ou d'un rendu. Non, il va au-delà de cette définition primaire. Il est itinérant. Dans Cristal bleu, on lit ceci : « Le bleu est un noir/Emergeant de la nuit/Vers des jours/Où son eau hésite encore sur le parfum/Avec lequel le ciel se drape/Et la mer, dont le sel se mêle à la poussière. »
Dans un élan mallarméen, celui de l'azur des hauteurs, le bleu de Boussrif est le corollaire de l'infini qui ne cache pas, mais invite, par son étendue, à la découverte. Il est le ciel immense, il est les profondeurs claires de la mer. Il est hors de portée, mais visible seulement pour le poète.
Il est enfin un bleu de l'itinérance, particulièrement axé sur l'effet des éléments naturels, où il se meut, qualifie, transforme et agit sur le temps qu'il fait, là où cela est acté, dans l'ici-et-là, et non dans l'au-delà.
Ça passe par le corps
Il est intéressant de noter que parfois ce bleu entre en interaction avec les quatre éléments, second univers et thème fréquemment poétisé par S. Boussrif. Il est jumelé à l'air : « De l'air qui passe entre deux dunes/Des fissures qui s'ouvrent /Entre leurs ombres », ou encore : « Air /Qui se faufile entre de hautes colonnes ».
Le bleu s'allie à l'infini, dont on voit l'épiphanie dans le désert, origine de toute poésie, déchirure qui élimine les ombres et dévoile le caché. Heidegger n'a-t-il pas déjà montré le chemin ? S. Boussrif en rend compte à travers ses propres mots.
Cela se passe dans un « ciel argenté », où le poète s'identifie à son corps. Ainsi, il proclame : « Mon corps est ciel / Sans nuages pour en cacher l'azur. » Ce corps reçoit l'eau comme une offrande religieuse. On lit : « Ouvre ton souffle au ciel / Pour boire l'eau limoneuse qui s'est agenouillée en ton corps. » L'eau, toujours ruisselante et miroitante, déluge, mer ou rivière, est un miracle scopique, un don de la poésie qui la rend circulable, permettant le passage à la réalisation de soi, via les épreuves imposées au corps.
Ce même corps, le poète le traîne sur une terre dépeuplée, destinée à l'épreuve : chemins déserts, pierres, arcades, dunes, tout ce monde issu de la légende où la vérité se dissimule, qu'il faut chercher sans jamais véritablement la trouver. Car, au cours des pérégrinations poétiques à la recherche de mots jamais prononcés auparavant, nullement déclamés, c'est en présence du feu, qu'il soit sous les cendres ou en flammes éternelles, que ces mots prennent vie.
*Ecrivain et chroniqueur d'art


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.