Entre passion populaire et dérives spéculatives, la CAN 2025 révèle les coulisses d'une bataille silencieuse autour des billets, où l'accès des supporters aux tribunes s'est heurté à l'ombre grandissante du marché noir. La CAN 2025, annoncée comme un grand moment de communion populaire autour du football africain, a ainsi laissé apparaître en marge des terrains une réalité qui agite fortement les supporters depuis plusieurs semaines. Derrière l'engouement exceptionnel et les stades annoncés complets, la question de l'accès aux billets s'est en réalité imposée au cœur du débat public, tant le marché noir a pris une ampleur inédite, au point de priver des milliers de passionnés de leur place dans les tribunes. Dès l'ouverture officielle de la billetterie, la demande massive a provoqué une ruée sans précédent sur les plateformes autorisées. En quelques minutes, les billets proposés à des tarifs populaires, parfois fixés entre 100 et 150 dirhams, ont disparu des circuits officiels. Très rapidement, ces mêmes tickets ont refait surface sur des canaux parallèles, à des prix multipliés de manière spectaculaire. Des supporters ont ainsi vu des billets ordinaires s'échanger entre 1 000 et 3 000 dirhams, tandis que certaines affiches très attendues atteignaient des montants encore plus élevés sur des plateformes internationales de revente. En effet, ce phénomène a produit une situation paradoxale largement commentée après le match inaugural à Rabat. Bien que l'événement affichait complet sur le site officiel de la CAF, près de 10 000 sièges sont restés vides dans le stade. Ces places correspondaient, selon plusieurs sources concordantes, à des tickets captés par des intermédiaires qui n'ont pas trouvé preneur à leurs prix abusifs ou qui ont mal anticipé la demande réelle. Lire aussi : Pluie ennemie, pluie amie : les stades marocains domptent la météo à la CAN-2025 La crise du marché parallèle Le marché noir, longtemps limité aux zones entourant les stades sportifs, s'est profondément transformé. Aujourd'hui, il s'organise essentiellement en ligne à travers des groupes sur les réseaux sociaux et des plateformes de revente non officielles. Cette digitalisation a favorisé l'émergence de pratiques plus sophistiquées, notamment l'utilisation de logiciels automatisés capables d'acheter de grandes quantités de tickets dès l'ouverture des ventes. Dans d'autres cas, des réseaux organisés ont contourné les restrictions imposées à chaque individu en dupliquant les identités utilisées, créant ainsi des stocks artificiels. Toutefois, les conséquences ne se limitent pas à une inflation des prix. De nombreux supporters ont été victimes d'arnaques, recevant des billets invalides, déjà utilisés ou liés à des identités différentes, ce qui les a empêchés d'accéder au stade malgré des sommes importantes versées. Huit personnes interpellées Face à cette dérive, les autorités marocaines ont rapidement adopté une position ferme. La Direction générale de la sûreté nationale (DGSN) a mené plusieurs opérations ciblées dans différentes villes, aboutissant à l'arrestation de 8 personnes impliquées dans la spéculation et le commerce des billets d'origine frauduleuse. Parallèlement, une surveillance numérique a été mise en place afin d'identifier les réseaux actifs sur les plateformes sociales et de suivre les transactions suspectes. Sur le plan judiciaire, des mécanismes de traitement rapide ont été activés, notamment à proximité de certains stades, afin de répondre en temps réel aux infractions liées à la billetterie. Au-delà du contexte national, cette crise de la billetterie s'inscrit dans une problématique mondiale. Des événements majeurs, qu'il s'agisse de Coupes du monde, de Jeux olympiques ou de grandes compétitions européennes, ont été confrontés à des difficultés similaires. Partout, la demande dépasse largement l'offre, créant un terrain favorable à la spéculation. Les dispositifs de billets nominatifs, bien qu'utiles, montrent également leurs limites face aux contraintes logistiques et humaines qui surviennent lors des processus de contrôle. Dans ce contexte, la CAN 2025 illustre moins un dysfonctionnement local qu'un défi structurel propre aux grands événements sportifs contemporains. Conscientes de ces enjeux et s'appuyant sur l'expérience internationale passée, les autorités marocaines ont mis en œuvre une réponse coordonnée visant à protéger les supporters et à préserver l'esprit de compétition.