Elle dévoile les périodes les plus fertiles de l'artiste Au-delà du mythe de l'artiste maudit, l'œuvre de Gharbaoui fut exigeante, engagée, porteuse d'une modernité vivante et assumée. La Fondation nationale des musées (FNM) poursuit les hommages aux grands noms de la peinture marocaine. Après une rétrospective dédiée à Ahmed Cherkaoui, elle organise cette fois-ci une exposition-hommage consacrée au pionnier Jilali Gharbaoui, sous le thème «Gharbaoui : L'envol des racines». Un événement réalisé en collaboration entre la FNM, la Fondation Al Mada et le groupe Attijariwafa bank et qui coïncide avec le cinquantenaire de la disparition de l'artiste. «Aujourd'hui, pour moi, c'est un double bonheur de rendre hommage à un artiste qui m'a soutenu alors que j'étais encore si jeune et au début de ma carrière», témoigne à ce sujet Mehdi Qotbi, président de la Fondation nationale des musées, en ajoutant : «Celui qu'on considère comme un pionnier de l'art non figuratif marocain a marqué, par son désir de modernité, d'ouverture sur le monde et par sa gestuelle unique, l'histoire de l'art du pays à une époque où rompre avec la tradition était inenvisageable». Plus de 70 œuvres à l'honneur L'exposition «Gharbaoui : L'envol des racines» réunit plus de 70 œuvres retraçant une carrière prolifique qui puise ses racines dans l'ambiance artistique des années 50 et 60. «Cette exposition tentera de confronter directement l'œuvre à travers une trajectoire allant de 1953 à 1971. Au-delà du mythe de l'artiste maudit, l'œuvre de Gharbaoui fut exigeante, engagée, porteuse d'une modernité vivante et assumée. Sa gestualité rageuse mais consciente a marqué une rupture avec les traditions picturales comme avec ses contemporains, au lendemain de l'indépendance du Royaume», explique Ghitha Triki, commissaire de cette exposition. Un parcours en quatre étapes Découpée en quatre phases principales, l'exposition dévoilera les périodes les plus fertiles de l'artiste, des premières peintures abstraites en 1953 aux dernières peintures rageuses exécutées en 1971. Le parcours est ponctué de mises en scènes immersives avec documents et photographies illustrant des moments clés. Le public découvre la fameuse série dite «L'envol des cigognes» réalisée depuis son observatoire des jardins du Chellah ainsi que les très beaux et rares paysages figuratifs qui auront un espace dédié entre les murs de l'exposition. En effet, la période 1953-1958 illustre «sa formation en France et son court séjour en Italie avec les premiers tableaux gestuels non figuratifs». En ce qui concerne la période 1958-1963, elle retrace «sa participation aux biennales, sa fréquentation de l'Ecole de Paris, sa rencontre amoureuse avec Thérèse Boersma, sa découverte et séjour au monastère de Toumliline dans le Moyen-Atlas, son retour d'Amsterdam et son influence de Karel Appel»… S'agissant de la période 1969-1971, elle expose des «Espoirs de l'exposition rétrospective proposée par Pierre Gaudibert au Musée d'art moderne de la Ville de Paris, allers et retours entre le Maroc et la France, solitude puis décès à Paris». Enfin, la dernière période 1963-1969 illustre «les fréquents allers et retours entre le Maroc et l'Europe, la fermeture du monastère qui affecte particulièrement l'artiste, et la vente de son fonds d'atelier à M. Serghini». Un artiste en quête de lumière Après un périple d'initiation aux débats artistiques occidentaux dans les années 50 et notamment ceux de l'Ecole de Paris, Jilali Gharbaoui a développé une approche picturale abstraite en rupture critique avec l'art figuratif. Marqué par une enfance difficile, Gharbaoui a fait de son art l'expression de ses angoisses et de ses douleurs en se projetant dans une quête spirituelle et mystique canalisée par la recherche inlassable de la lumière. Cette rétrospective permet ainsi au public de comprendre la complexité d'un peintre ambitieux et avant-gardiste qui a inspiré des générations d'artistes marocains mais aussi européens. A découvrir du 23 septembre au 8 février au Musée Mohammed VI d'art moderne et contemporain de Rabat.