Ceuta : Des Palestiniens traversent à la nage pour demander l'asile    Maroc : Les détenus du Hirak du Rif en grève de la faim en solidarité avec Gaza et le Soudan    RAM rapproche encore plus Marrakech de ses visiteurs en France et en Belgique    Le BCIJ interpelle un jeune sympathisant de Daech à Settat    Palestine: entre victoires diplomatiques et guerre génocidaire    Mohamed Bouzouba élu nouveau président du MAS de Fès    Ballon d'or 2025 : Achraf Hakimi et Ousmane Dembélé en rivalité au PSG    Tennis : Qualitifation inédite de l'équipe féminine du Maroc au Groupe II Europe/Afrique    Les prévisions du lundi 11 août 2025    L'OM attend le départ d'Amine Harit avant la fin du mercato estival    Cinéma: Une partie du film bollywoodien « Captain India » tournée au Maroc en 2026    Le Roi Mohammed VI félicite le président Mahamat Idriss Deby Itno    Gaza: Cinq journalistes d'Al Jazeera tués lors d'une frappe israélienne    Vers un sommet Trump-Poutine-Zelensky préparé par Washington    Cours des devises du lundi 11 août 2025    Tarification des médicaments : Inquiétudes des pharmaciens face au risque de baisse de revenus    Gestion d'actifs : l'IA redessine les équilibres mondiaux et les ambitions marocaines    Mel B dit "oui" sous le soleil marocain    Achraf Hakimi : « c'est un moment de rêve de pouvoir jouer avec le Maroc pendant la CAN »    La Bourse de Casablanca atteint des sommets inédits mais la rareté des introductions interpelle    Incendies en Espagne : Plus de 1.000 évacués dans le nord-ouest    Avant la Ticad-9, le Japon confirme la compétence maritime exclusive du Maroc sur les eaux du Sahara    La compagnie kazakhe SCAT Airlines projette d'étendre ses vols à cinquième liberté vers le Maroc depuis la Serbie    Revue de presse de ce lundi 11 août 2025    La Bourse de Casablanca ouvre en hausse    Le brésilien Votorantim cède ses actifs marocains et tunisiens et envisage l'acheminement de ciment depuis Laâyoune vers Grande Canarie    RDC-Rwanda, Azerbaïdjan-Arménie, Thaïlande-Cambodge : et si «un accord de paix» Maroc-Algérie sur fond de soutien américain au Sahara devenait la surprise du chef Trump ?    La DGSN procède à une vaste réaffectation de commandements policiers dans plusieurs districts de Casablanca    Des documents français révèlent les manœuvres sournoises du régime algérien contre le Maroc : l'Algérie proposa un partenariat militaire à l'Espagne à Tindouf contre le Royaume du Maroc    Le journal chinois "Global Times" : Le Maroc sous la conduite du Roi Mohammed VI, un modèle africain exemplaire en développement et innovation    CHAN 2024 : L'Angola domine la Zambie    Le Conseil de la Ligue arabe examine, en session extraordinaire, la situation à Gaza    Trump relègue les portraits d'Obama et des Bush dans un espace caché de la Maison-Blanche    Sel, sucre, étiquettes... ce que savent vraiment les Marocains sur leur alimentation    Settat : interpellation d'un élément imprégné de l'idéologie extrémiste de l'organisation terroriste «groupe Etat islamique»    L'ONDA célèbre les Marocains du monde dans tous les aéroports du Royaume    Les températures attendues ce lundi 11 août 2025    Vague de chaleur extrême: 12 départements français placés en vigilance rouge    La SNRT celebra sus cuartas Jornadas de puertas abiertas para los MRE    Clasificación CAF 2025: Al Ahly a la cabeza, la RS Berkane en cuarto lugar    La SNRT tient ses quatrièmes Journées portes ouvertes pour les MRE    Sommet Poutine-Trump : Pour un échange de territoire entre Kiev et Moscou    Affluence Historique au Moussem Moulay Abdallah Amghar : 83.500 Spectateurs en émoi !    Cinéma, artisanat et terroir    Moussem Moulay Abdallah Amghar - Cas d'intoxication alimentaire: une fake news démentie par les organisateurs    Une carte historique démontre comment Ibn Battuta a parcouru un monde en réseaux, du Maghreb à la Chine    Incendie impressionant dans la mosquée historique de Cordoue en Espagne [Vidéo]    Ousmane Ndiaye : radiographie critique des entraves au pluralisme en Afrique    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Un débat «tronqué» dans un désordre juridique
Publié dans Aujourd'hui le Maroc le 12 - 12 - 2003

Réagissant aux propos tenus par Mohamed Bouzoubaâ, ministre de la Justice, dans l'interview publiée dans notre édition n°532 du mercredi 10 décembre 2003, Abdelaziz Bennani, ancien président de l'Organisation Marocaine des Droits de l'Homme (OMDH) a tenu à donner son point de vue à travers la contribution suivante.
Trois questions ont été soulevées dans l'interview donnée par le ministre de la Justice à votre journal et dont le texte a été publié, «heureuse coïncidence», le 10 décembre, jour anniversaire de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme : l'exercice de la liberté d'association par les magistrats, la suspension d'un membre supérieur de la magistrature et les poursuites pénales exercées contre cinq juges.
Invoquant les articles 14 et 15 du statut de la magistrature, régi par le dahir portant loi du 11 novembre 1974, le ministre a affirmé que les magistrats enfreignent la loi en adhérant à une association. Or, le 1er article dispose que les magistrats ne peuvent ni constituer des syndicats ni en faire partie. Quant au 2ème, il concerne la possibilité d'exercer une activité rémunérée ou non, autre que celle de magistrat. Il n'a rien à voir avec la liberté d'association ! Outre l'interdiction de toute délibération ou démonstration de nature politique, les juges n'ont pas le droit de constituer ou d'appartenir à un syndicat. Cette dernière disposition est le corollaire d'une autre (l'article 13) « interdisant toute action de nature à arrêter ou à entraver le fonctionnement de juridiction».
Par conséquent, la législation en vigueur ne prive nullement les magistrats de la liberté d'expression, dans les limites de l'obligation de «réserve et de dignité» impliquée par la nature de leurs fonctions. De même qu'aucune disposition ne les prive de la liberté d'association, lesdites libertés fondamentales étant consacrées pour tous les citoyens par l'article 9 de la Constitution. Le dernier alinéa de cet article dispose que la limitation de ces libertés ne peut être apportée que par la loi. En outre, les deux libertés sont également consacrées par les articles 19 et 22 du pacte international relatif aux droits civils et politiques, ratifié par le Royaume. En 3ème lieu, un autre instrument du droit international est constitué par les principes fondamentaux de l'indépendance de la justice, adoptés par le 7ème congrès des Nations Unies pour la prévention des crimes et le traitement des délinquants et confirmé par l'assemblée générale des Nations Unies dans ses résolutions du 29 novembre et 13 décembre 1985. Fondés sur la Déclaration universelle des Droits de l'Homme, ces principes qui mettent en exergue l'obligation de l'Etat de respecter l'indépendance de la justice, disposent formellement que les magistrats jouissent comme tous les autres citoyens de la liberté d'expression, d'association et d'assemblée ainsi que de la liberté d'association. Ce faisant, ils doivent préserver la dignité de leur charge ainsi que l'impartialité et l'indépendance de la magistrature. C'est dire que l'attitude prise par le ministre de la Justice donne une fausse interprétation du statut de la Magistrature, lequel devrait d'ailleurs être modifié pour être conforme à la lettre et à l'esprit de la Constitution et du droit international. On ne peut à cet égard maintenir un texte habilitant ce ministre à suspendre ou à muter des juges.
L'attitude de M. Bouzoubaâ résulte, à mon avis, d'une double erreur d'appréciation politique. D'une part, il fait l'amalgame entre ceux parmi les magistrats qui agissent pour maintenir le statu quo et ceux, de plus en plus nombreux, qui militent dans la transparence pour une réforme de la justice. D'autre part, en entravant l'exercice par les magistrats de la liberté d'association, au lieu de poursuivre, le cas échéant, le non-respect du devoir de réserve, l'Etat ne ferait qu'encourager les lobbies, agissant clandestinement au sein du corps de la magistrature.
Concernant la 2ème question relative à la suspension d'un membre du Conseil supérieur, et en l'absence d'une disposition claire du statut de la magistrature sur ce point, le ministre aurait dû saisir le Conseil avant de soumettre ses délibérations au Souverain.
Concernant enfin les poursuites engagées contre nombre de magistrats, le problème posé ne réside pas dans la mise en œuvre de la responsabilité pénale de magistrats sur lesquels pèseraient de fortes présomptions de corruption.
C'est plus que jamais un impératif majeur de la réhabilitation de la Justice et d'une lutte efficiente contre ce mal qui discrédite l'Etat et nombre de ses institutions. Il s'agit en fait de leur faire bénéficier du droit fondamental pour tout individu, au procès équitable. Or, est-il besoin de le rappeler, la Cour spéciale de justice, fondée par un texte d'exception le 06/10/1972, est caractérisée par un déséquilibre patent entre les droits de la défense et des prérogatives du Parquet, agissant sur instructions directes d'une autorité politique, le ministre de la Justice. Elle constitue une véritable aberration car le droit applicable à la corruption change à un dirham près : si le corrompu touche 24.999 dirhams, il bénéficie du droit commun. S'il touche 25.000 dirhams, il est renvoyé devant une juridiction d'exception. Dans la même logique, on pourrait peut-être se contenter de punir d'une simple amende ceux nombreux parmi les fonctionnaires et agents publics qui touchent seulement un billet de 100 ou de 200 dirhams !
Non seulement, la Cour spéciale n'offre nullement les conditions du procès équitable, telles que définies par l'article 14 du pacte sus-visé. Plus que cela, elle est contraire à la lettre et à l'esprit de la Constitution ! Après lui avoir retiré le dossier du CIH (qu'en est-il de cette affaire ?), était-il opportun de lui déférer le dossier des magistrats et de tout autre dossier, au lieu d'activer sa suppression ?
Cette dernière nécessite une loi de quelques lignes prononçant l'abrogation du texte de 72. Il n'y aura pas de vide juridique dans la mesure où les dossiers seraient automatiquement jugés par les juridictions de droit commun, comprenant des magistrats compétents pour ce genre d'affaires.
La lutte contre la corruption, la drogue, le terrorisme et toute autre forme de crimes doit être menée dans le respect des conditions du procès équitable.
Elle ne peut être menée à la faveur d'un bricolage ainsi que cela a été le cas pour les procès intentés dans le cadre de la campagne dite d'assainissement et plus récemment dans les procès relatifs au détournement des deniers publics.
Le désordre caractérisant le système juridique marocain doit prendre fin. Cela implique l'harmonisation de la législation avec la constitution et les conventions internationales ratifiées par le Maroc. Cette harmonisation, annoncée en vain par le gouvernement de M. Youssoufi revêt un caractère d'urgence pour une réforme profonde de la justice, fondement essentiel de l'Etat de droit et condition incontournable de la bonne gouvernance et du développement.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.