Le ministre de la jeunesse, de la culture et de la communication, Mehdi Bensaïd, a mis en garde lundi 30 juin contre les atteintes systémiques portées au patrimoine immatériel de l'humanité par le biais du trafic illicite des biens culturels, qualifiant ce phénomène de «crime organisé contre notre mémoire commune.» Prenant la parole lors d'une rencontre internationale consacrée au rôle des douanes dans la protection du patrimoine, en présence notamment du président délégué du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire (CSPJ), du président du ministère public, de représentants de l'Isesco et de plusieurs diplomates, M. Bensaïd a souligné que la lutte contre ce fléau exige une mobilisation collective, tant sur le plan législatif qu'opérationnel. «Lorsque nous évoquons le trafic illicite de biens culturels, il ne s'agit pas d'un simple commerce illégal. C'est une entreprise de saccage, un effacement méthodique de la mémoire des peuples», a déclaré le ministre, ajoutant que «ces objets ne sont pas de simples artefacts : ils sont les témoins vivants de civilisations successives, les dépositaires de récits pluriels, et les vecteurs d'un dialogue millénaire entre les cultures». Le Maroc blinde son arsenal juridique et documentaire M. Bensaïd a rappelé que le Maroc, sous l'égide du roi Mohammed VI, accorde une place singulière à la préservation du legs culturel. Il a fait état de l'entrée en vigueur d'un nouveau texte législatif encadrant la sauvegarde du patrimoine, accompagné d'un effort soutenu de documentation numérique des collections nationales. «Le travail d'inventaire constitue notre première ligne de défense contre le vol et le déplacement illicite», a-t-il affirmé. S'agissant de la répression, le ministre a précisé que les autorités marocaines investissent dans le renforcement des compétences judiciaires et policières, avec un accent particulier sur la coopération internationale. «Des biens culturels ont été restitués à Rabat grâce à des collaborations fructueuses avec des Etats amis, tels que les Etats-Unis et le Chili», a-t-il indiqué. Il a également insisté sur la nécessité de sensibiliser non seulement les professionnels, mais l'ensemble de la société, affirmant que «la préservation du patrimoine commence par une conscience partagée de sa valeur et de sa fragilité». Coopérer pour tarir les circuits de revente Le ministre a salué la tenue de cette rencontre multilatérale, y voyant une occasion de faire converger les efforts et de dégager des mécanismes communs face à un trafic qui ignore les frontières. «Les réseaux criminels exploitent les conflits et les failles normatives pour piller les trésors des nations. Nous devons leur opposer une vigilance concertée», a-t-il souligné. Parmi les mesures préconisées, M. Bensaïd a plaidé pour une surveillance accrue des marchés parallèles et des ventes aux enchères suspectes, un appui technique aux pays fragilisés par la guerre, le recours aux technologies telles que l'intelligence artificielle et les chaînes de blocs pour authentifier les objets, et enfin, un ancrage plus profond de la culture patrimoniale dans l'éducation. «Les nations qui perdent leur mémoire perdent aussi leur boussole. Protéger notre patrimoine, c'est refuser l'amnésie collective, et garantir que nos enfants puissent un jour entendre la voix des pierres et des manuscrits», a conclu le ministre.