Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.
L'Algérie frappée de 30 % de droits de douane par les Etats-Unis «en raison de son antagonisme envers le Maroc, signataire des accords de 2020 avec Washington», souligne l'ISS
L'Algérie figure parmi les pays africains les plus lourdement frappés par les nouveaux droits de douane imposés par le président américain Donald Trump, avec un taux de 30 %, identique à celui appliqué à l'Afrique du Sud et à la Libye. Ce niveau dépasse largement les 10 % ou 15 % retenus pour la majorité des Etats africains, et se situe loin des 25 % fixés pour la Tunisie. Selon plusieurs experts, ces choix obéissent davantage à des considérations politiques qu'à des critères économiques. Un ciblage dicté par la géopolitique Selon une étude fouillée l'Institute for Security Studies (ISS), «l'Algérie a vraisemblablement été visée en raison de son antagonisme envers le Maroc, signataire des accords [de 2020] avec Washington et plusieurs Etats arabes». Si les raisons des taux élevés infligés à la Libye et à la Tunisie demeurent obscures, le cas de l'Afrique du Sud apparaît plus lisible : Donald Trump s'est à maintes reprises emporté contre Pretoria pour sa loi sur l'expropriation et ses accusations infondées de «génocide» contre les fermiers afrikaners. La plainte sud-africaine contre Israël devant la Cour internationale de justice, pour crimes de génocide à Gaza, aurait également pesé dans la balance. Une grille tarifaire sans logique économique claire La révision des tarifs, annoncée le 31 juillet, a corrigé certaines anomalies criantes de la mouture d'avril. Le Lesotho, sanctionné initialement par un taux de 50 %, a vu ce chiffre ramené à 15 %, mais reste, selon son ministre du commerce Mokhethi Shelile, «dans une situation de désavantage fatal face au Kenya et à l'Eswatini, qui bénéficient d'un taux de 10 %». Le mode de calcul adopté par Washington demeure nébuleux. Les pays africains ont été frappés de manière disparate, la plupart recevant 10 % ou 15 %, tandis que quatre Etats enregistraient des taux nettement supérieurs. L'impossible unité africaine face à Washington Certains économistes cités par l'ISS appellent à une riposte commune du continent. Wamkele Mene, secrétaire général de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), a déclaré que «nos chefs d'Etat comprennent qu'aucun marché africain ne survivra seul», précisant qu'«il serait illusoire de négocier séparément avec Washington». Toutefois, Daniel Bradlow, expert en diplomatie économique à l'université de Pretoria et à l'Institut sud-africain des affaires internationales, estime cette ambition irréaliste : «Il est aisé pour les Etats-Unis de diviser et séduire certains pays par des accords bilatéraux avantageux, ce qui affaiblit toute stratégie commune». L'absence d'union douanière ou de marché commun empêche, pour l'heure, l'Afrique de négocier avec un tarif extérieur unique. Quelques blocs régionaux ont bien conclu des accords avec l'Union européenne, mais aucun cadre continental comparable n'existe face aux Etats-Unis. Des conséquences économiques durables Les recherches conjointes de la Commission de l'Union africaine, de la Banque africaine de développement (BAD) et de la Commission économique pour l'Afrique des Nations unies (CEA) estiment que ces mesures pourraient réduire les exportations africaines vers les Etats-Unis de 21,5 %. Le secrétaire exécutif de la CEA, Claver Gatete, a averti que «cela dépasse la simple question des volumes échangés : c'est toute la chaîne industrielle, l'emploi et la capacité d'influence de l'Afrique qui sont en jeu». Face à ce coup de frein, certains Etats, comme l'Afrique du Sud, mettent en place des dispositifs de soutien aux entreprises exportatrices, notamment dans les secteurs de l'automobile et de l'agriculture. Dans le même temps, la Chine profite de la situation en supprimant presque tous ses droits de douane sur les importations africaines. Mais, comme le souligne l'ISS, «aucune économie africaine ne peut se passer du premier marché mondial». Pour nombre d'analystes, seule une mise en œuvre accélérée de la ZLECAf permettrait de bâtir une résistance face à cette tempête commerciale, dont l'issue pourrait dépendre d'un éventuel revirement de la Maison Blanche si ses mesures se retournaient contre elle.