Le président du groupement du Progrès et du socialisme (PPS, opposition) à la Chambre des représentants, Rachid Hamouni, a livré un discours glaçant devant la commission des secteurs sociaux (CSS), critiquant la montée irrésistible du secteur privé de la santé et l'inertie d'un hôpital public relégué aux marges. M. Hamouni a ouvert son propos en soulignant que «la langue des chiffres ne trompe pas : un groupe de cliniques privées coté en bourse a connu une croissance historique, surpassant l'industrie automobile et les banques, en générant plus de deux milliards de dirhams en six mois». Il a rappelé que «durant ce même semestre, plus de quarante établissements ont surgi, dotés de médecins et d'équipements comparables à ceux d'un centre hospitalo-universitaire, tandis que des hôpitaux publics ont été annoncés sans jamais être achevés». Selon lui, «le gouvernement a exploité la loi sur l'investissement au bénéfice des cliniques privées», ce qui a permis à ces dernières d'édifier rapidement des structures, alors que «le secteur public demeure enlisé dans une lenteur accablante». M. Hamouni a regretté que «ce modèle, qui aurait dû inspirer l'hôpital public, n'ait été appliqué qu'au privé». Il a poursuivi en rappelant que «au lieu d'ériger des hôpitaux dans les régions reculées, ce sont Casablanca et Rabat qui voient surgir de nouvelles cliniques, au détriment des zones délaissées». Et de s'interroger : «au profit de qui bloque-t-on la réforme, sinon de ceux qui tirent avantage de la défaillance du public ?». Un désarroi partagé et l'appel au dialogue social Dans la suite de son intervention, M. Hamouni a estimé que «l'opposition n'a jamais perçu le moindre signe de réceptivité aux avertissements lancés sur l'état du secteur». À l'inverse, a-t-il accusé, «la majorité se contente de répéter des expressions comme "non précédentes", comme s'il s'agissait d'exploits indiscutables, alors que la réalité démontre le contraire». Il a relevé que «le ministre de la santé, lorsqu'il se présente seul devant le Parlement, subit des critiques de toutes parts, issues aussi bien de l'opposition que de la majorité». Pourtant, a-t-il observé, «la présence du chef du gouvernement pour traiter du même sujet ne soulève aucune objection dans les rangs majoritaires». Evoquant les mouvements sociaux récents, M. Hamouni a rappelé que «l'étincelle des protestations a jailli à Agadir, avant que les revendications ne débordent la santé pour embrasser l'emploi, l'éducation et la lutte contre la corruption». Il a jugé «injuste de faire porter à un seul ministre le poids d'une crise qui s'est nourrie de décennies de négligences accumulées». Il a ajouté que «les défaillances de la santé s'accumulent depuis de longues années, liées à des contraintes législatives, financières et humaines». C'est cette réalité, a-t-il rappelé, qui «a conduit le roi Mohammed VI à appeler à une refonte intégrale de la structure sanitaire». M. Hamouni a, par ailleurs, relevé que «les groupes parlementaires, majorité et opposition confondues, se sont unis entre les deux sessions pour adopter à l'unanimité et dans un délai rapide les lois fondamentales, convaincus que la réforme commence par la législation, la réorganisation de la fonction publique sanitaire et la mobilisation des ressources humaines». Abordant les manifestations sociales, il a affirmé que «ces revendications sont ordinaires et légitimes, car la Constitution elle-même garantit le droit à la santé, à l'éducation et à l'emploi». Le groupement du progrès et du socialisme, a-t-il insisté, «soutient ces demandes et considère que la seule manière d'y répondre réside dans le dialogue, l'écoute et l'accueil des doléances, et non dans l'interdiction ou la répression». Il a toutefois posé une limite claire, en affirmant que «le parti ne saurait tolérer les débordements qui ont accompagné certaines manifestations, lorsqu'ils se traduisent par des destructions de biens ou des attaques contre les forces de l'ordre». Selon lui, «seul le caractère pacifique des protestations permet de préserver la légitimité et la crédibilité des revendications».