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Pascal Bruckner : «Dans les négociations sur le Sahara, l'Algérie a été désavouée aux Nations unies même par les Russes et les Chinois, et Boualem Sansal a survécu grâce à la supériorité de l'esprit»
Dans un entretien accordé au Figaro Vox, l'essayiste Pascal Bruckner a livré une analyse profondément critique à l'égard des autorités algériennes, qu'il estime engagées dans une spirale de discrédit diplomatique et d'affaiblissement politique. Selon lui, «l'humanité [dans l'affaire de Boualem Sansal, qui est un kidnapping d'Etat] a prévalu mais avec un bras de fer, et si l'Algérie a cédé, c'est parce qu'elle a tout perdu dans les négociations sur le Sahara occidental». Il affirme encore que «le régime algérien a été désavoué aux Nations unies, y compris par les Russes et les Chinois, pourtant ses alliés traditionnels», voyant dans cette évolution un signe d'érosion avancée de la diplomatie algérienne. Poursuivant ses explications, M. Bruckner considère que «la pression exercée par Donald Trump pour favoriser une réconciliation entre le Maroc et l'Algérie passe aussi par la reconnaissance de la marocanité du Sahara occidental». À ses yeux, cette situation «place Abdelmadjid Tebboune dans un isolement total», à la tête d'un appareil étatique qu'il décrit comme incapable de renouvellement, enlisé dans des schémas de pouvoir datés. L'essayiste soutient que «le pouvoir algérien connaît un échec d'autant plus sanglant qu'il dirige un pays riche, doté d'un peuple cultivé et talentueux, mais bridé par un système qui ne serait jamais vraiment sorti de la colonisation». Dans cette perspective, il évoque ce qu'il perçoit comme un étouffement méthodique des forces vives de la société, empêchée d'exprimer l'ampleur de ses capacités intellectuelles et civiques. «Apparemment Boualem Sansal se porte bien. La force de l'esprit l'a sauvé des conditions matérielles dégradées. Je n'en dirais pas autant du président algérien et de ceux qui l'entourent», a-t-il souligné. Arrestation, condamnation, détention prolongée et transfert sanitaire vers Berlin Boualem Sansal, âgé de 81 ans et atteint d'un cancer de la prostate, avait été arrêté le 16 novembre 2024, puis placé en détention dans l'attente de son procès. Le tribunal de Dar El-Beïda, près d'Alger, l'avait condamné le 27 mars à cinq ans de prison et 500 000 dinars d'amende pour «atteinte à la sûreté nationale», en raison de propos tenus début octobre 2024 dans un entretien vidéo avec le média Frontières, au cours duquel il avait évoqué l'appartenance historique de l'Ouest algérien au Maroc. La condamnation avait été confirmée en appel le 1er juillet, prolongeant une incarcération jugée très préoccupante par de nombreux intellectuels et plusieurs organisations internationales, qui avaient souligné la fragilité médicale de l'écrivain et l'inadéquation manifeste de la détention avec son état de santé. Près d'un an après son arrestation à l'aéroport d'Alger, M. Sansal a finalement bénéficié, après des pressions occidentales, d'une mesure de grâce décrétée par Abdelmadjid Tebboune. La présidence algérienne indique que cette décision répond à une proposition de bons offices formulée par le président allemand Frank-Walter Steinmeier. Selon la même source, l'écrivain a aussitôt été transféré à bord d'un appareil de la Bundeswehr, l'armée nationale allemande . Il a été conduit dans la soirée à Berlin où il a été admis dans un établissement hospitalier dans la capitale Berlin, selon la presse.
