Un scandale secoue une partie de la sphère bancaire, en ce moment. Les protagonistes : le Crédit du maroc et le crédit agricole du Maroc. tenants et aboutissants d'un «fait divers» financier qui risque de faire école dans les annales de l'establishment bancaire. Ces deux «Scapin» à la marocaine, tous deux figurant sur les listes régulières des effectifs de la banque pilotée par le président Tariq Sijilmassi, en situation d'absence irrégulière naturellement, après leur avoir notifié le refus de leur démission, se trouvent être à l'origine d'un «scandale des mœurs» dans les pratiques bancaires. Ils se nomment Abdelaziz Enasri et Yassine Terafi, respectivement Directeur et Directeur adjoint des Activités à la Salle des Marchés du CAM, et dont la démission déposée en décembre 2007 n'a pas été acceptée. C'est dire que le rival du Crédit Agricole du Maroc n'a pas lésiné sur les moyens machiavéliques, en allant pêcher en eaux troubles le «gros poisson» débauché en la personne de cadres dirigeants dans des activités très sensibles. Si seulement la filiale spécialisée du Crédit Agricole français s'en tenait à l'acte de «piquer» le potentiel humain chez les concurrents, cela serait un moindre mal. Sauf que le plus grave et le plus inadmissible est à venir puisque le «protégé» de Calyon, banque d'investissement issue de la fusion entre le Crédit Lyonnais et le Crédit Agricole de l'Hexagone, et coiffant la filiale Crédit du Maroc, a usé et abusé des fourberies de ces deux transfuges du CAM en bafouant les règles déontologiques élémentaires pour développer des opérations financières opérées de manière illicite par les «traders» mis en cause. Selon nos investigations, le CAM a demandé une réunion d'urgence au GPBM pour sanctionner ce défaut d'éthique et rappeler les parties concernées au respect de la charte de bonne conduite et de la transparence des transactions interbancaires. Curieusement, le Crédit du Maroc s'est déclaré «non concerné» par cette réunion, dont le timing est en passe d'être arrêté au motif que, selon les allégations des concernés, «le Crédit du Maroc n'est pas impliqué dans ces opérations. A ce jour, il n'a encore réalisé aucune opération de cette nature, et ne porte aucun risque à ce titre». Pourtant, un avis interne diffusé au personnel de cette filiale bancaire étrangère stipule, noir sur blanc, que «le Crédit du Maroc a recruté en janvier et février 2008 deux collaborateurs du Crédit Agricole du Maroc afin de développer une activité de produits structurés destinés aux entreprises et aux investisseurs institutionnels marocains». L'esprit de la coopération trahie C'est un tissu de mensonges car, en clair, ce communiqué admet avoir «débauché» illégalement de hauts cadres du CAM continuant de figurer sur le fichier des collaborateurs de la banque verte. C'est même un acte de trahison de l'esprit de coopération convenu entre les deux grands groupes agricoles des deux rives pour dépasser, par consensus, la regrettable «guerre» des logos. Avec tous les risques encourus en «embauchant» clandestinement des responsables d'opérations de marchés continuant à développer les mêmes activités opérées de façon illicite par ces mêmes collaborateurs du CAM. Il s'agit d'opérations financières à capital garanti portant sur des indices de change ou de taux effectués, dans le cas d'espèce, sans aucune autorisation préalable dans le cadre de relations triangulaires entre les deux groupes agricoles du Royaume et de l'Hexagone et Calyon. Et, contrairement à ceux qui doutent de l'efficience du système de gestion de risques au CAM, ces derniers pourront aller se rhabiller, puisque les «traders clandestins» réglaient ces transactions exclusivement par téléphone sans aucune procédure de régularisation ou de validation écrite, ni en amont ni en aval. Mieux encore, non seulement ces opérations ne présentent aucun risque financier pour la banque de Sijilmassi, mais elles peuvent même s'avérer bénéfiques pour couper, une fois pour toutes, le sifflet à toutes les mauvaises langues distillant des rumeurs totalement infondées annonçant de grosses pertes d'argent affectant les équilibres financiers du CAM. Soucieux de préserver l'essentiel des liens de bon partenariat entre les deux groupes marocain et français, une délégation de Calyon a été dépêchée en urgence pour se réunir, hier vendredi, avec leurs homologues de la banque verte en vue de dénouer l'écheveau, de clarifier définitivement la situation et de prendre les mesures préventives et, le cas échéant, répressives qui s'imposent afin de faire cesser l'illégalité des comportements et l'irrespect de la déontologie bancaire. De son côté, le CAM a fait les choses dans les règles en saisissant les institutions compétentes dont le régulateur Bank Al Maghrib, le Trésor et les actionnaires du Conseil de Surveillance (dont le ministère de l'Agriculture). Que retenir de cette affaire en attendant le communiqué de clarification, qui devrait être publié dans les prochains jours, probablement de manière conjointe entre les partenaires franco-marocains ? D'abord, il faut relever avec force que ces pratiques anti-transparentes des transactions de marchés sont loin d'avoir créé un préjudice financier au CAM, bien au contraire, celui-ci s'en trouve même gagnant en décidant de garder ces opérations dégageant des gains estimés, selon certaines sources, à plus de 20 millions de DH. Ce qui devrait être confirmé a posteriori par le jeu des procédures de validation en vigueur et de la révision trimestrielle. Deuxième leçon à retenir : il ne s'agit nullement d'une quelconque faille dans le système de procédures internes au CAM, puisque les opérations incriminées étaient exclusivement réglées par voie téléphonique. Troisième message : il s'agit surtout d'un manquement grave et répréhensible à la déontologie et à l'éthique bancaire qui condamne le débauchage illégal de cadres, les opérations non autorisées, les procédures non respectées, la trahison à l'esprit de coopération…