Comme nous l'annoncions en exclusivité en juillet dernier, l'Egyptien Ahmed Wadi, fondateur de la fintech Money Fellows, qui vient de lever 13 millions de dollars lors d'un tour de table codirigé par le fonds marocain Al Mada Ventures, confirme l'arrivée de sa plateforme de tontine numérique sur le marché marocain d'ici fin 2025. Inspirée du modèle traditionnel du « Daret », cette solution ambitionne de digitaliser l'épargne informelle et d'élargir l'accès aux services financiers dans le Royaume. Après plusieurs mois de préparatifs, l'Egyptien Ahmed Wadi concrétise son ambition de s'implanter au Maroc. Sa fintech, Money Fellows, spécialisée dans les services financiers digitalisés, posera ses valises dans le Royaume d'ici la fin de l'année. Il a levé le voile sur son implantation en cours sur le marché marocain, à l'occasion d'un tour de table qui a permis à l'entreprise de lever 13 millions de dollars pour accélérer son développement. Cette levée de fonds a été codirigée par le fonds marocain Al Mada Ventures et DPI Venture Capital via le fonds égyptien Nclude, avec la participation de plusieurs investisseurs internationaux, dont la société française Partech et l'allemand CommerzVentures. Grâce à ce financement, Money Fellows compte moderniser sa plateforme numérique, renforcer ses infrastructures technologiques et muscler ses capacités opérationnelles dans le cadre de sa stratégie d'expansion en Afrique du Nord. Le Maroc y occupe une place centrale. Lire aussi | L'Egyptien Ahmed Wadi arrive au Maroc avec sa tontine « Daret » en ligne Le Maroc, une terre fertile pour la tontine numérique « Le Maroc représente la prochaine étape logique de notre expansion régionale », affirme Ahmed Wadi, fondateur et PDG de Money Fellows, dans une interview accordée à Inc. Arabia. Le pays offre, selon lui, un terreau particulièrement favorable à la fintech. En cause : une forte culture de l'épargne collective informelle, une population jeune, mobile et familiarisée aux outils numériques, ainsi qu'un environnement réglementaire de plus en plus favorable à l'innovation financière. Contrairement à l'Egypte, où la startup a dû éduquer le marché autour de la digitalisation d'une pratique profondément ancrée (la gam'eya), le Maroc se distingue par une population déjà sensibilisée aux services financiers digitaux. La stratégie de déploiement y sera donc différente. Money Fellows prévoit de nouer des partenariats avec des institutions financières locales pour gagner la confiance des utilisateurs, tout en conservant un modèle opérationnel léger et agile. Lire aussi | Nouveautés : voici ce que propose BAIC au Maroc Une manne informelle dans le viseur L'objectif de la fintech est clair : capter une part de l'épargne informelle qui circule à travers les darets, ces associations rotatives d'épargne et de crédit (ROSCA) typiquement marocaines. Selon Bank Al-Maghrib, près de 26 % des Marocains ont recours à des solutions de financement informelles, et plus de 88 % d'entre eux utilisent des systèmes tels que le daret. Le flux annuel de ces épargnes informelles serait estimé à 40 milliards de DH, soit près de 28 % des économies collectées par les banques du pays. Pour Wadi, cette épargne non sécurisée représente à la fois un manque à gagner pour le système bancaire et une opportunité pour favoriser l'inclusion financière à grande échelle. Lire aussi | Le patron de l'AFD entame sa mission de terrain au Sahara marocain Une ambition panafricaine structurée Avec plus de 8,5 millions d'utilisateurs et quelque 350 partenaires régionaux, Money Fellows entend dupliquer au Maroc le succès rencontré en Egypte. Mais les ambitions de l'entreprise ne s'arrêtent pas là. En s'appuyant sur les dynamiques du marché nord-africain, la fintech vise à se positionner comme un acteur régional majeur de la finance numérique inclusive. Dans son entretien à Inc. Arabia, Ahmed Wadi souligne que la demande pour les services financiers digitaux devrait s'amplifier au Maroc, notamment à l'approche de la Coupe d'Afrique des Nations 2025 et de la Coupe du Monde 2030, deux événements que le pays s'apprête à co-organiser. Des rendez-vous sportifs majeurs qui pourraient booster les usages numériques. Lire aussi | Deep Tech Summit tient ses promesses et donne un coup de pouce à l'innovation Vers une finance intégrée, ancrée localement Pour Ahmed Wadi, le futur du secteur repose sur deux grandes tendances : la capitalisation sur des modèles fintechs plus frugaux, capables de générer de la rentabilité sans dépendre du capital de roulement, et l'interopérabilité croissante entre acteurs financiers via des API ouvertes. « On passe d'un modèle de croissance à tout prix à des modèles scalables et rentables », explique-t-il. Arabia. Il estime que cette évolution redéfinit les critères de succès pour les fondateurs comme pour les investisseurs. L'autre enjeu, selon lui, réside dans l'intégration fluide des services financiers au sein d'un écosystème collaboratif entre fintechs, banques et opérateurs télécoms. Cette interconnexion devrait, à terme, renforcer l'inclusion financière dans des marchés encore très fragmentés. Lire aussi | La liquidation de FERTIMA étendue à son principal dirigeant Diversifier les services au-delà de la tontine Au-delà de la tontine numérique, Money Fellows ambitionne de développer une gamme complète de services financiers. Parmi les produits à venir : solutions de paie, d'assurance, de transfert d'argent et produits d'investissement. L'entreprise entend ainsi digitaliser tout un pan de la finance informelle, en proposant des outils accessibles à une population encore en marge des circuits bancaires traditionnels. Aujourd'hui, la plateforme revendique plus de 250 000 abonnés actifs et a déjà facilité pour 50 millions de dollars d'investissements entre particuliers. Cette diversification vise à répondre aux besoins multiples des utilisateurs, tout en consolidant sa position sur un marché en mutation rapide. Lire aussi | Routes à l'intérieur de Casablanca : un nouvel appel d'offres de plus de 50 millions de DH Une trajectoire marquée par la confiance des investisseurs Ce n'est pas la première levée de fonds pour la startup. En octobre 2022, Money Fellows avait déjà clôturé une série B de 31 millions de dollars, portée par CommerzVentures, MEVP, Arzan Venture Capital et d'autres investisseurs tels que Partech et Sawari Ventures. Deux ans plus tôt, une levée de série A de 4 millions de dollars avait permis à l'entreprise de structurer ses premières phases de croissance. En combinant technologie, données et pratiques d'épargne traditionnelles, Money Fellows cherche à offrir une alternative durable aux circuits classiques. Un pari sur l'inclusion financière communautaire, qui semble désormais prêt à s'exporter au Maroc et au-delà.