Le Maroc en train de finaliser l'acquisition d'avions militaires C-390 auprès du constructeur Embraer, affirme une source brésilienne digne de foi    Les engrais phosphatés au centre du forum Lide à Marrakech, en présence de l'ancien président brésilien Michel Temer    Le marché africain de la brosserie atteindra 896 millions d'unités en 2035, tiré notamment par le Maroc    Revue de presse de ce samedi 5 juillet 2025    Les pays de l'Opep+ augmenteront leur production en août    Le Maroc réélu au Conseil de la FAO    CAN féminine: Motsepe félicite l'organisation et la contribution du Maroc    Mondial des clubs: Résultats des quarts de finale    Les températures attendues ce samedi 5 juillet 2025    Le temps qu'il fera ce samedi 5 juillet 2025    Billetterie sportive : La Sonarges s'engage à garantir un accès transparent, équitable et non discriminatoire    Décès / l'ancien arbitre international M'hammed Larache parti en discrétion forcée, dans l'indifférence et l'ingratitude !    La question du Sahara au menu d'entretiens entre le Maroc et la Russie    Après la visite d'un député LFI à Alger, Mélenchon s'exprime sur le Sahara    Alerta meteorológica en Marruecos: Hasta 46°, ráfagas de viento y tormentas de arena este fin de semana    Liberia reaffirms support for Moroccan sovereignty over Sahara    CAN 2024 femenina: Marruecos está «motivado para lograr un buen desempeño» (Jorge Vilda)    Jazzablanca s'ouvre en beauté avec Seal, Hindi Zahra et l'effervescence du village    Archéologie : Un génome établit des liens insoupçonnés entre le Maroc et l'Egypte ancienne    Belle semaine pour la Bourse de Casablanca    CIH Bank : BKGR recommande de souscrire à l'augmentation de capital    À six mois de la CAN 2025, Amine Adli n'écarte pas un départ de Leverkusen    La ministre des Affaires étrangères de l'Equateur entame sa visite officielle au Maroc par un hommage symbolique au Mausolée Mohammed V    Absences répétées des ministres : la Chambre des représentants hausse le ton    Le Libéria en tant que membre non permanent du Conseil de Sécurité continuera à soutenir l'intégrité territoriale et la souveraineté du Maroc, ainsi que l'Initiative d'autonomie comme la seule solution    La Chine et l'Union européenne tiennent le 13e cycle du dialogue stratégique de haut niveau    Li Qiang participe au sommet des BRICS au Brésil et effectue une visite officielle en Egypte    Sécurité routière: De nouvelles mesures strictes bientôt appliquées    Une filière de trafic de migrants marocains démantelée entre l'Europe de l'Ouest et l'Espagne    Madrid alloue 380 000 euros à la reconstruction au Maroc après le séisme de 2023    Poivrons marocains : une campagne prometteuse malgré les contraintes climatiques    Explosion des genres: Cubain, blues-berbère, soul… Jazzablanca démarre sur les chapeaux de roue !    Seal et Hindi Zahra magnifient le lever de rideau de Jazzablanca    Liberté d'expression et censure : le débat relancé après le concert de Toto    Casablanca en fête avec Lou Bega et Reel 2 Real au Nostalgia Lovers Festival    Le monde selon Dominique de Villepin [Par Eric Besson]    «ImagineTaVille » : La Fondation Attijariwafa bank dévoile les lauréats de la 2ème édition    L'ambassade et les consulats généraux du Maroc en France rendent hommage aux pionniers de l'immigration marocaine    Mercato : Nico Williams prolonge officiellement à l'Athletic Bilbao jusqu'en 2035    L'Equateur inaugure son Ambassade à Rabat    SM le Roi félicite Donald Trump à l'occasion de la fête nationale de son pays    Fondation Mohammed V : 13 nouveaux centres au service de la cohésion sociale    L'usine de Renault au Maroc célèbre la production de son 2000ème Mobilize DUO    CAN (f) Maroc 24 : Vilda et Chebbak confiants avant le choc face à la Zambie !    Mohamed Abdennabaoui élu président de l'Ahjucaf lors de l'assemblée de Rabat    CAN 2024 féminine : La CAF double la prime du vainqueur et augmente les récompenses    Les pays sahéliens saluent le rôle central du Maroc dans la renaissance de l'Afrique et sa valorisation de la coopération Sud-Sud    Fouzi Lekjaa intronise Achraf Hakimi en Leader des Lions de l'Atlas    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



L'Indo-Pacifique, nouveau centre de gravité du monde [ Par Eric Besson ]
Publié dans Challenge le 24 - 10 - 2023

Le 21ème siècle est, et sera, multipolaire. Aucune grande puissance ne sera plus en situation de dominer seule le monde. La « pax americana » est révolue. Il n'y a plus de « gendarme du monde », comme le montrent, en 2023, les guerres tragiques en Ukraine et au Proche-Orient notamment. Quant à l'ONU, l'espoir de la voir prévenir ou résoudre les conflits s'est (définitivement ?) évanoui.
Mais ce siècle est, et sera, marqué par la rivalité exacerbée entre les Etats-Unis et la Chine.
Rivalité politique d'abord, que chacune de ces très grandes puissances veut habiller d'un récit, d'un « narratif » pour reprendre une expression à la mode. Washington y voit un combat entre les démocraties et les régimes autoritaires. Pékin celui de la remise en cause par le « Sud global » de l'ordre mondial occidental. Rivalité économique, ensuite. A l'horizon 2050, la Chine ne se contentera pas d'être devenue la première économie mondiale. Elle veut être la puissance dominante. Ce qui entraîne la rivalité militaire. La première force militaire mondiale est toujours américaine. Mais la Chine se renforce ; elle est déjà devenue la première armée navale. Rivalité diplomatique, enfin. Face aux alliances dominées par les Etats-Unis, la Chine est à l'offensive et multiplie les initiatives (« routes de la soie », « collier de perles » etc) visant, par le financement d'infrastructures dans les pays émergents, à sécuriser ses échanges économiques et accroître son influence diplomatique.
Lire aussi | Submergés par le déluge numérique ? [Par Eric Besson]
Cette rivalité croissante américano-chinoise est à l'origine d'un nouveau concept dont un petit livre très clair d'Isabelle Saint-Mézard, enseignante et chercheuse, explique la genèse (« Géopolitique de l'Indo-Pacifique » -PUF-2022). Autrefois on disait « l'Asie ». Plus récemment « l'Asie-Pacifique ». Place donc, à présent, à « l'Indo-Pacifique », notion dont la Chine s'est d'abord moquée avant, aujourd'hui, de la récuser. Comme l'explique l'auteure, l'Indo-Pacifique est d'abord « un constat géographique » qui recouvre la « zone de confluence » entre l'Océan Indien et l'Océan Pacifique. Mais c'est surtout un concept géopolitique qui acte l'importance des échanges économiques et des flux maritimes qui transitent par cette zone, et notamment par le détroit le plus important au monde, celui de Malacca, qu'abritent la Malaisie, l'Indonésie et Singapour. L'Indo-Pacifique traduit avant tout une alliance de fait face à « l'anxiété » que génère l'affirmation chinoise, notamment auprès des Etats-Unis, du Japon, de l'Australie et de l'Inde.
Lire aussi | Vers un monde divisé en trois blocs ? [Par Eric Besson]
Le Japon est confronté à un environnement difficile, proche de pays avec lesquels il a été en guerre (Chine, Corée du Sud) ou avec lesquels il a des conflits territoriaux non réglés (Corée du Sud, Russie et surtout Chine). Doutant parfois de la capacité des USA à l'aider à se défendre en cas de besoin, craignant le déclenchement d'une guerre sur Taïwan, le Japon veut renoncer à son pacifisme et va accroître fortement ses capacités militaires. Face au « régime autoritaire chinois », le Japon s'est mis à promouvoir une « diplomatie des valeurs » et veut préserver un espace indo-pacifique « libre et ouvert », garantissant les normes de la mondialisation libérale.
Pour sa part, l'Australie, marquée par son isolement géographique, s'est toujours sentie vulnérable et vit dans la hantise d'être « abandonnée » par les Etats-Unis auxquels la lient des accords de défense et l'Occident. Elle commerce largement avec la Chine, lui accorde même une concession d'exploitation du port de Darwin, dans le nord australien. Mais elle craint la montée en puissance de ce très grand voisin et s'alarme d'un projet d'implantation potentielle d'une base militaire chinoise sur les îles Salomon, au large du Nord-Est de son territoire.
Lire aussi | Attali : 2050, un monde sans «cœur» ? [Par Eric Besson]
Depuis 2011, sous la présidence Obama, les Etats-Unis ont fait du « pivot » vers l'Asie leur axe stratégique majeur. Ils savent que là se jouent les batailles technologiques essentielles (Intelligence artificielle, 5G, semi-conducteurs etc). Ils consolident leurs alliances de sécurité (Japon, Philippines, Singapour, Corée du Sud) et s'efforcent d'améliorer leurs relations dans le sud-est asiatique (Vietnam, Indonésie etc). Ils veulent assurer la sécurité et la libre-circulation de la zone. Ils souhaitent que l'Inde, cette « grande démocratie multiculturelle » comme ils aiment la qualifier, s'implique davantage dans la stabilité et la sécurité de l'Océan Indien.
L'Inde, enfin. Géant méconnu. Auréolée de son titre historique de « plus grande démocratie du monde ». Devenue en 2022 cinquième puissance économique mondiale, malgré la faiblesse de son industrie et la grande pauvreté d'une partie de sa population. Ayant dépassé la Chine, elle est depuis 2023 le pays le plus peuplé au monde avec 1 milliard 400 millions d'habitants. Organisatrice du G20 en septembre 2023 (G20 aux résultats décevants), l'Inde, historiquement fer de lance du « non-alignement », revendique aujourd'hui son « multi-alignement » et sa solidarité avec le « Sud global ». L'Inde reste traumatisée par la partition de 1947 (naissance du Pakistan) et par sa débâcle militaire face à la Chine en 1962. Elle veille à ne rien faire de nature à provoquer la Chine avec laquelle le risque d'escarmouches sanglantes est constant, comme l'ont encore montré les combats de 2020 à la frontière du côté du Ladakh. Historiquement, l'Inde a toujours considéré que les menaces qui la guettent sont d'abord terrestres, venant du Pakistan en son Nord-Ouest et de la Chine au Nord et au Nord-Est. Mais elle craint à présent un encerclement maritime par la Chine dont elle constate la présence accrue dans l'Océan Indien et les investissements dans les ports du Pakistan, du Sri Lanka, du Bangladesh, de la Birmanie etc. Et même l'établissement d'une première base militaire chinoise en Afrique, à Djibouti.
Lire aussi | Musk, l'entrepreneur multi-planétaire [Par Eric Besson]
L'équation stratégique indienne est compliquée : elle veut tout à la fois garder de bonnes relations avec les Etats-Unis, ne susciter aucune tension avec la Chine, promouvoir le multilatéralisme. Pour l'heure, l'Inde résout plutôt bien cette équation. Toutes les puissances semblent s'accommoder de ses ambiguïtés et de son opportunisme. Dit autrement et plus simplement : personne ne veut se fâcher avec l'Inde. Tout le monde aimerait l'attirer ou la maintenir dans son jeu d'alliances. L'Inde le sait. Elle en tire habilement profit. Son premier ministre a fixé à 2047 la date à laquelle l'Inde sera pleinement développée et rayonnera. Ainsi l'Indo-Pacifique est tout à la fois un espace de coopération et un espace de compétition, sera peut-être un jour terrain de confrontation majeure. Mais en toute hypothèse, et à n'en pas douter, l'Indo-Pacifique est le nouveau centre de gravité du monde.
(*) Né au Maroc, Eric Besson est un ancien ministre français. Il fut notamment ministre de l'Industrie, de l'Energie et de l'Economie numérique sous la Présidence de Sarkozy. Coordonnateur d'un rapport «France 2025» paru en 2009, il se passionne pour la prospective et les grands enjeux de l'avenir. Eric Besson a aussi exercé de nombreuses responsabilités dans le secteur privé. Il préside aujourd'hui la filiale marocaine d'un groupe de services suisse. Il écrit cette chronique dans Challenge à titre personnel.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.