Le Kenya sans visa : nouvelle politique pour les Africains    Les dépenses du chantier de la protection sociale devraient atteindre 39 MMDH en 2025    Le Sénégal accélère sa transformation économique    Burkina Faso. La reprise économique s'accélère en 2024    Cours des devises du mercredi 16 juillet 2025    Le commerce mondial rebondit au 1er trimestre, mais l'OMC reste prudente sur les risques tarifaires    Les lauréats de l'édition 2025 d'Inwi Challenge récompensés à Rabat    Croissance, investissement, emploi, AMO... Le bilan présenté par Akhannouch    Accidents de la circulation : 24 morts et 2.944 blessés en périmètre urbain durant la semaine dernière    Découverte au Niger : une météorite martienne fait sensation aux enchères    Bijagos, trésor naturel de Guinée-Bissau, entre dans le cercle prestigieux de l'UNESCO    Coopération aérienne maroco-française : Clôture d'un exercice conjoint illustrant l'harmonie opérationnelle entre les forces aériennes    La relance du Comité de libération de Ceuta et Melilla arrive au Parlement espagnol    La SRM Casablanca-Settat améliore l'approvisionnement en eau potable de la ville de Deroua Grâce à une intervention rapide saluée par le Conseil communal    Plaidoyer international pour les Marocains expulsés d'Algérie : «50 ans et après : Non à l'oubli !»    Sahara marocain. Le parti MK et Zuma font bouger les lignes en Afrique du Sud    Cause palestinienne : Al-Tamimi salue le soutien indéfectible du Maroc    La visite de Jacob Zuma à Rabat : un signe de changement stratégique dans la position de l'Afrique du Sud sur la question du Sahara marocain    L'affaire Nacer El Djen : quand le pouvoir algérien dévore ses généraux    Trump relance l'épreuve de force commerciale, l'UE affûte sa riposte    Quand l'Algérie redessine la CAN à la gomme    Chambre des représentants: Adoption du projet de loi portant création de la « Fondation Maroc 2030 »    Mondial 2026 : lancement du programme de billetterie le 10 septembre    CAN (f) Maroc 24 : Une arbitre algérienne retire le logo de Royal Air Maroc en plein match !?    Le président du CESE reçoit une délégation de l'organisation de libération de la Palestine    Le projet de loi sur le Conseil national de la presse fracture majorité et opposition    Zapatero : «Le Maroc, un modèle de développement socioéconomique»    La reactivación del Comité de Liberación de Ceuta y Melilla llega al Parlamento español    Alerte météo Maroc : Vague de chaleur jusqu'à 47°C cette semaine    España: Detención del líder de un grupo extremista que incitó a ataques contra marroquíes en Torre Pacheco    Météo : Vague de chaleur et averses orageuses de mardi à vendredi    Beni Mellal: l'auteur du sit-in solitaire au sommet du château d'eau est décédé    Consécration : Abdelhak Najib honoré à Kigali pour la paix et le dialogue des cultures    Michoc devient supporter officiel de la Fédération Royale Marocaine de Football    Préparatifs CAN 2025 : dernier virage pour les travaux    Décès de Muhammadu Buhari : le Roi Mohammed VI adresse un message de condoléances au président du Nigeria    CAN féminine de football : le Maroc affronte le Mali en quart de finale    Crash d'Air India: L'Inde ordonne une inspection d'urgence des interrupteurs de carburant des Boeing    Cañizares : "Hakimi mérite le Ballon d'or 20 fois plus que Dembélé"    Les recettes fiscales augmentent de 25,1 MMDH à fin juin 2025    La Résidence de France à Rabat célèbre la Fête nationale en présence de plus de 2 500 invités    L'UNESCO inscrit les tombeaux impériaux de Xixia au patrimoine mondial... La Chine poursuit la valorisation de son héritage civilisationnel    Festival des Plages 2025 : Maroc Telecom donne le coup d'envoi    Inscription des tombes impériales de la dynastie Xia de l'Ouest sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO    Maroc Telecom lance la 21eédition du Festival des Plages    Lou Yixiao émerveille le public avec une tenue inspirée des femmes Hui'an de l'époque républicaine chinoise : Quand la magie du passé rencontre l'élégance contemporaine    Jazzablanca 2025 : A citywide celebration of jazz, beyond the stage    Décès de l'animateur vedette de la télévision française Thierry Ardisson    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Le mécanisme européen d'ajustement carbone aux frontières risque de faire plus de mal que de bien
Publié dans EcoActu le 10 - 09 - 2021

L'Union européenne (UE) a annoncé le 14 juillet une proposition de taxe carbone à ses frontières, qui devrait renchérir les importations de produits fortement émetteurs (acier, aluminium, ciment, électricité et engrais). Cette même taxe est déjà appliquée au sein de l'UE, qui veut désormais l'imposer aux fabricants étrangers.
En soi, le projet part d'une bonne intention. Il n'est pas motivé par le protectionnisme, mais par des préoccupations climatiques on ne peut plus justifier. Seul problème : si ce « mécanisme d'ajustement carbone aux frontières » (CBAM) est adopté en l'état, il risque de faire plus de mal que de bien. Pour trois raisons.
La première, c'est qu'il repose sur l'hypothèse fausse d'une « fuite » de carbone – autrement dit, d'une tendance de la production à forte intensité d'émissions à se déplacer vers des pays moins réglementés. Or, bien des recherches montrent que la décision pour une industrie polluante de se délocaliser ou d'investir à l'étranger répond à de nombreux facteurs, parmi lesquels la réglementation environnementale n'est pas déterminante.
Une exposition générale au risque climatique
L'idée même du risque de « fuite » de carbone doit être relativisée, comme le montrent les chiffres de l'UE elle-même. Les recettes du permis carbone appliqué depuis 2005 dans le cadre du système d'échange de quotas d'émission (SEQE), qui revient à une taxe implicite sur les émissions des gros émetteurs, ont atteint leur plus haut niveau en 2019. Soit 15 milliards d'euros, le prix moyen du carbone ayant atteint 20 euros par tonne. Or, ces 15 milliards ne représentent que 0,5 % de la valeur ajoutée des secteurs affectés. Et encore... L'estimation reste haute, la sidérurgie et l'aluminium ayant bénéfícié de quotas gratuits.
Second point faible de la taxe carbone de l'UE : elle s'écarte du principe des « responsabilités différenciées » de l'accord de Paris sur le climat. Ce traité international, entré en vigueur en novembre 2016, vise à limiter le réchauffement climatique à moins de 2 degrés Celsius à l'horizon 2030, par rapport aux niveaux préindustriels.
Tous les pays sont exposés au risque climatique, sachant que les pays pauvres sont généralement les plus vulnérables et les moins à même de s'adapter. D'où le principe des « responsabilités différenciées », qui reflète aussi les émissions plus faibles par habitant des pays pauvres, et le fait qu'ils auront tendance à en émettre davantage à mesure que leurs revenus augmenteront.
La violation de l'esprit de l'accord de Paris par l'UE
Or, les pays qui exportent les biens couverts par la taxe vers l'UE doivent payer le prix carbone européen comme référence, en tenant compte des prix carbone qu'ils appliquent en interne, le cas échéant. Mais l'accord de Paris, lui, prévoit clairement que le prix du carbone peut être inférieur dans les pays pauvres sur de longues périodes.
Qui plus est, les exportateurs des pays pauvres devront faire face à la complexité de l'autocertification des émissions de carbone directes et indirectes « intégrées » dans leurs produits, tout en assumant les coûts de certification par un expert indépendant.
Bref, la violation de l'esprit de l'accord de Paris par l'UE nuit à sa crédibilité dans d'autres domaines. Ainsi, l'UE exige dans tous ses nouveaux accords commerciaux l'adhésion à l'accord de Paris et en fait une condition pour bénéficier de l'aide au développement. La taxe carbone sera donc contestée par les pays en développement. D'ores et déjà le Brésil, l'Inde, la Chine et l'Afrique du Sud ont formellement déclaré leur opposition.
Les Etats-Unis rétifs à l'échange de quotas d'émissions
Troisième obstacle : l'Organisation mondiale du commerce (OMC) risque de subir un nouveau coup dur avec cette proposition. La taxe carbone de l'UE peut être présentée comme compatible avec les règles de l'OMC, car elle ne discrimine pas entre les entreprises européennes et les partenaires commerciaux de l'UE. Mais même si cette hypothèse est acceptée, le CBAM pose de grands défis à la structure déjà chancelante de l'OMC – avec un fort risque de représailles à l'encontre des exportateurs européens.
Le point fondamental est que l'UE ne sera que le premier membre de l'OMC à appliquer une taxe carbone à ses frontières. D'autres membres suivront, mais la couverture des produits variera en fonction de la politique intérieure de chaque membre, tout comme la structure de chaque système et mode de calcul national. Certains pays pourraient décider de tenir compte des émissions par habitant, à l'encontre des règles de non-discrimination de l'OMC.
Les Etats-Unis, deuxième plus grand émetteur après la Chine, sont rétifs à tout système d'échange de quotas d'émissions à l'échelle nationale et à la fixation d'un prix du carbone. Ils ont opté pour des réglementations fédérales et une approche décentralisée de la décarbonisation. Peut-on imaginer que les Etats-Unis assistent sans rien faire à l'instauration de taxes carbone sur leurs produits, non seulement dans l'UE mais aussi dans le monde entier ?
Le cas de l'agriculture
Le caractère sélectif de la taxe, qui ne couvre que certains secteurs dans l'UE, pose un autre défi à l'OMC. L'agriculture, qui représente environ 10 % des émissions de carbone en Europe et que l'UE subventionne largement, est exemptée du SEQE car politiquement intouchable.
Résultat prévisible : les exportateurs agricoles se joindront aux exportateurs de biens couverts par le SEQE de l'UE (certains pays comme le Canada, le Maroc et les Etats-Unis exportent les deux types de produits) pour faire valoir qu'en ne taxant pas les émissions de l'agriculture, la taxe carbone européenne aux frontières est non seulement biaisée, mais aussi injuste.
Un argument massue des partisans du CBAM porte sur l'effet d'entraînement global d'un tel accord. Pour autant, il n'est pas prouvé que les pays hors UE soient moins engagés. La Russie, le Royaume-Uni, l'Ukraine et la Suisse, quatre des dix plus grands exportateurs de produits fortement émetteurs vers l'UE, ont enregistré des réductions de leurs émissions de CO 2 par unité de PIB proportionnellement plus importantes que l'UE entre 2000 et 2016. Bref, le projet part encore une fois de bonnes intentions, mais oublie que l'enfer en est pavé.
Uri Dadush
Expert Fellow au Policy Center For The New South


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.