S'achemine-t-on vers une nouvelle crise majeure à Royal Air Maroc ? En tout cas, depuis quelques jours, le torchon brûle entre la Direction générale et les membres du bureau syndical affilié à l'Union générale des travailleurs du Maroc (UGTM). En toile de fond de ce énième bras de fer avec la Direction générale, «les mauvaises conditions de travail, les mutations arbitraires, les licenciements abusifs (pour syndicalisme) et l'absence de dialogue social». D'ailleurs, pour manifester leur mécontentement et faire entendre leurs revendications, les membres du syndicat ont fait un sit-in, dimanche dernier, au matin, au terminal 2 de l'Aéroport Mohammed V. «Cette manifestation s'est déroulée sans qu'il n'y ait eu arrêt de travail de la part du personnel de la RAM», précise toutefois le bureau syndical. Toujours est-il que la Direction semble avoir vu cette manifestation d'un très mauvais œil. En effet, dès le lendemain, cinq membres du bureau local (dont le secrétaire général) ont été suspendus de leur fonction, en attendant de passer en Conseil de discipline demain, vendredi 18 février. Des suspensions jugées «abusives», d'autant qu'elles ont été faites en parfaite «violation de la législation du travail en vigueur». Nos sources de préciser que «la Direction fait primer l'intimidation et les décisions abusives sur le dialogue constructif pour nous démobiliser, d'autant que le premier secrétaire général a été muté abusivement à Lagos, le second, trois mois seulement après sa prise de fonction, a été contraint au départ, alors que son successeur vient d'être suspendu, 4 mois après avoir pris les rênes». Ces suspensions ne semblent pas les ébranler pour autant, mais les renforcent plutôt dans leur conviction. C'est peut-être la raison pour laquelle, mardi matin, la Direction générale est revenue sur sa décision et a «levé la suspension». Toutefois, les cinq membres du personnel ont été «priés de rester à la disposition de la Direction des ressources humaines». Vont-ils effectivement réintégrer leur poste où seront–ils mutés ? On le saura demain, vendredi 18 février, date à laquelle les concernés se présenteront effectivement à la DRH. Ils ne comptent d'ailleurs pas s'y rendre l'escarcelle vide, d'autant qu'ils ont d'ores et déjà préparé leur plate-forme revendicative (voir encadré). En attendant, pour faire valoir la priorité au dialogue, un sit-in annoncé comme encore plus mobilisateur que le précédent, et qui devait avoir lieu hier, mercredi 16 février, au siège de la compagnie cette fois-ci, et auquel devait assister Hamid Chabat, secrétaire général de l'UGTM, a été annulé. Quelles suites seront données à ce mouvement de contestation ? Les deux parties s'assoiront-ils autour d'une table pour trouver un compromis durable avant que la situation ne s'envenime ? «Jusqu'à présent, toutes nos demandes d'audience pour rencontrer la Direction générale sont restées sans succès», nous confirme-t-on. De toute évidence, si les différents protagonistes ne mettent pas de l'eau dans leur vin, on peut craindre des perturbations majeures au sein de la compagnie. Une compagnie qui ne peut, encore une fois, se payer le luxe d'un désordre social qui pourrait s'avérer, au final, très coûteux. L'on se rappelle, à ce titre, la situation critique dans laquelle elle était il y a juste un an, du fait notamment des grèves à répétition, de la conjoncture défavorable, mais également du partenariat avorté avec Air Sénégal International et de la mauvaise préparation de l'open sky. Et, pour sortir temporairement la RAM de la zone de turbulences, l'Etat a été obligé de racler les fonds de tiroir afin de pouvoir mettre en place un contrat-programme 2010 – 2013 relatif au développement du transport aérien domestique. Ainsi, 300 millions de dirhams sont à débourser (soit 25% de l'investissement requis pour la nouvelle flotte), à raison de 100 MDH par an sur la période 2010 – 2012. Histoire d'accompagner, en particulier, la compagnie nationale dans la création de RAM Express et, plus globalement, le processus d'intégration régionale tout en dynamisant le tourisme intérieur. David William * Ce qu'ils revendiquent • La liberté syndicale. • La levée de l'embargo sur les membres du bureau de l'UGTM. • L'ouverture du dialogue pour régler les différends. • La réintégration des agents licenciés et ceux contraints au départ forcé. • L'amélioration des conditions de travail à RAM Express. • L'intégration du personnel navigant commercial (PNC) Atlas Blue à la RAM avec le même statut que le PNC RAM. • La révision du contrat initial du personnel Atlas Multiservice et son ajustement selon les besoins du dit personnel. • La cessation du harcèlement du PNC RAM et des sanctions abusives liées aux programmes des vols. • La mise à niveau des échelles par rapport à l'ancienneté. • La dissolution de la société Aérotechnique Industrie afin d'arrêter les dépenses abusives. • La gestion du PNC par une personne du métier. • Le droit aux congés maladie. • Le respect du congé annuel selon le planning et les demandes des agents…