La révision des règles comptables bancaires de Bâle II, initiée par le comité du même nom, est au cur des débats. Objectifs, impact, ressorts Autant de points qui attendent des éclaircissements dans un environnement où linformation est primordiale pour la prise de décision. Lanalyste Pierre Henri Cassou a essayé, lors dune récente conférence-débat à Casablanca, dapporter quelques éclairages. LISCAE (Institution Supérieur de Commerce et dAdministration des Entreprises) a organisé en collaboration avec lAMC (Association Marocaine de Comptabilité), une conférence-débat, le 26 novembre à Casablanca, sur le thème «Réformes comptables et prudentielles des banques». La conférence a été animée par Pierre Henri Cassou, associé au cabinet Deloitte Touche Tohmatsu. Le spécialiste a, demblée, tenu à présenter le contexte des réformes comptables préconisées par le comité de Bâle. Il a ainsi précisé les raisons des réformes en évoquant le fait que la profession bancaire exerce dans un environnement évolutif. Les techniques, les risques subis, les modes de gestion , bref, toute lactivité bancaire est sujette à des mutations puisque les banques sont, avant tout, des entreprises commerciales qui nopèrent pas dans un environnement isolé. Elles travaillent, en effet, avec des entreprises en constante évolution. Cest pourquoi elles ont besoin dune meilleure efficacité et de plus de transparence. Cassou estime normal que le cadre régissant et réglementant la profession évolue dans les mêmes termes. Après lanalyse du pourquoi des réformes, le conférencier sest arrêté sur le «pour qui», faisant remarquer que tous les agents économiques ont intérêt à ce quil y ait des réformes. Dabord, pour la clientèle, un système bancaire réformé est plus efficace, plus solide et offre des produits de qualité. Ensuite, pour les actionnaires qui ont tout autant intérêt à ce que leurs entreprises fonctionnent bien. Le personnel des banques a également intérêt à prospérer dans un cadre propice à son épanouissement. Enfin, les banques elles-mêmes sont impliquées puisquelles font partie du système. En effet, ce dernier est touché par un phénomène dinterdépendance, cest-à-dire que les établissements bancaires sont les seules entreprises à être à tout moment «le client et le fournisseur de leurs concurrents». Elles sont, à travers le système de paiement et de placement, les créancières et les débitrices de leurs concurrents. Quels sont les objectifs de la réforme ? Cest ainsi que dès lors quil y a cette interdépendance, il y a un besoin de sadapter à des normes communes. Pierre Henri Cassou affine son approche en mettant laccent sur les ressorts des règles. Pour lui, les règles applicables au secteur bancaire ne sont pas toujours des initiatives émanant des autorités publiques. «Dans le domaine bancaire et financier, on saperçoit que le gouvernement et les autorités publiques ne sont pas les seuls à intervenir. Par exemple, pour les règles prudentielles comptables, dautres instances sont intervenues, à linstar du comité du Bâle et du GAFI (Groupe dAction Financière pour le blanchiment des capitaux). Ces instances nont pas de pouvoir juridique, cest-à-dire pas de capacité à édicter des normes. Cependant, comme ce sont des instances qui réunissent des membres du domaine, notamment des banquiers, leurs actions acquièrent de la légitimité», explique le conférencier qui sattarde ensuite sur lobjectif des réformes. Celles-ci ont pour principale mission de permettre lélaboration dun jeu de normes comptables de haute qualité fournissant une information financière fiable et transparente et pouvant ainsi aider les intervenants sur les marchés des capitaux dans le monde dans leurs prises de décisions économiques. Cassou insiste sur le fait quil ne sagit pas uniquement de changer la réglementation comptable, mais dadopter une nouvelle logique de mesures de performance. Les réformes comptables non encore achevées sont passées par des étapes successives. Bâle I prévoyait ainsi uniquement le risque du crédit avant dinclure le risque du marché. Actuellement, Bâle II introduit des règles prudentielles avec une série doptions dans les modes de calcul. Un Code sur le fonctionnement et la conformité Pierre Henri Cassou a indiqué quil y a dautres sujets importants à traiter, notamment la lutte contre le blanchiment dargent et le terrorisme. En effet, le secteur bancaire évite de simpliquer dans des situations de blanchiment dargent. Un phénomène qui a été évalué par les institutions internationales à des milliards de dollars chaque année. Il faudrait donc trouver les moyens de préserver le système bancaire contre ces risques. Cest dailleurs dans ce cadre qua été créé le GAFI, qui a publié une quarantaine de recommandations dans ce sens et qui ont fait lobjet dune révision en juin 2003. Le comité de Bâle a publié en octobre 2003 un code sur «le fonctionnement de conformité». Il a aussi été à lorigine dune série dautres initiatives, notamment le renforcement, la mise en conformité, la maîtrise des risques du crédit ainsi que du risque opérationnel et lamélioration de linformation financière. Le conférencier a exposé les motivations de la réforme initiée. La raison essentielle est due au fait que Bâle I ne tenait pas compte du risque opérationnel. Puisque le contexte, où Bâle I avait été élaboré, a évolué, il sest avéré nécessaire dapporter des modifications à ces règles comptables. Cassou a notamment mis laccent sur le fait quun défaut dans lorganisation interne peut causer un dysfonctionnement de toute une institution. Il a aussi expliqué que les réformes comptables, dont on parle, font référence à la solidité de lentreprise. Il ne faut donc pas faire de confusion. Un instrument de réglementation comptable ne peut pas être une réponse globale à des problèmes macro-économiques, notamment le financement de léconomie. Le conférencier a, enfin, rappelé que «nous vivons collectivement dans une époque où les systèmes, les méthodes et les règles ne peuvent que sunifier. Par conséquent, plusieurs pratiques ont besoin de sapprocher».