Hespress a appris, de sources bien informées, que des déclarations de soupçon visant deux agents immobiliers et un comptable indépendant ont déclenché l'intervention des équipes de contrôle relevant de l'Autorité nationale du renseignement financier (ANRF), dans le cadre d'une enquête portant sur des soupçons de blanchiment de capitaux à grande échelle, par le biais de la surenchère artificielle de prix de fonds de commerce. Selon les mêmes sources, les cas signalés sont concentrés entre Casablanca et Marrakech, et concernent des actifs liés à des salons de coiffure, des centres de soins esthétiques, des restaurants ainsi que des cafés. Les sources soulignent que les investigations des contrôleurs sont toujours en cours afin d'identifier les parties impliquées dans ces transactions suspectes, et de déterminer leurs connexions tant au niveau national qu'international, certains protagonistes disposant à la fois de la nationalité marocaine et de nationalités étrangères. Les déclarations de soupçon contiendraient des informations précises, ayant renforcé les doutes des enquêteurs sur l'existence de cas avérés de blanchiment d'importantes sommes d'argent, provenant de sources inconnues. Ce soupçon est conforté par la localisation des commerces en question, situés dans des zones où l'activité économique n'est pas suffisamment dynamique pour justifier les prix de vente déclarés ni leur valeur réelle sur le marché. Les opérations de cession auraient été conclues au moyen de contrats sous seing privé, auprès de bureaux d'adouls, en vue de compléter ultérieurement les procédures de transfert de propriété auprès des greffes des tribunaux de commerce. Nos sources insistent sur l'implication de comptables ayant facilité ces opérations suspectes en exploitant leur expertise ainsi que leurs relations avec certains fonctionnaires, afin de faire passer des dossiers de transfert et de modification des données de propriété, en conformité avec les dispositions légales en vigueur. Toujours selon les sources de Hespress, les enquêteurs de l'Autorité nationale du renseignement financier ont relevé, au cours de leurs investigations, des indicateurs révélateurs. Parmi eux : l'acquisition des fonds de commerce concernés par des sociétés nouvellement créées, opérant à travers des comptes bancaires affichant une activité soutenue, marquée par des dépôts quotidiens fréquents, enregistrés à peine quelques semaines après la prise de possession desdits actifs. Les montants en espèces déposés sur ces comptes ont éveillé la méfiance des chargés de clientèle de plusieurs agences bancaires, d'autant plus que les secteurs d'activité concernés ne justifient en rien le niveau de revenus affiché par ces établissements. Les enquêteurs ont également constaté que les entreprises suspectées prennent soin de se conformer formellement aux obligations administratives, en ouvrant des comptes courants, en déclarant des employés auprès de la Caisse nationale de sécurité sociale, et en simulant des transactions avec des fournisseurs présumés, qui effectuent chaque semaine des prélèvements importants à l'aide de chèques encaissables. Les mêmes sources révèlent également que l'échange d'informations entre l'Autorité nationale du renseignement financier, la Direction générale des impôts, l'Office des changes ainsi que l'Administration des douanes et impôts indirects a permis de détecter des opérations d'acquisition, en grand nombre, de véhicules utilitaires enregistrés au nom des fonds de commerce nouvellement acquis. Ces véhicules ont été intégrés aux charges générales dans les déclarations fiscales des entreprises suspectées, sans que cela corresponde au volume réel de leur activité, ni à la localisation des établissements concernés. Il convient de rappeler que la loi n° 15.95 portant Code de commerce encadre les opérations de vente de fonds de commerce à travers son article 81, lequel stipule que : « La vente ou la cession d'un fonds de commerce, ainsi que son apport en société, son partage ou sa vente aux enchères, s'effectuent par acte authentique ou sous seing privé. Le prix de vente est déposé auprès d'un organisme habilité légalement à recevoir des dépôts. Le contrat doit indiquer le nom du vendeur, la date, la nature de la cession et son prix, avec une ventilation entre les éléments incorporels, les marchandises et le matériel. Il doit aussi mentionner la situation des privilèges et hypothèques grevant le fonds, ainsi que, le cas échéant, les informations relatives au bail (date, durée, montant actuel du loyer, nom et adresse du bailleur), en plus de l'origine de la propriété du fonds de commerce ».