a appris de sources bien informées que les services d'inspection relevant de l'Office des changes s'apprêtent à lancer une enquête de grande envergure sur d'importants transferts opérés par des parieurs marocains vers des comptes affiliés à l'application russe 1xBet, spécialisée dans les paris sportifs en ligne. Ces transactions auraient été effectuées via des cryptomonnaies interdites au Maroc, principalement l'USDT (Tether) et le Bitcoin, échappant ainsi à tout contrôle des autorités financières. Selon les mêmes sources, cette initiative intervient après que les services de contrôle de l'Office des changes ont mis au jour des transferts illégaux de fonds, effectués par des « dealers » marocains, pour un montant dépassant 7,2 millions de dirhams (720 millions de centimes), au profit de l'application précitée. Les services de l'Office des changes ont accordé un caractère urgent à ces nouvelles investigations. Le dossier des flux financiers liés à 1xBet a été transmis à la Direction de la réglementation et des affaires juridiques afin que les mesures adéquates soient prises. L'application russe permettrait en effet aux utilisateurs de régler leurs mises et de percevoir leurs gains en cryptomonnaies, après dépôt dans des portefeuilles numériques (wallets crypto). Les enquêteurs ont déjà commencé à collecter des données préliminaires sur l'ampleur des transactions en cryptomonnaies dans le domaine des paris en ligne au Maroc, avant d'entamer l'identification des circuits de conversion de ces actifs en dirhams marocains. Certaines de ces plateformes de conversion restent à ce jour inconnues des autorités de régulation financière. D'après les informations recueillies par Hespress, les services d'inspection de l'Office des changes travaillent en coordination avec Bank Al-Maghrib (BAM), l'Autorité marocaine du marché des capitaux (AMMC), ainsi qu'avec le ministère de l'Économie et des Finances, via la Direction générale des impôts et l'Administration des douanes et impôts indirects. Cette collaboration vise à identifier les parieurs marocains impliqués dans ces opérations, réalisées en dehors des circuits autorisés par la réglementation des changes, laquelle impose des autorisations préalables pour tout transfert de fonds vers l'étranger et plafonne les paiements en devises effectués via cartes bancaires internationales. La valeur exacte de ces transferts reste pour l'heure difficile à évaluer, tout comme les chemins empruntés par ces fonds, notamment parce qu'ils échappent à toute imposition, l'activité de l'application russe n'étant pas légale au Maroc. Fouzi Lekjaa, ministre délégué auprès de la ministre de l'Économie et des Finances chargé du Budget, a pour sa part vivement dénoncé l'activité de 1xBet, qu'il accuse de siphonner des milliards de dirhams en devises étrangères. Lors d'une réunion de la Commission des finances et du développement économique à la Chambre des représentants, il a qualifié les méthodes de l'entreprise russe d'« irrégulières », soulignant que le secteur des jeux est réglementé de manière claire au Maroc, et que les entreprises nationales s'acquittent de leurs obligations fiscales, lesquelles atteignent environ 2,5 milliards de dirhams par an. Selon les sources de Hespress, les nouvelles investigations des contrôleurs de l'Office des changes s'appuient sur des données transmises par le département des études et statistiques. Ces données établissent un lien entre les pratiques de 1xBet au Maroc et l'utilisation de systèmes de paiement non réglementés et opaques, facilitant ainsi des transferts financiers suspects en dehors du cadre légal des opérations de change. Les mêmes sources indiquent que plusieurs utilisateurs ont signalé en ligne des difficultés à retirer leurs gains de l'application, renforçant les soupçons quant à une activité qui ne se limiterait pas aux paris sportifs, mais qui servirait également à faciliter la circulation de fonds illicites, en exploitant des failles bancaires et réglementaires. Il convient de rappeler que le wali de Bank Al-Maghrib, Abdellatif Jouahri, avait annoncé à la fin de l'année dernière que le cadre réglementaire encadrant les cryptomonnaies (un projet de loi) était « prêt ». Il avait alors affirmé que « la Banque centrale a tenu son engagement en travaillant de manière concertée avec toutes les parties concernées », tout en se gardant de dévoiler les grandes lignes du texte. Il avait précisé que « le texte juridique est désormais disponible, et que ses textes d'application sont en cours de préparation », ajoutant que ce travail avait été accompli avec le soutien technique conjoint du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale, et avec la participation de l'ensemble des acteurs et ministères concernés.