Le ministre de la Santé et de la Protection sociale, Amine Tahraoui, a affirmé mardi devant la Chambre des conseillers que le diagnostic du secteur de la santé met en évidence à la fois des réalisations notables et des insuffisances structurelles chroniques accumulées au fil des décennies, ce qui a rendu nécessaire une réforme en profondeur et d'envergure. Lors d'une réunion de la Commission de l'enseignement, des affaires culturelles et sociales, consacrée à l'examen de la situation du système de santé au Maroc, le ministre a précisé que « le gouvernement a engagé, dans cette optique, le chantier de la réforme du système national de santé, considéré comme une priorité nationale et un pilier essentiel dans la construction de l'État social et la réduction des disparités territoriales ». Il a rappelé, à cet égard, l'adoption de la loi-cadre n°06.22, qui « constitue une véritable feuille de route juridique et organisationnelle pour la mise en place d'un système de santé équitable, moderne et performant ». Tahraoui a ensuite détaillé les efforts entrepris pour la modernisation du secteur, soulignant que la réforme repose sur quatre piliers majeurs : les infrastructures, les ressources humaines, la gouvernance et la digitalisation. Concernant le volet des infrastructures, le ministre a mis en avant une vision stratégique visant la création de centres hospitaliers universitaires (CHU) dans l'ensemble des régions du Royaume. Il a rappelé qu'en 2022, le Maroc ne comptait que quatre CHU, situés à Rabat, Oujda, Fès et Casablanca. Depuis, d'importants progrès ont été réalisés selon Tahraoui. Il s'agit du CHU Mohammed VI de Tanger qui a ouvert ses portes, tandis que ceux d'Agadir et de Laâyoune devraient être inaugurés avant la fin de l'année. D'autres établissements universitaires verront également le jour, notamment le nouveau CHU Ibn Sina à Rabat, ainsi que des hôpitaux similaires à Guelmim, Errachidia et Béni Mellal. Le ministre a insisté sur « l'importance stratégique de ces infrastructures », qui permettront d'élargir l'offre de soins, d'améliorer l'accès aux services médicaux spécialisés et de renforcer la couverture hospitalière dans toutes les régions du pays. S'agissant des établissements de soins de santé primaires, Tahraoui a indiqué que son département met en œuvre un programme ambitieux de réhabilitation de 1.400 centres de santé répartis sur l'ensemble du territoire national, dont les deux tiers situés en milieu rural. « À ce jour, 1.000 centres ont déjà été rénovés », a-t-il précisé, ajoutant que les 400 restants seront achevés avant la fin de l'année. Dans certaines régions, les taux de couverture atteignent déjà 66 %. La prochaine phase de ce programme portera sur la réhabilitation de 1.600 centres supplémentaires, ce qui portera à plus de 3.000 le nombre total de structures modernisées à l'échelle nationale. L'objectif, selon le ministre, est d'instaurer « des normes modernes et unifiées pour ces établissements, véritables portes d'entrée des citoyens vers des services de santé de qualité, accessibles et organisés ». En ce qui concerne les hôpitaux régionaux, provinciaux, de proximité et spécialisés, le ministre a précisé que la réforme inclut leur rénovation ou reconstruction. Entre 2022 et 2025, 22 projets ont déjà été réalisés, représentant 2.433 lits, tandis que 24 nouveaux projets, d'une capacité de 2.273 lits, devraient être livrés entre 2025 et 2026. Abordant le volet des ressources humaines, Tahraoui a mis en avant la vision réformatrice du gouvernement, fondée sur la création de quatre nouvelles facultés et instituts de santé et l'augmentation du nombre de places pédagogiques. Ainsi, le nombre de places dédiées à la formation des médecins généralistes est passé de 2.650 en 2019 à 6.414 en 2025, tandis que celui des instituts de formation en soins infirmiers est passé de 2.735 en 2019 à 9.500 en 2024. En matière de gouvernance, le ministre a annoncé la publication des textes réglementaires relatifs à la Haute Autorité de Santé et le lancement du processus de sélection de ses membres « selon des critères stricts de compétence et de professionnalisme ». Il a également évoqué la mise en œuvre de l'Agence marocaine du médicament et des produits de santé, à travers la digitalisation des procédures, ainsi que celle de l'Agence marocaine du sang et de ses dérivés, qui bénéficiera d'une réorganisation complète des banques de sang et d'un plan d'investissement ambitieux pour mieux encadrer la collecte au niveau national. Le ministre a également souligné les progrès réalisés dans le domaine de la digitalisation, à travers l'unification du système d'information sanitaire dans 3 CHU, 20 hôpitaux et 294 centres de santé. Il a annoncé la mise en place du dossier médical partagé, qui permettra un suivi sécurisé et harmonisé du patient dans les différentes structures sanitaires. De plus, les services de télémédecine sont en cours de généralisation dans plusieurs régions via des unités mobiles équipées, garantissant ainsi un accès direct aux soins pour les populations rurales et isolées. À l'issue de la présentation, les membres de la Commission ont salué les efforts considérables déployés par le gouvernement, notamment en matière de construction et d'équipement des hôpitaux universitaires et régionaux, ainsi que la modernisation des infrastructures sanitaires. Ils ont également mis en avant l'augmentation du budget du ministère, passé de 19 milliards à 32,5 milliards de dirhams, soulignant qu'il s'agit d'un effort financier conséquent, bien qu'« CH». Cependant, plusieurs membres ont relevé que « le citoyen ne ressent pas encore pleinement les retombées concrètes de ces avancées, malgré l'importance des ressources allouées ». Ils ont ainsi appelé le gouvernement à renforcer la communication autour des réalisations du secteur et à trouver des solutions urgentes à la pénurie de personnel médical, notamment par le redéploiement des effectifs, la mise en place de partenariats avec les collectivités territoriales, ou encore l'intégration des diplômés du privé. Ils ont également insisté sur la nécessité d'accroître les incitations financières pour attirer les compétences marocaines à l'étranger, et de renforcer les mécanismes de suivi et de contrôle dans toutes les structures sanitaires, afin de garantir une utilisation efficiente des fonds publics et des services de santé de haute qualité au profit des citoyens.