Dons artificiellement surévalués, aides fictives et factures gonflées... La Direction générale des impôts (DGI) a déclenché une opération de contrôle visant des milliers d'entreprises suspectées d'avoir utilisé la générosité publique comme paravent pour réduire illégalement leur charge fiscale, apprend-on de nos sources. Alors que les dons aux associations reconnues d'utilité publique sont encouragés par la législation fiscale marocaine, certaines entreprises auraient fait de ce dispositif un levier d'optimisation abusive. Informée par des signaux d'alerte internes et des analyses de risque affinées grâce à l'intelligence artificielle, la DGI a ouvert une série de contrôles considérés en interne comme « qualitativement sensibles ». Selon des sources bien informées de Hespress, la première phase de cette opération cible trois pôles économiques majeurs, notamment Casablanca, Rabat et Tanger, où les inspecteurs se concentrent sur les dons déclarés au titre des quatre derniers exercices comptables. Les vérifications portent en particulier sur la valeur des biens donnés, un terrain propice aux dérives. Les mêmes sources ont affirmé que la DGI a déjà isolé un échantillon initial de 8.000 entreprises, dont le chiffre d'affaires cumulé frôle les 35 milliards de dirhams. Les montants potentiellement détournés via des manipulations de dons atteindraient 23 millions de dirhams. Les services d'audit ont notamment repéré des hausses injustifiées sur les factures relatives aux dons en nature, dont matériel informatique, fournitures diverses ou biens de consommation, offertes à certaines associations de la société civile. En gonflant artificiellement la valeur déclarée, certaines entreprises seraient parvenues à récupérer illégalement des déductions représentant des sommes considérables. Dans plusieurs cas, l'absence de justificatifs clairs a poussé les inspecteurs à se déplacer sur le terrain pour vérifier l'existence réelle des dons et de leurs bénéficiaires. Une démarche exceptionnelle, justifiée par la résistance de certaines sociétés à transmettre les documents requis. Il est à préciser que le mécanisme de déduction des dons est prévu par l'article 10 du Code général des impôts, qui permet aux entreprises de retrancher de leur résultat net les contributions financières ou matérielles versées à des associations d'utilité publique, dans la limite de 0,5% du chiffre d'affaires. Cependant, cette disposition doit reposer sur la transparence. Les dons doivent être réels, tracés, documentés et versés à des organismes agréés. Or, les récents contrôles montrent que certaines structures ont tenté d'en faire un outil d'évasion fiscale plutôt qu'un acte de solidarité. D'après nos informations, la DGI prépare déjà une seconde vague de vérifications, plus ciblée encore, avant la fin de l'année. Cette nouvelle phase portera autant sur la véracité des dons que sur la conformité des montants déduits au regard de la loi. Les inspecteurs devront s'assurer que les bénéficiaires existent réellement, que les dons ont été effectivement remis et correctement utilisés, et que les entreprises n'ont pas dépassé les plafonds de déduction autorisés.