Inwi lands Medusa submarine cable in Nador    CAN au Maroc : Des Fan Zones dans les aéroports du Royaume    Cierre de escuelas en el norte de Marruecos debido a condiciones meteorológicas adversas    Mohammed El Bazzazi: de las montañas marroquíes a los estadios de la Copa Árabe    Under royal instructions, Interior Ministry boosts preparedness for incoming winter storms    Intempéries : la suspension des cours prolongée à Chefchaouen    Hafid Douzi se retire de la chanson officielle de la CAN 2025    Intempéries : La SRM-CS déploie un dispositif d'urgence face aux fortes pluies    Barid Al-Maghrib émet un timbre-poste commémoratif célébrant le centenaire du Notariat au Maroc    Suspension des liaisons maritimes entre Tarifa et Tanger en raison du mauvais temps    Bayer Maroc célèbre 20 ans d'excellence industrielle à l'usine de Casablanca et renforce le rôle du Maroc comme hub régional de santé    L'éducation au cœur des priorités... la Chine trace les contours d'une nouvelle approche de l'éducation morale des enfants    Nicolas Sarkozy menacé par un nouveau procès, Carla Bruni également visée    La Banque confédérale du Sahel voit le jour    Les Emirats arabes unis expriment leur solidarité avec le Maroc après les inondations meurtrières à Safi    Bourita : le Maroc réagit à toute agression raciste visant ses ressortissants en Espagne    The Best FIFA Awards 2025 : Hakimi parmi les footballeurs distingués ce mardi    CAN 2025 : Plus d'un million de billets vendus, la CAF promet «la meilleure édition de l'histoire»    CAN 2025 : Les Lions de l'Atlas démarrent fort leur préparation pour l'ouverture contre les Comores    Immigration : un test civique, pour les étrangers souhaitant s'installer en France    Inondations meurtrières à Safi : le ministère de la Santé déclenche une phase d'urgence puis un plan de proximité    Bank Al-Maghrib maintient son taux directeur inchangé à 2,25%    IPO SGTM : un record de participation et un rôle clé pour Attijariwafa bank    Sur Hautes Instructions Royales, la Fondation Mohammed V pour la Solidarité lance l'opération « Grand Froid »    Soutien aux TPME : L'Exécutif mise sur l'ancrage territorial pour la fin de mandat    Patrimoine musical : Le Mali honore Sidiki Diabaté    Eurovision : 35 pays participeront à la prochaine édition    Bureau Marocain Droits d'Auteur : Des élections bouclées, entre espoirs et critiques du milieu artistique    Achraf Hakimi et Hassan Hajjaj ouvrent le café éphémère «Juj» à Casablanca    Températures prévues pour mercredi 17 décembre 2025    Visite du Conseil national pour le développement économique et social équato-guinéen à Rabat    Football féminin : la FRMF lance un nouveau chantier de formation et des tournées d'inspection    USA : Trump classe le fentanyl comme « arme de destruction massive »    Les deux soldats américains tués en Syrie identifiés comme des sergents de la Garde nationale de l'Iowa    USA : le Sénat se prépare à la perspective d'un nouveau « shutdown » en janvier    Conflit Thaïlande-Cambodge: Bangkok estime que Phnom Penh doit annoncer "en premier" un cessez-le-feu    Dimiter Tzantchev salue le développement remarquable des relations économiques entre le Maroc et l'UE    La Chambre des représentants adopte à l'unanimité trois projets de loi relatifs à la justice    Ahmed Toufiq : « Le Maroc dispose d'une expérience pionnière dans la jurisprudence en matière des questions de la famille »    Revue de presse de ce mardi 16 décembre 2025    CA FIFA 2025/Arbitrage : le Suédois Glenn Nyberg pour la finale Maroc-Jordanie    Quand l'entraîneur marocain devient un label de réussite    inDrive x Burger King : Célébrer le football là où tout commence    Université Rovira i Virgili de Tarragone : création d'une Chaire d'études sur le Maroc pour renforcer les liens euroméditerranéens    Inondations à Safi : l'hôpital Mohammed V active son plan d'urgence    Interview avec Ouenza : « Ce n'est pas parce que je porte du rose que je n'ai pas fait de l'underground »    Mode. Le caftan marocain à l'honneur en Azerbaïdjan    Trois prix pour «La mer au loin» au 21e Festival international cinéma et migrations    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



PARITION : «Zoli» de Colum McCann Le temps des tziganes
Publié dans La Gazette du Maroc le 31 - 07 - 2007

L'auteur du «Chant du Coyote» et des «Saisons de la nuit», publie un livre poignant sur les Tziganes, à travers le portrait d'une grande chanteuse qui répond au nom de Zoli. Poétesse prolifique et troubadour épique, cette femme est élevée au rang d'une divinité sous la plume inspirée d'un écrivain de grand calibre.
Son dernier roman «Danseur» retraçait la vie du danseur Rudolf Nureev. Avant d'écrire ce livre, l'écrivain irlandais, qui vit aux USA, ne savait rien du monde des ballets, de la danse classique et de l'opéra. Ce portrait aura été un voyage initiatique pour découvrir ce monde. «Au lieu d'écrire sur ce que je connais, je préfère travailler sur ce que je ne connais pas. Je me documente, je cherche et je finis par apprendre en écrivant», confesse Colum McCann, invité cette semaine de Metropolis sur Arte. Comme pour les «Saisons de la nuit», l'auteur se devait de plonger dans un univers inconnu, étranger à la sphère de sa vie. Plusieurs mois avec les Tziganes, plusieurs séjours en Tchéquie, Slovaquie et en Pologne, pour mettre la main sur Zoli, personnage merveilleux, épique, mythologique presque. Et Zoli a cette grâce naturelle des chantres qui évoluent à nos côtés en drapant nos univers, souvent ternes, de tant de lumière. Ses poèmes racontent l'amour, la solitude, les départs et les retrouvailles, la patience de ceux qui restent.
Les Rom, peuple grandiose
Dans un des passages de ce livre manifeste, on sent Colum McCann, en retrait, ne prenant jamais sur lui d'expliquer une nation, une identité qu'il vient à peine de découvrir. Il reste à l'écart, observe, raconte ses sentiments, mais ne se fait jamais le porte-voix des malheurs et douleurs des Rom : «En repensant à cet après-midi-là, je retrouve le goût de ce à quoi nous avions cru : la révolution, l'égalité, la poésie. Assis autour de la table, nous avons laissé les heures s'écouler. Zoli gardait la tête légèrement inclinée, sans jamais toucher à son verre. Elle débita à toute allure quelques couplets des vieux chants. C'était du slovaque, avec une ferveur rêche, indomptée : elle n'avait pas l'habitude de “réciter”. Ces choses-là, elle les chantait. Certains vers étaient répétés plusieurs fois, à des moments choisis, ce qui créait un style particulier, déclamatoire, empreint finalement de tristesse. C'étaient d'amers récits de trahison, aux couplets récurrents, comme des feuilles d'automne qui forment des couchent les unes sur les autres. Une fois terminé, elle a croisé les doigts en regardant droit devant elle» (Page 79). Très vite, nous sommes mis dans le bain, dans cette Tchécoslovaquie de1930. Un lac gelé, un bataillon fasciste qui rassemble une communauté tzigane. La glace qui finit par craquer alors que les roulottes s'enfoncent dans l'eau. Seuls en réchappent Zoli, six ans, et son grand-père, Stanislaus.
Et tout le récit est une épopée de la vie et du parcours de cette jeune Zoli qui deviendra une figure tutélaire de la culture tzigane. Par plusieurs degrés, ce magnifique roman ressemble au film d'Emir Kusturica, «Le temps des Gitans». Mais, avec, chez Colum McCann, cette distanciation, ce recul, ce regard du dehors, à la fois discret et modeste de celui qui ne sera jamais Rom, mais qui peut raconter une histoire de Rom.
L'Europe face à l'oubli
Alors pour lire l'histoire de Zoli, il faut voyager, avoir le souffle long, une haleine de montagnard et de grimpeur. Il faut sillonner les plaines de Bohême jusqu'à la France, en passant par l'Autriche et l'Italie. Il faut traverser plus de 80 ans, des années trente à nos jours, pour lire une magnifique histoire d'amour, de trahison et d'exil, tout sur fond de l'esquisse du portrait d'une femme hors du temps. Zoli marche, grandit, vit et les bouleversements politiques dans l'Europe du XXe siècle font écho à son parcours jalonné de rets, de privations, d'amours, de perditions et de tant de patience et de sagesse. Sur ce chemin, Zoli trouve les mots pour donner forme à son univers. C'est le poète communiste Martin Stránsk qui va la remarquer et tenter d'en faire une icône du parti. Mais c'est sa rencontre avec Stephen Swann, Anglais exilé, traducteur déraciné, qui va sceller son destin. Zoli est un oiseau rare et libre. Personne ne peut la posséder. Aucun amour autre que sa poésie ne peut l'habiter. Swann devra le savoir. Et la femme devient alors, malgré elle, dans le récit de McCann le symbole de la liberté d'un peuple qui ne sera jamais assujetti. Et là, il y a les souvenirs, la mémoire qui fait son travail à la fois de sape et de déstructuration du vécu, comme dans ce passage du roman : «Il y a des choses qu'on peut voir et entendre - encore aujourd'hui, longtemps après : les fosses qu'on creusait, la terre qui tremblait, les oiseaux qui ne volent plus au-dessus de Belsen, ce qui est arrivé à nos frères de Tchéquie, soeurs de Pologne, cousins de Hongrie, quand nous autres Slovaques avons survécu, bien qu'ils nous aient frappés, torturés, jetés en prison. Ils nous ont volé notre musique, nous ont bouclés en camp de travail, Hodonin et lety et Petic, les couvre-feux impossibles, les couvre-feux à l'intérieur des couvre-feux, et les crachats dans la rue. On parlera des écussons cousus sur les manches, du Z qui nous coupait le bras en deux, des brassars rouge et blanc - des chiens bien gras autour des camps, des morts aux poils brunis par le Zyklon B, des pantoufles tissées avec nos cheveux, des fanions de peau d'homme sur les fils barbelés. On peut savoir tout ça et plus. Ce qui est arrivé à un seul d'entre nous, est arrivé à tous les autres, mais rien n'est plus présent dans ma mémoire que ce jour où Grand-Père, Stanislaus, a été arrêté dans les ruelles grises de Bratislava par un grand soldat blond». Du fait, Zoli est un livre sur la mémoire d'un peuple. Une communauté livrée à elle-même et toujours persécutée parce qu'elle échappe aux moules des systèmes politiques d'une Europe aseptisée.
Colum McCann fait le ménage en restituant à Zoli sa force, sa particularité de femme porteuse de la parole d'un peuple et d'une identité que l'on veut annihiler. Un hommage aux individualités, à la poésie, aux sources de l'enracinement humain.
Zoli, Colum MacCann Belfond, 328 pages,
300 dhs


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.