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Abdelaziz Benyaïch, entre les mains du juge Garzon
Publié dans La Gazette du Maroc le 28 - 07 - 2003


Conclusion d'un rapport espagnol
L'un des grands noms du terrorisme marocain lié à Al Qaïda, l'un des principaux impliqués dans les attentats du 16 mai à Casablanca, Abdelaziz Benyaïch (voir La Gazette du Maroc numéro 322), fait aujourd'hui partie des 35 terroristes les plus recherchés dans le monde. Mercredi 24 septembre, l'Espagne a publié un rapport dont les conclusions font peur : les attentats du 11 septembre ont été préparés en Espagne, à Tarragonne, avec la participation de Marocains.
La date du 11 septembre 2001 a été choisie en juillet 2001 lors de réunions tenues en Espagne par la cellule espagnole d'Al Qaïda dont faisaient partie plusieurs recherchés marocains. Sur l'échiquier de la carte mondiale du terrorisme, nous sommes loin des images de Moussaoui et de Moutassadeq, mais face à des Marocains de l'intérieur, en l'occurrence des Tangérois qui sont parmi les plus grands activistes du réseau de Ben Laden et qui auraient servi de logistique et d'appui pour les attentats du 16 mai.
C'est un “coup de chance”, disent les policiers espagnols, qu'Abdelaziz Benyaïch ait été arrêté ce jeudi 14 juin 2003. Les autorités de la Sûreté nationale ont été informées, ce jour-là, par un coup de fil anonyme qui les a prévenues de la présence du Marocain recherché par Interpol, pour sa supposée appartenance au groupe responsable des attentats du 16 mai. Quelqu'un, raconte une source policière, a vu son visage dans l'avis de recherche diffusé par la télévision espagnole, et il s'est souvenu qu'il avait vu cette tête, quelques heures auparavant, non loin du port d'Algésiras. La piste a mené jusqu'à ce Tangérois qui approche les trente-cinq ans, homme aux multiples visages et identités, qui serait un vétéran du Jihad et des guerres de l'islamisme international. Le reste fut très simple, à Algésiras : la police a encerclé le local qui avait été cité lors de la dénonciation, peut-être un hôtel non loin du port de la ville, et a procédé à son arrestation. Le membre présumé d'Al Qaïda n'a opposé aucune résistance et fut emmené au commissariat central et mis à la disposition de Madrid. Le prévenu n'a pas expliqué les raisons de sa présence à Algésiras, et il a nié devant la police espagnole être impliqué dans les attentats de Casablanca. De source judiciaire, on nous explique qu'Abdelaziz Benyaïch a formulé le vœu de ne pas être extradé vers le Maroc, afin de pouvoir être jugé en Espagne.
Le cœur de l'élite
Après cette arrestation, le conseiller de la Junte, Alfonso Perales, a publiquement déclaré que le “gouvernement devait réfléchir à une nouvelle politique de surveillance de l'Andalousie, territoire de transit des Maghrébins ”. Le 18 juin, après avoir interrogé Abdelaziz Benyaïch, la juge de l'Audience nationale Teresa Palacios a décrété la prison inconditionnelle à l'encontre du Marocain, faisant de lui l'un des principaux accusés dans l'affaire des attentats du 16 mai à Casablanca. Les autorités marocaines avaient lancé un avis de recherche et de capture international et attendaient son extradition pour le faire comparaître devant un tribunal marocain. A son arrestation, Abdelaziz Benyaïch était en possession d'un faux passeport français. L'Audience nationale a finalement décidé que l'extradition d'Abdelaziz Benyaïch n'avait pas lieu d'être, et que ce dernier serait jugé en Espagne. Ce qui était initialement le vœu du détenu. Pourtant, la juge avait dans un premier temps initié une procédure lui permettant d'extrader le prévenu, avant de subir des pressions du juge Baltasar Garzon et de faire marche arrière, disant niet à la demande marocaine. La sortie du juge Garzon, désormais à la tête de toutes les enquêtes terroristes en Europe, a donc fait changer le cours de l'histoire.
La documentation remise au juge indique qu'Abdelaziz Benyaïch était poursuivi pour délit d'association de malfaiteurs et complicité dans des actes criminels, ce qui peut lui valoir en Espagne des peines allant de 5 à 10 ans de prison ferme. Cependant, l'affaire s'est corsée il y a quelques jours, le 18 septembre exactement, puisque le juge Baltasar Garzon a officiellement remis son rapport de 700 pages sur la structure d'Al Qaïda en Espagne, rendu public le mercredi 24 septembre, faisant des révélations fracassantes qui inaugurent une nouvelle stratégie politique assumée depuis le 11 septembre par l'Espagne, jusqu'à déclarer que le pays recelait une nébuleuse islamiste, à laquelle appartenait Abdelaziz Benyaïch, avec une quarantaine d'autres individus de nationalités diverses. Le 24 septembre 2003, Baltasar Garzon a confirmé à travers une déclaration officielle que la détention préventive était maintenue pour Abdelaziz Benyaïch qui devra répondre de nouveaux chefs d'inculpation.
Abdelaziz Benyaïch a été arrêté suite aux déclarations de Pierre Robert, condamné depuis à la prison à vie au Maroc. Marocain de nationalité française, Abdelaziz était connu des services de la DST française, qui l'avait arrêté en février dernier, à son retour de Tchétchénie. Le P.V. signale que l'“homme voyageait beaucoup” et qu'il avait été retenu durant 48 heures avant d'être remis en liberté. En Espagne, selon la police qui a effectué une enquête au sujet de l'individu, Abdelaziz était seulement de passage, vu qu'il ne disposait pas de résidence fixe. Sans oublier que le lien peut facilement être fait entre Pierre Robert, Toulousain et Abdelaziz Benyaïch, marié à une Toulousaine et qui a vécu quelque temps à Toulouse.
Les autres Marocains
Sur le même volet lié aux terroristes d'Al Qaïda, la police espagnole, après l'arrestation du fils Benyaïch, a recherché pendant l'été sur son territoire 16 terroristes en relation avec les attentats du 16 mai. Ainsi Hicham Temsamani Jad, âgé de 32 ans, qui a été appréhendé à Vitoria, dans la gare Gazteiztarra, alors qu'il se trouvait à bord d'un train en provenance de Paris et à destination de Madrid. L'homme faisait aussi l'objet d'une demande de recherche, d'arrestation et d'extradition émanant du Maroc. Selon des sources journalistiques espagnoles, le prévenu serait un “membre actif des cellules d'appui en Espagne de l'organisation terroriste Al Qaïda”. Selon cette thèse, qui sera amplement développée par le juge Baltasar Garzon dans son rapport déposé à Madrid il y a quelques jours, et qui a jeté un pavé dans la mare en annonçant que le mouvement Al Qaïda était implanté aussi en Espagne, avec une logistique permanente et une structure d'hommes, il est aussi notifié que les Marocains liés aux attentats du 16 mai pouvaient avoir aussi servi d'appui pour ceux du 11 septembre à New York et Washington. Il existait -et existe peut-être toujours- un vaste réseau de collaborateurs, militants et financiers dans la péninsule ibérique qui soutiennent dans l'ombre les réseaux terroristes. Le rapport cite même des régions désormais sous surveillance : l'Andalousie, la Catalogne, la province de Toledo et Ceuta. D'après ce rapport, Pierre Robert, condamné à la prison perpétuelle le jeudi 18 septembre par la Cour d'appel de Rabat, aurait déclaré que l'Espagne était truffée de kamikazes préparés de longue date pour perpétrer des attentats en Europe, et notamment en France, à Lyon, où allait bientôt se dérouler le prochain attentat de la cellule.
C'est lors de ce vaste coup de filet, opéré dans la péninsule ibérique, que la police marocaine a pu arrêter à Tanger cette fois-ci, l'un des suspects d'origine marocaine et de nationalité espagnole, Abdelaziz Hichou, le commerçant de voitures vivant entre Ceuta, le Maroc et l'Europe. C'est là qu'il allait acheter ses voitures en compagnie de Pierre Robert. Selon la police, ce commerce permettait à Hichou de collecter des fonds pour le groupe qui opérait à partir du Maroc. Hichou était connu pour les collectes de fonds qu'il effectuait pour la cause palestinienne et il n'est pas impossible, pensent certaines sources policières, que “cela représentait une couverture pour recevoir et faire transiter beaucoup d'argent dans les cinq continents sans éveiller les soupçons”. Hichou aurait fait parvenir à une cellule du Hamas, Litilaf Alkheir (alliance du bien) dirigée par le Cheikh Youssef Al Kardaoui, une somme de deux millions de dhs, en argent et en or. Par ailleurs, sur la liste des 16 noms révélés dans le dossier envoyé par le Maroc en Espagne, figurent les trois individus considérés comme les plus proches de Pierre Robert. Il s'agit des Marocains Abdeslam Dachraoui, Rachid Aharez et Brahim Hamdi, qui sont toujours en fuite. Ils feraient, selon toute logique, partie des réseaux qui avaient bénéficié de la logistique et du soutien des groupes opérant en Espagne.
Le juge Garzon
Après cette série d'arrestations et de découvertes, le juge Garzon arrive à la conclusion que son pays aura été au centre des attaques terroristes qui ont bouleversé le monde depuis deux ans. Il poursuit en justice Ben Laden et 34 autres terroristes d'Al Qaïda, qui seraient en relation directe avec les attentats du 11 septembre. Il affirme que “c'est en Espagne qu'ont été préparées les attaques”, que les “détails des opérations y ont été étudiés” et que “la date exacte de l'opération, c'est-à-dire le 11 septembre, a été choisie en Espagne, dans la petite ville de Tarragona au Sud de l'Espagne”, par le groupe qui comprend entre autres Abdelaziz Benyaïch, son frère Salaheddine Benyaïch et d'autres Marocains. Dans ce rapport le magistrat Baltasar Garzon présente les actes d'accusations à l'encontre du groupe terroriste d'Al Qaïda d'Espagne. Il s'agit du premier acte d'accusation sur les événements du 11 septembre, le premier à citer des noms. C'est aussi le premier acte d'accusation officiel. Les 35 personnes sont accusées de “délits d'assassinats terroristes avec morts et blessés durant les attentats du 11 septembre, d'appartenance et de collaboration avec des organisations terroristes, de fraude fiscale, de falsification de documents et de possession illégale d'armes”. Le rapport souligne que “la cellule espagnole d'Al Qaïda a joué un rôle important dans la préparation des attentats du 11 septembre”.
Le rapport du juge Baltasar Garzon, tient ses conclusions en se basant sur plusieurs interrogatoires effectués en Allemagne, Etats-Unis, Indonésie, Grèce, Royaume-Uni, Belgique, Yémen, Syrie, Suède, Turquie, Jordanie et Arabie Saoudite. L'Espagne aurait “servi comme base logistique, de préparation, d'endoctrinement, de financement et de structure pour ses membres et les multiples personnes qui transitaient à travers elle et collaboraient”. Garzon considère que les objectifs des attentats ont été étudiés en 1997 quand Ghasoub Al Abrash –responsable financier de la cellule espagnole d'Al Qaïda et homme de confiance de Ghaleb Kalaje, alias “Abu Thala”, a effectué un voyage aux Etats-Unis pour les repérages des objectifs potentiels d'Al Qaïda. Ces documents sont arrivés entre les mains d'Abu Khaleb, de son vrai nom Mohamed Bahaiah, qui a pris la direction d'Al Qaïda en Espagne depuis 1998.
Il était aidé par le Syrien Imad Eddin Barakat, alias Abu Dahdah, jusqu'en novembre 2001. Les frères Benyaïch auraient eu au moins un contact durant cette période avec leurs homologues venus du Yémen et de Syrie. C'est le même Abu Khaleb qui était derrière l'envoi, en Afghanistan, aux
plus importants personnages de l'organisation terroriste, du projet visant les USA. L'enregistrement contenait des images prises de différents angles de plusieurs bâtiments américains. Selon le rapport de Baltasar Garzon, “ainsi, dans notre pays (Espagne) et durant l'été 2001, des réunions multiples se sont tenues sous la houlette de Mohamed Atta”, l'un des pilotes kamikazes qui s'est crashé contre l'une des tours jumelles. Ces réunions ont vu la participation de “Ramzi Benalshibeh qui a été le co-locataire de Atta en Allemagne”. Il y avait aussi selon notre source espagnole, un certain Mohamed Belfatmi et Driss Chebli qui auraient joué un rôle prépondérant lors de ces réunions de l'été 2001. Le rapport signale aussi la présence de Shakkur et d'Abu Abdelrahmane. Garzon arrive à la conclusion que la première des réunions entre Atta et Benalshibeh a eu lieu en juillet 2001 à Tarragone. Le but en était de “déterminer la date exacte des attentats et définir le mode opératoire de toute la logistique matérielle et de l'appui des membres du groupe qui assureront la couverture depuis l'Europe”. Le Syrien Imad Eddin Barakat est accusé d'avoir maintenu des contacts avec Mohamed Atef, considéré comme le bras droit d'Oussama Ben Laden et qui est mort récemment lors d'un bombardement en Afghanistan. C'est lui que les Benyaïch auraient connu lors de leurs passages en Afghanistan où ils avaient combattu.
De son côté, le FBI qui avait lu en premier le rapport, avant Madrid, a confirmé, le 11 septembre 2003, que toutes les conclusions apportées par le rapport de Baltasar Garzon étaient vraies. Les faits et événements relatés par l'enquête ont été “reçus” cinq sur cinq par les puissants alliés d'Aznar. Les attentats sont venus d'Espagne, et plus particulièrement de l'autre côté de la rive, de chez les voisins, de chez des Marocains qui avaient des entrées en Europe. Ce qui met les deux pays voisins au centre de ce qu'il est convenu d'appeler le plus grand coup de filet de l'histoire du terrorisme. Deux ans après les événements du 11 septembre, le FBI a reconnu que selon ses sources d'information, l'Espagne aurait été choisie par Al Qaïda comme nouvelle plaque tournante pour la réorganisation de ses troupes et de ses futurs projets. L'Espagne, selon les sources américaines et les services espagnols, est devenue, avec l'Algérie, l'une des principales portes d'entrée vers l'Europe, bien qu'actuellement aucune piste n'a pu être dégagée pour permettre de suivre l'imbroglio de ce que le rapport décrit comme une “structure silencieuse” où les Marocains auraient pris un rôle très actif. Selon d'autres sources, plusieurs services secrets européens seraient sur les traces des faux passeports espagnols qui circulent en Thaïlande aujourd'hui. Il serait même question que les dirigeants d'Al Qaïda soient en train d'étudier l'encadrement d'une forte émigration nord-africaine pour créer une nouvelle armée capable d'attaquer l'Europe de l'intérieur. Sur ce chapitre, la piste marocaine reste la plus privilégiée, avec la Tunisie. Selon toute vraisemblance, Barcelone apparaît désormais, après Hambourg et Londres, et à moindre échelle Bruxelles, comme une ville qui pourrait offrir, grâce à ses voies de communication aériennes et maritimes, une véritable plate-forme à même d'installer un centre opérationnel pour les groupes terroristes.
Ce qui reste à savoir c'est le rôle joué par Barcelone dans la préparation des attentas du 16 mai à Casablanca. Voici la réponse que le rapport du juge Garzon ne dit pas, ou pas encore. Ce qui nous pousse à poser d'autres interrogations sur le rôle joué en Espagne, par des terroristes de tous poils pour les attaques visant le Maroc.
L'Espagne a aujourd'hui le beau rôle de traquer et d'arrêter les activistes d'Al Qaïda, mais il se trouve que dans le tas, plusieurs Marocains se trouvent au centre des ramifications et le gouvernement et le peuple marocains doivent savoir quels étaient les projets futurs, si oui ou non d'autres Marocains sont déjà encadrés en Espagne et ailleurs pour perpétrer d'autres crimes ?
Sans oublier que cette face dévoilée de l'iceberg en cache une autre, sans visage, qui pourrait aider le Maroc, en cas de jugement des terroristes qaïdistes sur son territoire, pour cerner la nébuleuse qui apparaît de plus en plus tentaculaire. Il faut aussi ajouter que le problème de l'immigration clandestine est encore une fois posé sur la table des études. Le Maroc tout comme l'Espagne doivent plancher sur ce dossier pour trouver un moyen de sortie pour éviter que les réseaux terroristes puisent dans la pépinière des désœuvrés qui pullulent en Andalousie et ailleurs. Ce qui n'est pas pour arranger les relations entre Madrid et Rabat vu que le travail se doit d'être fait à deux et dans la confiance. Quoi qu'il en soit, et en attendant la suite de l'affaire des Marocains qui servent la cause de Ben Laden, le Maroc et l'Espagne se trouvent plongés dans les mêmes eaux troubles qu'il faudra purifier pour y voir plus clair.
Qui est le juge Garzon ?
En épinglant Pinochet, le dictateur chilien en 1998, le juge espagnol, Baltasar Garzon, ancien du PS, s'ouvre les portes de la gloire. Avant cela, il avait déjà fait le nettoyage en Espagne : en 1994, il malmène les responsables politiques de la “guerre sale” menée entre 1983 et 1987 par l'Etat espagnol contre les indépendantistes basques. L'affaire sonne le glas du gouvernement Gonzalez et contribue à la chute électorale du parti socialiste en 1996. Garzon se sent pousser des ailes, c'est à ce moment qu'il mène des enquêtes en Amérique du Sud. En 1997, c'est l'Argentine et l'affaire des 320 ressortissants espagnols disparus sous la dictature militaire de 1976 à 1983. Il procède à l'arrestation d'Adolfo Scilingo de passage en Espagne.
Scilingo était le premier officier argentin à avouer sa participation aux exécutions massives d'opposants politiques. Garzon rencontre à cette période un autre juge espagnol, Manuel Garcia-Castellon, qui enquête sur les 100 espagnols disparus sous le régime Pinochet. Ils s'attaquent tous les deux à l'Opération Condor, l'une des plus tristes pages de l'histoire du continent sud-américain. Garzon ira jusqu'à vouloir entendre en avril 2002 Henry Kissinger à propos de l'Opération Condor et de ses liens avec ses amis dictateurs. Mais sans grand succès. Trois enquêtes font aujourd'hui partie de ses principaux dossiers avec l'affaire Al Qaïda : Kissinger et l'Opération Condor, le scandale financier de la célèbre banque de Bilbao, la BBVA, et les liens du parti basque Batasuna avec l'ETA.


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