La RS Berkane qualifiée en finale de la Coupe de la CAF suite au forfait de l'USM Alger    SAR le Prince Héritier Moulay El Hassan préside à Rabat le Grand Prix de SM le Roi Mohammed VI du Concours officiel de saut d'obstacles 3* de la Garde Royale    18ème Congrès général de l'Istiqlal : Confiance unanime et renouvelée en Nizar Baraka    Meknès : Plus d'un million de visiteurs, le SIAM 2024 en chiffres    Morocco Aviation Private Academy décroche un contrat pour former les professionnels de l'aviation civile au Gabon    SIAM. Plusieurs distinctions pour Diana Holding    Le PI peine à élire son comité exécutif    Leçon démocratique istiqlalienne    Air Côte d'Ivoire inaugure enfin ses vols entre Abidjan et Casablanca dès le 14 mai    Le Maroc participe à la réunion spéciale du Forum économique mondial à Riyad    SIAM 2024: 1.500 exposants, dont ceux impactés par le séisme d'Al Haouz    Maroc : Masen lance un processus d'appel d'offres pour le projet éolien Nassim Nord    Véhicules électriques: Elon Musk en visite en Chine    Dubaï veut construire un nouveau terminal à l'aéroport Al-Maktoum pour 34,8 milliards de dollars    Dublin veut renvoyer des demandeurs d'asile au Royaume-Uni    Généralisation des systèmes de « Rendez-vous » et du « eTimbre » à l'ensemble des Missions diplomatiques et Postes consulaires    Maroc : Peace Corps célèbre 61 ans dialogue interculturel et de volontariat    Maroc : Nizar Barka réélu à la tête de l'Istiqlal    Escrime : La Marocaine Youssra Zakarani qualifiée aux JO 2024    Botola D1 / J27 (acte II): MAS-WAC en affiche ce dimanche    Infrastructure sportive : Lancement d'un appel d'offres pour équiper les stades de Marrakech et d'Agadir du gazon naturel    Marrakech : Clôture des 11e Jeux nationaux Special Olympics Maroc    Caravane médicale à Taounate au profit des élèves en situation de handicap    Diaspo #336 : Hanna El Mokadem, French club player with Moroccan national team dreams    MAGAZINE : Monique Eleb, sociologue urbaine    Houda Terjuman : Evanescence d'une artiste multiculturelle    Exposition : Wallis et Jarmusch se voient en peinture    Marrakech : Le Festival national des arts populaires tient sa 53e édition du 4 au 8 juillet    Les coopératives agricoles face à l'épreuve du changement climatique    Météo. Temps pluvieux dans plusieurs régions, chutes de neige sur les Haut et Moyen Atlas, ce Lundi    Camps de Tindouf, Algérie. Les exécutions arbitraires de jeunes séquestrés dénoncées    Allemagne / Exploit de Leverkusen 2023-24: Adli buteur lors du 42e match sans défaite !    Reconduit pour un 2è mandat, Baraka s'engage à "construire un avenir solide" pour le PI    ONU: Le Conseil de sécurité appelle à « désamorcer la situation » dans le nord du Soudan    Conseil de sécurité: Le Mouvement des non-alignés salue les efforts de SM le Roi en faveur de la cause palestinienne    L'"opposant" algérien Said Bensedira arrêté à Paris    US Peace Corps Morocco celebrates 61 years of partnership    France's Engie to sell stake in Morocco's coal plant SAFIEC    « Rawafid » : une soirée musicale envoûtante pour explorer les trésors sonores du Maroc    Agriculture durable : l'ADA et le PNUD s'allient pour renforcer l'entrepreneuriat des jeunes    SIAM : meilleures participations à la 16e édition    Nabila Hamani : portrait d'une magicienne du verbe classée au top des meilleures poétesses de sa génération    Burkina: adoption d'une loi relative aux assises nationales sur la transition    Interview. Paola Bacchetta: "Troublée par le mot "marabout", j'en ai fait des cauchemars"    L'OMS alerte sur l'exacerbation de la résistance antimicrobienne pendant le Covid    Sommet social mondial: M. Hilale s'entretient à Genève avec les directeurs généraux des organisations internationales    Les têtes d'affiche du 26e Festival Jazz au Chellah dévoilées    Jazzablanca : le tourbillon rock-blues « Zucchero » pour une première apparition au Maroc    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Cheikha Rimitti, l'essence du Raï
Publié dans La Gazette du Maroc le 19 - 12 - 2005


la doyenne du raï sort un nouvel album
La grande diva du Raï sort un nouvel Album Nta Goudami, un mélange subtil de blues et de folk sur fond de nostalgie. Jouissif.
Eternelle rebelle, femme au verbe souvent indigné et aux attitudes provocantes, Cheikha Rimitti est une légende, un monument. Et, si son visage est marqué par les effets du temps conjugués à une vie d'alcool et d'amours (son pseudonyme signifie "remettez-moi ça"), son énergie demeure intacte. Personnage haut en couleurs et au caractère entier, elle est une sorte d'Elvis Presley du Raï. Mais un Elvis qui ne vieillirait pas et resterait à jamais politiquement incorrect. Cheikha Remitti est l'essence même du raï. Elle symbolise tout autant la liberté que son peuple a tant de mal à acquérir que la fierté qui maintient celui-ci debout. Elle a toujours refusé de se plier aux principes rétrogrades, aux conformismes aliénants, ainsi qu'aux règles du show-bizz. C'est pourquoi "Nouar", fleur en arabe, dégage ce parfum d'énergie pure et sans compromis que l'on a plus l'habitude de trouver dans le premier CD d'un adolescent génial que dans celui d'une mamie qui a démarré sa carrière à l'époque du 78 tours. Cet album, au dynamisme proprement stupéfiant, ne profitera sans doute pas d'une couverture médiatique digne de son importance, mais espérons que l'intérêt actuel pour les musiques du Maghreb rendra à Cheikha Remitti ce qui lui appartient. La première place !
Chanteuse des levers de soleil embrumés par les fumées de cabaret et les nuits sans fins, septuagénaire noctambule, Cheikha Rimitti est une vieille dame indigne resplendissante. Figure mythique du Raï et personnalité hors du commun, son histoire se confond avec celle de l'Algérie. Femme faite de fulgurances et de bouibouis infâmes, de moments de gloire et de corps déchus, les anecdotes les plus incroyables circulent à son propos.
Née à Tessala (village situé près de Sidi Bel-Abbès, dans l'Ouest algérien) le 8 mai 1923, la petite fille prénommée Saïda se retrouve très vite orpheline. De Rimitti, on ne connaît que le vrai prénom car la chanteuse a toujours soigneusement caché son nom officiel afin d'épargner sa famille ; c'est pour cette raison qu'aujourd'hui encore, elle refuse qu'on la filme : elle prétend craindre que sa famille la reconnaisse....
A 20 ans, elle s'installe à Rélizane, un grand centre colonial où la vie est rude. La pauvreté, les épidémies et la famine sévissent. "On grillait le grain de blé pour remplacer le café, que l'on buvait avec du sirop. C'était l'époque où l'on s'habillait de matelas et où l'approvisionnement s'effectuait avec des bons" raconte-t-elle dans un entretien donné à Bouziane Daoudi, journaliste du quotidien français Libération. "Quand la sirène sonnait, on fuyait dans les vignes et on se cachait dans les trous", poursuit-elle. C'était en 1943 et l'Algérie (alors colonie française) était devenue le refuge de la France libre, l'un des quartiers généraux des militaires qui refusaient la capitulation. La jeune Saïda, qui dort dans les rues, dans le hammam et mange quand elle le peut, se met à suivre une troupe de musiciens ambulants. D'ailleurs en nulle part, elle rencontre le célèbre musicien Cheick Mohamed Ould Ennems, avec qui elle se met en ménage alors qu'il est père de dix enfants. Il lui fait connaître le milieu artistique algérois et la fait enregistrer à Radio Alger. C'est à cette époque qu'elle gagne son surnom. L'histoire raconte qu'un jour de pluie où elle entrait dans une cantine pour boire un café, les clients l'ont reconnue et acclamée avec ferveur. Pour les remercier, elle veut leur offrir une tournée mais ne parlant que quelques mots de français, elle ordonne à la serveuse "Remettez, madame, remettez". Le public la baptise aussitôt "la chanteuse Remitti". En 1952, elle enregistre son premier disque chez Pathé et sort "Charrak Gatta", son premier succès, en 1954. Une chanson auréolée de soufre puisque certains y voient une attaque contre le tabou de la virginité. Féministe sans le vouloir, Cheikha Rimitti chante les femmes, l'amour et les corps emmêlés, l'alcool, l'oubli, la nuit. Auteur inspirée, elle chante aussi... le téléphone et le TGV. A la fin des années 70, elle pique un coup de sang lorsqu'elle apprend que des chanteuses reprennent son répertoire en France. L'une d'elles se fait même appeler Cheikha Rimitti "sghira" (la petite) ! En 1978, elle débarque à Paris et écume les hauts lieux de la chanson maghrébine populaire (dont le célèbre "Bedjaïa Club", un café situé près de la station Stalingrad, en plein cœur du 18ème arrondissement). Interdite de spectacle en Algérie au plus fort des évènements, elle trouve en France un nouveau public.
Les nouvelles générations la découvrent. Elle enregistre même un disque de pop-raï sous la houlette de Robert Fripp, l'élégant rocker expérimental.
Et en février 1994, elle donne un concert mémorable au très prestigieux Institut du Monde Arabe, à Paris. Belle reconnaissance pour celle qui aime à dire C'est le malheur qui m'a instruit. Les chansons me trottent dans la tête et moi je les retiens de mémoire. Pas besoin de papier et de stylo".
En 2000 l'album Nouar et les nombreux concerts qui le suivent la font découvrir à un large public héberlué devant la flamme infatigable de cette chanteuse comparble à si peu d'autres. Elle refuse les interviews, les photos et les films mais peut rester sur scène des heures durant. Il revient souvent aux organisateurs d'arrêter ses concerts qui durent parfois le double du temps prévu et entraînent le public au bord de la transe. Sa réputation déborde largement du milieu communautaire.
De la vieille Europe aux Etats-Unis ses fans se font de plus en plus nombreux. C'est une star mais une star que l'on peut aussi bien entendre sur de prestiguieuses scènes internationales que dans de petits cafés parisiens devant une dizaine d'heureux élus. En 2005 le label Because, lui fait enregistrer "N'ta Goudami" un album où elle s'essaye au new raï façon oranaise, vocodeur et boîte à rythmes en avant et à des excursions gnawas, sans jamais perdre son âme ni son fabuleux feeling. Et si cette reconnaissance lui met du baume au cœur, elle qui a été tant pillée par les chebs de tous poils, finalement la seule chose qui lui importe c'est cette lueur malicieuse et provocante, cette étincelle d'éternelle jeunesse qui pétille dans ses yeux.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.