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Islam-Québec : un apport exceptionnel
Publié dans La Gazette du Maroc le 03 - 04 - 2006

Il n'y a pas si longtemps, les purs et durs indépendantistes québécois, succombant -dit-on- aux charmes des parfums de l'Islam, affirmaient que la province canadienne du Québec ne serait jamais assez reconnaissante envers le monde musulman qui s'est fait remarquer par sa précieuse contribution au mouvement d'émancipation du peuple québécois. D'abord lors de la lutte anti-colonialiste au Maghreb de 1953 à 1962, ensuite dès l'amorce de la première grande vague d'immigration musulmane maghrébine au Québec en 1977.
Cette merveilleuse épopée aurait donc commencé environ un demi-siècle déjà. Alors que le début des années 1950 avait sonné le glas pour le colonialisme français au Maghreb (Mauritanie, Maroc, Algérie et Tunisie), une lutte armée de libération s'y engagea avec une férocité sans pareil, surtout en Algérie où la France pensait y demeurer éternellement. Or, à cette même époque et à des milliers de kilomètres du théâtre des affrontements sanglants, un petit peuple en quête d'émancipation – les Québécois - était chaque soir rivé sur le petit écran pour suivre le déroulement de cette lutte menée par un peuple dominé. La célèbre émission “Point de mire” de Radio-Canada marqua tout particulièrement le Québec. Animée par ni plus ni moins que René Lévesque, futur chef du premier gouvernement québécois indépendantiste en 1976, elle traitait d'informations internationales tout en étant un véritable cours d'initiation politique pour la population francophone. Les Québécois s'identifiaient aux résistants musulmans du Maghreb, pas à leurs “cousins” français colonialistes…
Ainsi la lutte anti-colonialiste au Maghreb avait été une source d'inspiration pour le mouvement d'émancipation québécois. Son exemplarité mais aussi les nombreux écrits qu'elle suscita y eurent une grande influence.
1962. L'Algérie se libère, alors qu'au Québec l'idée d'une possible indépendance commence à faire son chemin. Et tandis qu'Alger devenait La Mecque des mouvements de libération anti-colonialistes, on pouvait voir dans ses camps d'entraînement à la guérilla aussi bien le Sud-African Nelson Mandela de l'ANC (Africain National Congress) que… des Québécois du FLQ (Front de Libération du Québec) dont le seul bureau à l'étranger se trouvait dans ce pays musulman. Plus tard, on apprit également que des Québécois s'initiaient, au cours des années 1970, à la lutte armée dans des camps d'entraînement palestiniens au Moyen-Orient.
Mais c'est à la faveur de la première grande vague d'immigration musulmane maghrébine au Québec, débutant en 1977, que nous assistons à l'émergence d'un nouvel acteur perpétuant la solidarité islamo-québécoise. Ce nouvel acteur – la communauté musulmane québécoise (forte aujourd'hui de plus de deux cent mille âmes) – était précédemment constituée essentiellement d'anglophones moyen-orientaux, indiens et pakistanais professionnels et affairistes auxquels vinrent désormais se joindre un nombre sans cesse grandissant de musulmans maghrébins francophones conscientisés et moins opportunistes.
De fait, si bien des islamo-québécois ont soutenu et continuent à soutenir les aspirations indépendantistes du peuple québécois, une telle solidarité commença à se manifester haut et fort sous la plume d'un intellectuel musulman d'origine marocaine, Abdelkader Benabdallah. Ce dernier, selon sa biographie, n'est pas n'importe qui : ancien militant du parti politique progressiste du leader marocain, Mehdi Ben Barka (qui devait présider la première Conférence Tricontinentale mais qui fut assassiné en 1965 à Paris par une coalition de services secrets dont la CIA et le MOSSAD), il collabora activement au bulletin d'informations palestinien sous la direction du premier représentant à Paris de la Résistance palestinienne, Mahmoud El-Hamchari (assassiné lui aussi par le MOSSAD en 1972) puis se consacra, dans une semi-clandestinité, à son occupation de journaliste indépendant, se battant pour “caser” ses articles anti-apartheid et anti-sionistes dans les revues et les journaux français, et ce, jusqu'à son départ pour le Canada.
Installé à Montréal vers la mi-mai 1977, l'ancien compagnon de Ben Barka, titulaire d'un doctorat à la Sorbonne et de plusieurs autres diplômes, ne resta pas muet longtemps. Dès le mois de juin, une polémique le mit aux prises avec les organisations sionistes canadiennes qui, auparavant, occupaient à elles seules tout l'espace médiatique lorsqu'il était question du monde musulman. Devenu, un mois plus tard, le premier collaborateur musulman à l'hebdomadaire québécois indépendantiste Le Jour, il appuyait avec finesse la cause défendue par cette publication tout en cultivant les liens d'amitié qui unissent le Québec au monde musulman et, sur un plan plus large, au Tiers-Monde. Ses interventions dans les quotidiens québécois allaient se maintenir alors même qu'il enseignait les sciences politiques à l'université. Solidarité islamo-québécoise oblige : pour son cours d'analyse comparative, il choisit le thème “Nationalismes comparés : l'Algérie et le Québec” qui eut un très grand impact sur des étudiants québécois encore hésitants à se défaire de leur attitude de “dominés consentants”, selon l'expression même de A. Benabdallah.
En été 1978, soit un an après son arrivée au Québec, notre enseignant musulman fut élu représentant au Québec de la Fédération canado-arabe. Il usa aussitôt de sa nouvelle fonction et de ses titres académiques pour faire valoir encore plus les causes palestinienne, sud-africaine, québécoise et amérindienne dans les médias d'information. C'est ainsi qu'à chaque élection et référendum au Québec, il profita de sa crédibilité auprès des musulmans québécois pour lancer à leur endroit des appels en faveur des “légitimes aspirations” des peuples québécois et amérindien.
Aujourd'hui, en plus de cette solidarité politique exemplaire, la communauté musulmane québécoise, par sa composante maghrébine, apporte un soutien inestimable au “fait français” au Québec. Sa présence, considérable dans le corps professoral tant universitaire que collégial et scolaire, s'avère tout aussi importante en matière d'écrits en langue française. A lui seul, l'ancien compagnon de Mahmoud El-Hamchari a publié dans la langue de Molière plusieurs livres et des centaines d'articles (non rémunérés) au Québec…
Bien d'autres actes de solidarité islamo-québécoise gagneraient à être relatés par des témoins afin que soit évalué en toute justice l'exceptionnel apport islamique à l'affirmation québécoise et à la cause amérindienne. Force est de constater d'ores et déjà que l'Islam participe activement, depuis des décennies, à l'épanouissement tant politique que spirituel, culturel et économique du Québec dans son ensemble.
Bernard Codère (Historien québécois)


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