Huile d'olive : sept usines sanctionnées, l'ONSSA resserre la vis    WhatsApp prépare l'ère du pseudonyme : discuter sans numéro bientôt possible    igus s'installe à Casablanca et mise sur la révolution silencieuse du mouvement industriel    Coca-Cola s'allie au Raja et au Wydad dans un partenariat inédit    Hausse des ventes de voitures à énergie nouvelle en Chine malgré un léger recul du marché global    Akhannouch: Le soutien aux TPME s'inscrit dans une dynamique de réformes profondes sous la sage conduite de SM le Roi    L'Allemagne met le régime algérien à l'épreuve : la libération de Boualem Sansal en échange de la poursuite des soins de Tebboune    Hammouchi reçoit l'ambassadrice de Chine au Maroc pour renforcer le partenariat sécuritaire entre les deux pays avant la tenue de l'Assemblée générale d'Interpol à Marrakech    Maroc – Sénégal. Un partenariat stratégique « exceptionnel »    Africa Sports Expo : Casablanca accueille la 4e édition du plus grand salon du sport en Afrique    Fiscalité : le Nigeria prépare 50 mesures d'allègement    Réseaux sociaux : Le Maroc cherche à protéger ses enfants, mais...    Madrid. Abdellatif Hammouchi reçoit la Grand-Croix du Mérite de la Garde civile espagnole    L'UNESCO et la Fondation Maroc 2030 renforcent l'impact durable des grands événements sportifs à venir    Conseil supérieur du pouvoir judiciaire : Plus de 7 500 plaintes reçues en 2024 (Rapport)    The Best 2025 : Hakimi, vedette du PSG, dans la liste des nominés    Surf. Odriozola et Salgado remportent le Junior Pro Taghazout Bay    Présidentielle en Guinée : 9 candidatures retenues parmi 51    Grammy Awards 2026 : Youssou Ndour décroche une nomination    La MAM célèbre la Fête de l'Unité    CAF : « Le ballon officiel de la CAN 25 rend hommage au zellige marocain »    JSI Riyad 2025. Finale . Futsal / Maroc-Iran ce mardi : Horaire ? Chaînes ?    Alger sous pression pourrait libérer l'écrivain Boualem Sansal après demande allemande    Palestine : Escalade de la violence des colons en Cisjordanie occupée    Amical Maroc-Ouganda : La billetterie lancée dès ce lundi    France : La police enquête sur les célébrations des supporters du Wydad Casablanca à Paris    París: En el Olympia, los 50 años de la Marcha Verde se celebran con alegría    España: En sus memorias, el rey Juan Carlos guarda silencio sobre la cuestión del Sáhara    Le Maroc, pionnier de la souveraineté génomique africaine    Safi: Santé pour tous, un hommage en actes !    Jadida: L'Association "All Riding Family" s'envole au chevet des familles démunies des zones rurales de Demnat    Terres rares : Pékin suspend les restrictions des exportations vers les USA    Etats-Unis / Shutdown : Le trafic aérien réduit « à peau de chagrin »    Paris : À l'Olympia, les 50 ans de la Marche verte célébrés dans la joie    Nabil Mouline explore mille ans d'histoire du Sahara dans un documentaire    «Entre deux continents» : Aymane Bufrakech expose à la Fondation Hassan II pour les MRE    Nour-Eddine Lakhmari signe son grand retour avec Mira, en compétition au Festival de Tallinn    L'Italie célèbre les 2500 ans de la ville de Naples avec deux concerts à Rabat et Tanger    La République du Sénégal a salué, lundi à Rabat, les Initiatives de Sa Majesté le Roi Mohammed VI et l'engagement constant du Souverain en faveur du développement du Continent africain.    Rabat : la FIFA lance une plateforme mondiale pour la protection des droits des joueurs    Niger : Plus de 220 terroristes "neutralisés" en octobre dernier    Réunion au Palais Royal : une nouvelle étape dans la mise en œuvre de l'autonomie au Sahara marocain — du dialogue politique à l'application sur le terrain    Le Sénégal est déterminé à renforcer son partenariat stratégique avec le Maroc (Ministre sénégalais des Affaires étrangères)    Aziz Akhannouch : « La consécration de la justice sociale dans les provinces du Sud est au cœur des priorités du gouvernement »    Nasser Bourita : Les relations maroco-sénégalaises, une référence en matière des liens maroco-africains    Conseil de gouvernement: Prix de transfert, centres de vacances et statut des fonctionnaires du Conseil de la concurrence au menu    Baisse de 17% des demandes d'autorisation de mariage de mineurs en 2024, selon le CSPJ    FIFM 2025 : Le film marocain "Derrière les palmiers" de Meryem Benm'Barek en compétition officielle    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



La mémoire est un poète…
Publié dans La Vie éco le 07 - 05 - 2004

La production littéraire est introspective, nombriliste et pauvre en témoignages
à caractère historique, social ou politique. Censure, autocensure
et métaphores ont formaté de nombreux écrits qui recèlent
peu de réel et ne renseignent nullement sur un passé par trop composé.
Dans une de ses bonnes et décapantes chroniques littéraires publiées par Marianne, le romancier Patrick Besson a écrit cette phrase qui a valeur d'aphorisme : «Il y a les gens qui écrivent avant de vivre, ceux qui écrivent à la place de vivre et ceux qui écrivent après avoir vécu.» Présentée ainsi, cette catégorisation de l'écriture enlève certainement un mystère à cet acte extraordinaire qui fait des mots une raison de vivre sinon une raison sociale d'entretenir la vie. Mais est-ce qu'écrire consisterait seulement à raconter sa vie et ses expériences et, dans ce cas, c'est la longévité qui ferait l'écrivain ? De même que ceux qui écrivent au lieu de vivre n'auraient-ils pas le talent pour raconter leurs rêves à défaut de narrer leur vécu ? Vaste débat sur l'écriture et la création où l'on pourrait évoquer le génie précoce de Rimbaud et la longue oisiveté bourgeoise de Proust. Sans compter le vécu immobile et reclus de tant de poètes et d'écrivains diminués physiquement ou affligés d'une cécité : d'Homère à Borgès en passant par Abou al Alaa Al Maârri et Taha Hussein.
Plus prosaïquement, restons dans la trilogie catégorielle de Besson qui rendait compte d'un livre autobiographique relatant, non sans talent semble-t-il, les souvenirs et l'expérience professionnelle d'un diplomate français, Pierre-Louis Blanc ( Valise diplomatique, Ed. Le Rocher.) On peut ajouter – pour faire un peu plus dans la proximité et sans doute aussi dans une effervescente actualité – une autre catégorie de gens bien de chez nous : ceux qui n'écrivent rien du tout après avoir vécu ou été témoins de péripéties qui ne relèvent pourtant pas de l'ordinaire. De quelles mémoires et de quelles autobiographies disposera l'historien d'aujourd'hui pour interroger notre histoire contemporaine au cours de la deuxième moitié du XXe siècle ? La première moitié a enregistré, et nous n'y sommes pour rien, les écrits nombreux et variés des chercheurs et des administrateurs de la colonisation dont la contribution à la connaissance de notre passé – n'en déplaise aux anti-orientalistes bougons et sectaires – est plus qu'appréciable. Clouée au pilori, méprisée et rejetée, cette «science humaine coloniale» est considérée aujourd'hui comme l'unique lecture d'un passé voilé, sans version originale et sans écrits contradictoires. Pour recouper tout cela, on ne dispose que d'une oralité volubile et mythifiée et de légendes qui ont traversé une mémoire collective que le charlatanisme et le maraboutisme ont nourrie de fausses croyances bâties sur les peurs et les affabulations. Il existerait, nous disent quelques historiens têtus ou optimistes, des documents et des manuscrits chez certaines familles de lettrés mais dont le nombre est assez rare et la valeur historique si peu probante.
Plus proche de nous, il est rare de trouver des mémoires ou des témoignages sur un passé récent. Quant à la production littéraire, tout en étant largement autobiographique, elle n'en est pas moins introspective, nombriliste et pauvre en témoignages à caractère historique, social ou politique. Censure, autocensure et métaphores ont formaté de nombreux écrits qui recèlent peu de réel et ne renseignent nullement sur un passé par trop composé. Un des rares intellectuels et historiens contemporains marocains, sinon le seul, à avoir tenté la rédaction – et surtout – la publication de son journal intime est Abdallah Laroui. Deux volumes de ses Impressions matinales (Khaouater Assabah, édité par le Centre culturel arabe, Casa-Beyrouth) couvrant les années soixante jusqu'au début des années quatre-vingt sont autant de moments de bonheur pour une mémoire trop longtemps malmenée par des bricoleurs de l'histoire. L'auteur de La Crise de l'intellectuel arabe passe, dans un tendre et amusant raccourci qui est le propre de l'écriture diariste, de l'accouchement de son épouse au commentaire d'une actualité politique ou d'une conversation littéraire avec Allal El Fassi. Et c'est ainsi que les petits riens de la vie au quotidien d'un historien (excusez cette triple rime) sont de grands moments de plaisir de lire et plus si affinités. Par ailleurs, l'homme sait de quoi il parle et n'en parle qu'en connaissance de cause, avec une spontanéité qui ne manque ni de lucidité ni de talent dans l'usage d'une langue arabe limpide et moderne. De plus, avec ce journal du passé récent, Laroui, l'historien qui a déjà donné, ne prétend pas faire une œuvre d'histoire mais un bel objet littéraire. Il serait en cela en parfait et intelligent accord avec celui qui disait : «La mémoire est un poète, n'en faites pas un historien.»


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.