Sahara : L'Algérie demande une réunion urgente du Conseil de sécurité    Le nombre de mosquées en milieu rural dépasse 37.000    Le programme Tadarroj pour la formation par apprentissage lancé    Reprise de la liaison commerciale maritime Cadix-Casablanca après des années d'interruption    Transparence et compétitivité économique : Le Conseil de la concurrence et l'ANGSPE unissent leurs efforts    Round up des préparatifs du Royaume pour la COP 2030    Bourse de Casablanca : clôture dans le vert    SM le Roi félicite Alassane Ouattara suite à sa réélection à la présidence de la Côte d'Ivoire    Bolsonaro fait appel de sa condamnation à 27 ans de prison    Sarkozy bénéficie de quatre parloirs par semaine à la Santé    Pays-Bas : Des Marocains votent pour Geert Wilders malgré sa rhétorique xénophobe    Ballon d'or africain : Le PSG va lancer une grande campagne pour soutenir Achraf Hakimi    Emeutes GenZ : le Parquet dévoile le bilan des condamnations et des acquittements    Permis de conduire : La voiture intelligente « Smart Drive Test » est arrivée    Mendicité : Derrière la main tendue, un système d'exploitation inhumain    Casablanca : arrestation d'un quadragénaire soupçonné d'un viol accompagné de vol avec violence    La Rentrée Littéraire 2025–2026 : Trois jours d'échanges autour de la lecture et de la création littéraire    FCMT : 40 ans de passion et 30 ans de grandes marées    Rencontre. FCMT : Zakia Tahiri, le plan séquence d'une rebelle    Tourisme. Le Maroc accélère sa stratégie de conquête du marché américain    Présidentielle ivoirienne. Ouattara rempile    La FNM rend un vibrant hommage à Ali Amahan, figure majeure du patrimoine marocain    Santé : Après les manifestations et l'appel royal à l'équité, les disparités rurales reculent    Le groupe suisse Cicor acquiert les sites de Berrechid et de Cleveland auprès de Valtronic pour accroître sa capacité médicale mondiale    Lions de l'Atlas : Argentine et Iran pour les amicaux de Novembre ?    Relations Maroc–Union européenne : un pacte entre promesses et déséquilibres    Aïn Borja prison closed permanently due to safety concerns    Industrie cinématographique : La loi 18-23 a fait son cinéma... et maintenant ? [INTEGRAL]    Crise alimentaire au Malawi. Mutharika déclare l'état de catastrophe    Paul Biya réélu pour un huitième mandat à la tête du Cameroun    Cinéma : Le Festival de films émergents débarque à Lomé    50 ans de la Marche Verte : Dakhla sous l'objectif    Réunion jeudi du Conseil de gouvernement    Minerais critiques : entre Europe, Etats-Unis et Chine, le Maroc, futur hub stratégique ?    El Mansouri : « Nous révisons la loi 12.90 sur l'urbanisme en coordination avec l'Intérieur »    Santé: Tahraoui présente le bilan du Programme de réduction des disparités spatiales et sociales en milieu rural    Le Maroc et l'Espagne renforcent leur coopération face aux effets du changement climatique    Programme d'aide au logement : plus de 71 000 bénéficiaires recensés    Le temps qu'il fera ce mardi 28 octobre 2025    Les températures attendues ce mardi 28 octobre 2025    Sahara : Londres réaffirme son appui au plan d'autonomie proposé par le Maroc    1er Championnat mondial de handball U17 : ce soir, Les Lionceaux face aux Pharaons pour un dernier baroude d'honneur !    Derby de mercredi: le Wydad et le Raja communiquent    Ligue des Champions Féminine CAF 2025 : Dotation et programme    L'Arabie saoudite dévoile le « Sky Stadium », suspendu à 350 mètres du sol pour le Mondial 2034    Youssef En-Nesyri brille et guide Fenerbahçe vers un large succès en Turquie    Football d'entreprise : Le Maroc remporte la 7e édition de la Coupe du monde    Marrakech brille sur la scène internationale : l'Associated Press célèbre la ville rouge    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Andalousies Atlantiques : quand l'art fait mieux que la politique
Publié dans La Vie éco le 13 - 11 - 2013

Fille de juifs de Tinghir, Neta El Kayam n'avait, jusqu'à ce jour, jamais mis les pieds au Maroc. Pourtant, tout en elle, disait, criait celui-ci. Quand, la tête ceinte d'un foulard façon "sbnia" et dans une darija fluide sans l'ombre d'un accent, elle s'est attaqué, le bendir à la main, à des chansons chaabi mythiques, un frisson a parcouru le public.
Elle s'appelle Neta et eux, Omri, Benjamin et Elad. Leur participation à la 10e édition du Festival des Andalousies atlantiques qui s'est tenue le week-end passé à Essaouira en a pris plus d'un à la gorge. Elle a fait monter les larmes aux yeux car leurs voix, leur manière de chanter et de se tenir sur scène réveillait une mémoire ancestrale inscrite dans les gènes marocains. La mémoire de ces identités plurielles qui nous fondent et sur lesquelles le voile de l'amnésie est tombé. Devant elle surtout, Néta avec sa «chéda» et ce tempo de voix qui remonte des profondeurs du substrat marocain, l'émotion suscitée fut immense. Fille de juifs de Tinghir, Neta El Kayam n'avait, jusqu'à ce jour, jamais mis les pieds au Maroc. Pourtant, tout en elle, disait, criait celui-ci. Quand, la tête ceinte d'un foulard façon «sbnia» et dans une darija fluide sans l'ombre d'un accent, elle s'est attaqué, le bendir à la main, à des chansons chaâbi mythiques, un frisson a parcouru le public. Le temps s'est effacé. Elle était sa mère, sa grand-mère et, à travers elle, toutes ses aïeules – nos aïeules – se dressaient devant nous. Pourtant, il est important de le répéter, pour cette toute jeune femme au visage d'adolescente, c'était la première fois au Maroc. Comme pour le violoniste Omri Mor ou le pianiste Elad Levy. Quand, pour terminer son tour de chant, la descendante des El Kayam de Tinghir a pris la parole pour s'excuser auprès des Souiris de finir par une chanson à la gloire non de la ville qui l'accueillait mais de Casablanca dans une dédicace particulière à son grand-père qui n'avait jamais pu revenir dans sa terre natale depuis le jour du grand départ, quand elle s'est attaqué à ce dernier morceau avec une émotion évidente, alors les larmes retenues ont coulé. Sur les visages des juifs comme sur celui des musulmans présents côte à côte dans le patio de Dar Souiri.
Dédié à la musique andalouse sous toutes ses variations (al-ala, samaâ, maalouf, gharnati, matrouz, latino…), le Festival des Andalousies atlantiques est surtout ce lieu où l'amnésie se combat. Elle se combat par l'art et la culture à travers lesquels les frontières s'effacent et par le biais desquels l'autre s'affirme soi. Le Festival des Andalousies atlantiques est cet événement, sans doute unique non seulement au Maroc mais au monde, où juifs et musulmans retrouvent de nouveau le droit d'être ensemble pour dire, vivre et chanter leur histoire commune. Il est cet espace où les identités cessent d'être meurtrières pour redevenir plurielles et où chacun se reconnaît en l'autre. Cet automne 2013 célébrait le dixième anniversaire de cet événement iconoclaste. Une date importante pour ses fondateurs car la partie, au départ, n'était pas du tout gagnée. Pour la marquer de manière forte, l'Association Essaouira-Mogador a choisi de tourner le regard vers l'avenir en invitant aux côtés des grands maîtres – Mohamed Briouel (Fès) , Mohamed Amine El Akrami (Tétouan) , Abderrahim Souri (Essaouira)- toute une palette de jeunes talents musulmans et juifs. Pour les premiers, on citera Abir El Abed (Tanger), Marouane Hajji (Fès), Zaineb Afailal (Tétouan) et la benjamine Nouhaila El Kalaï. Pour les seconds, il s'est agi de Elad Levi (violon), Neta El Kayam (chant), Hanan Kaddosh (oud), Hagai Bilitzki (contrebasse), Hillel Amsallem (percussion), Natanel Ben Shitrit (darbouka), Omri Mor (pianiste) et Benjamin Bouzaglo (cantor). Si pour les musiciens et chanteurs musulmans, la provenance géographique était précisée, pour les juifs, le grand blanc régna. Leur qualité d'enfants d'Israélites marocains fut, certes, amplement rappelée mais il ne fut pratiquement jamais mentionné d'où ils venaient. Comme ces temps d'avant Oslo où le seul vocable autorisé était «el adou sahyoni», on a évité tant que faire se peut de prononcer un nom redevenu interdit : «Israël». Sauf quand, mettant délibérément et avec force les pieds dans le plat, Fahd Yata, le directeur du quotidien La Tribune, a rappelé que si le projet de loi sur la normalisation avec Israël récemment introduit par un député du PAM et soutenu par plusieurs partis politiques passait, eh bien tous, tant que nous étions, pour avoir été là à écouter et à applaudir Neta, Omri, Elad et Benjamin, serions passibles de prison. Car, pour fils et fille de Marocains qu'ils soient, pour porteurs du patrimoine culturel ancestral de la terre de leurs aïeux qu'ils ont choisi d'être, ces jeunes gens ont aujourd'hui pour pays Israël. Ils sont des Israéliens.
Or, avec une telle loi dans notre arsenal juridique, ils ne pourraient plus venir sur cette terre que leurs aïeux ont fécondée pendant deux mille ans ni nous, Marocains du Maroc, les inviter et les recevoir. Du coup, nous ne pourrions plus vivre de ces moments uniques comme celui où, ici à Essaouira, Neta El Kayam, israélienne d'origine marocaine, a chanté «El Qods» en duo avec l'artiste palestinien Maher Khaleel Diba, créant un émoi sans pareil et ravivant l'espoir tué par les politiques que la paix peut être possible dès lors que les âmes ont l'opportunité de communier. Nous ne pourrions plus rencontrer ces militants pacifistes juifs qui, en Israël même, se battent aux côtés des Palestiniens. Neta El Kayam en est une, Neta qui, par ailleurs, aspire à se voir octroyer la nationalité marocaine. Tout cela nous serait interdit et ce serait désastreux autant pour nous, Marocains, que pour la paix en Palestine.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.