Sur le marché européen, le manque de compétitivité des industriels du textile marocain par rapport à leurs concurrents tunisiens ne se dément pas. La comparaison des performances des deux fournisseurs maghrébins tourne à l'avantage de la Tunisie qui, malgré l'impact de la révolution du jasmin en début d'année 2011, conserve son rang de 6e fournisseur de l'Europe devant le Maroc (7e). Ainsi en témoignent les exportations textile-habillement tunisiennes, qui se sont chiffrées à fin 2011 à 2,7 milliards d'euros, contre 2,33 milliards d'euros pour le Maroc. Cette réalité s'explique par l'effort plus important consenti par les Tunisiens dans le renforcement de la politique de valorisation des produits. Ce point fort permet à la Tunisie de consolider sa position compétitive dans ses domaines d'excellence, tels la lingerie, le balnéaire, les vêtements professionnels et les jeans. En effet, pour ce dernier segment de l'activité habillement, la valeur des exportations tunisiennes vers le marché européen s'est hissée, à fin 2011, à quelque 346 millions d'euros contre plus de 153 millions d'euros à l'actif du Maroc. Le même constat est à faire pour les maillots de bain, les soutien-gorge, les chemises et les pantalons, dont les valeurs des exportations s'établissent à respectivement 98,69 M, 103,61 M, 88,37 M et 820,35 M d'euros contre 16,61M, 64,19M, 88,37 M et 462,79 M d'euros pour le Maroc. Autre élément capital : en dépit de leurs prix moyens plus élevés que ceux pratiqués par les Marocains, les articles tunisiens arrivent à percer sur le marché européen. C'est le cas pour les pantalons, dont les prix moyens sont de 14,99 euros pour la Tunisie et de9,48 euros pour le Maroc et aussi pour les jeans, dont le prix moyen pratiqué par les Tunisiens se situe à près de 16,92 euros contre 10,73 euros pour le Maroc. Pour dire que seule une meilleure valorisation des produits permet de faire la différence. Il n'en demeure pas moins que ces deux fournisseurs maghrébins du marché européen sont, aujourd'hui dans une mauvaise passe. Leurs exportations sont en perte de vitesse depuis des années, avec une accélération de la cadence en 2011, année où nombre d'industriels y ont laissé des plumes. François Limantour, le président du Cercle euro-méditerranéen des dirigeants textile-habillement (Cedith), attribue la mention «passable» en 2011 pour les exportations textile-habillement de la Tunisie et du Maroc vers les marchés européens, avec des progressions respectives limitées à 3,3% et 3,9% par rapport à 2010, alors que dans le même temps, les importations totales textile-habillement de l'Union européenne grimpaient de 9,8%. En somme, 2011 confirme la régression continue de ces deux pays, en termes de parts de marché. Cela s'est réalisé au profit de certains grands fournisseurs asiatiques (Bangladesh, Vietnam,Pakistan, Cambodge, notamment), dont les ventes vers l'Europe explosent. François Limantour, président du Cedith. «La Tunisie valorise mieux son offre exportabe» Les Echos quotidien : La Tunisie vend ses produits textile-habillement plus cher quele Maroc. Comment expliquez-vous cet écart de prix entre les deux pays ? François Limantour : Depuis plusieurs années, la Tunisie pratique une politique active de valorisation de son offre d'habillement en développant la cotraitance et le produit fini. Les vêtements mis sur les marchés d'exportation par les Tunisiens sont en général plus créatifs, plus élaborés et plus sophistiqués que ceux de la concurrence marocaine, turque ou asiatique. C'est cette politique, menée avec des soutiens et des encouragements publics qui permet à la Tunisie de bien résister au rouleau compresseur chinois et de figurer encore dans le peloton de tête des grands exportateurs mondiaux, par exemple en lingerie et en balnéaire. Pour les premiers mois de 2012, les deux pays se sont-ils inscrits dans la même tendance? Les statistiques disponibles à fin février montrent que les deux fournisseurs maghrébins ont cette année des trajectoires très voisines, contrariées par le climat économique européen morose et par une concurrence asiatique plus féroce que jamais. Pour les exportateurs marocains et tunisiens, 2012 s'annonce comme devant être une année particulièrement difficile. Je vous le confirme !
