L'hélium et l'hydrogène naturel, deux gaz respectivement utilisés dans l'industrie nucléaire et la production d'ammoniac et de méthanol, attirent des compagnies britanniques spécialisées dans la transition énergétique. Celles-ci prévoient d'intensifier leurs prospections après la découverte d'un potentiel prometteur. Et la liste pourrait s'élargir. Dans la course mondiale à la transition énergétique, le Maroc dispose d'importants atouts pour figurer dans le peloton de tête. Ses innombrables gisements potentiels de minerais critiques, tels que le lithium, le manganèse ou encore le cobalt, attirent des géants mondiaux de l'industrie automobile, particulièrement chinois, qui ont annoncé de lourds investissements dans la production de batteries pour véhicules électriques ou dans l'hydrogène vert. La future usine de Gotion High Tech à Kénitra, celles de BTR New Material à Tanger, qui devraient être opérationnelles à partir de 2026, ainsi que les projets d'hydrogène vert en cours, consolideront la position du Royaume en tant que hub mondial de ce virage écologique. Deux autres précieuses ressources pourraient sortir du sous-sol marocain et s'ajouter à cette liste de matériaux stratégiques : l'hélium et l'hydrogène naturel. Le premier est un gaz rare à usages multiples, notamment dans l'industrie nucléaire, tandis que le second, également appelé hydrogène blanc ou natif, est une forme d'hydrogène produite naturellement dans la croûte terrestre, sans intervention humaine ni émission de carbone. Une coentreprise britannique pour intensifier les recherches Le potentiel marocain aiguise les appétits des multinationales minières. Dernière annonce en date, celle faite le 25 juin relative à la création d'une coentreprise baptisée « HyMaroc » entre l'entreprise britannique Sound Energy et sa compatriote Getech Group, spécialisée dans la localisation de ressources énergétiques et minérales essentielles à la transition énergétique, pour poursuivre une étude de prospection sur l'hydrogène naturel et l'hélium au Maroc. Le 28 octobre 2024, les deux entreprises spécialisées dans la transition énergétique avaient déjà noué un partenariat pour explorer ces deux ressources dans le Royaume. La phase initiale de cet accord prévoyait une étude régionale conjointe dont l'objectif est d'identifier les zones d'intérêt potentielles pour une évaluation plus détaillée. Et c'est justement les résultats rassurants de ce sondage qui les a incités à consolider leur alliance. «L'étude régionale préliminaire a permis d'identifier des zones présentant un potentiel significatif pour ces gaz, justifiant ainsi des recherches complémentaires», révèlent-elles dans un communiqué. D'ailleurs, lors de l'annonce du premier partenariat, John Argent, vice-président des géosciences chez Sound Energy, déclarait : «Grâce à notre expertise opérationnelle, combinée aux outils géoscientifiques innovants de Getech, nous sommes bien placés pour ouvrir la voie à la libéralisation du potentiel d'hydrogène et d'hélium au Maroc». Deux trésors rares, aux usages stratégiques Quant au PDG de Getech, Richard Bennett, il estimait que les solutions géoscientifiques et les capacités d'IA de son entreprise «joueront un rôle crucial dans la conduite d'une exploration rentable dans cette région prometteuse». À travers leur joint-venture, Sound Energy et Getech négocieront conjointement des droits exclusifs, auprès de l'Office national des hydrocarbures et des mines (ONHYM) et du ministère de la Transition énergétique, pour l'exploration et l'exploitation des ressources d'hydrogène naturel et d'hélium. Getech n'en est pas à son premier projet d'hydrogène naturel au Maroc. En novembre 2023, la société britannique avait paraphé un accord avec l'entreprise de recherche allemande Leibniz Institute for Applied Geophysics (LIAG), membre du consortium HyAfrica, pour accélérer le développement de l'hydrogène naturel dans plusieurs pays africains, dont le Maroc. Si ce potentiel se confirme, le Royaume disposera de deux trésors rares et précieux dans des domaines stratégiques et pourrait attirer d'autres compagnies minières. Gaz rare à usages multiples, l'hélium est notamment utilisé dans l'industrie nucléaire comme fluide de fonctionnement dans les réacteurs nucléaires refroidis au gaz. Dans le domaine médical, mélangé avec l'oxygène, il soulage les patients ayant de grandes difficultés respiratoires ou souffrant d'asthme aigu. Ce gaz est également utilisé pour refroidir les appareils d'imagerie médicale comme les scanners. En 2023, les Etats-Unis ( 79 millions de mètres cubes) et le Qatar (66 millions) en étaient les deux premiers producteurs au monde. L'hydrogène naturel ou blanc est principalement utilisé dans la production d'ammoniac et de méthanol, de carburant dans les piles à combustible pour véhicules et dans l'industrie. Il peut également servir à la production d'acier, au transport maritime longue distance, et même à des applications plus larges de stockage d'énergie. D'importants gisements ont déjà été identifiés au Mali, en France, aux Etats-Unis, en Australie, en Amérique du Sud et en Europe de l'Est. Hélium : un potentiel prometteur découvert à Guercif Sound Energy et Getech ne sont pas les premières entreprises britanniques à évaluer le potentiel d'hélium du Maroc. Fin septembre 2024, leur compatriote Predator Oil & Gas avait annoncé la découverte d'un important gisement dans sa licence pétrogazière onshore à Guercif, dont les estimations varient entre 2,9 milliards de m3 – sur la base d'un scénario moyen global de 1,298% d'hélium et 16,95, selon un scénario global moyen de 4,006%. Des résultats issus d'un rapport sur les évaluations techniques du potentiel de ce gaz rare dans le prospect MOU-5 de cette mine. La compagnie prévoyait de lancer des opérations de forage en février dernier pour mieux évaluer ce potentiel. Elimane Sembène / Les Inspirations ECO
