Le mois de décembre coïncide avec la haute saison dans les services comptables des PME avec l'ouverture des travaux d'inventaire. Il faut tout boucler avant la fin de l'exercice, c'est-à-dire le 31 décembre, pour la majorité des sociétés. Mais attention au risque fiscal d'un inventaire «cocotte-minute» comme cela se pratique souvent dans les PME. Au sens de la réglementation, un inventaire consiste à recenser les actifs corporels et incorporels de l'entreprise, à s'assurer de leur existence et de leur valeur réelle. Le fisc surveille particulièrement les stocks utilisés parfois comme une variable d'ajustement du résultat imposable. S'affranchir de travaux d'inventaire expose l'entreprise à un rejet de la comptabilité et, donc, à une reconstitution du chiffre d'affaires en cas de contrôle fiscal. Effectuer un inventaire est une obligation prévue dans le Code de commerce. Toute personne physique ou morale ayant la qualité de commerçant doit procéder à l'enregistrement comptable des mouvements affectant le patrimoine de son entreprise ; ces opérations sont enregistrées de manière chronologique. L'objet d'un inventaire est de s'assurer au moins une fois par an de l'existence et de la valeur des éléments actifs et passifs du patrimoine de l'entreprise. Contrairement aux créances et aux dettes ou aux immobilisations financières (participations, placements), dont le contrôle et le suivi se font par des logiciels dédiés, le contrôle des actifs physiques s'effectue par un pointage. «En ce qui concerne les immobilisations corporelles, il s'agit de s'assurer de leur existence effective, mais aussi, si elles sont toujours opérationnelles, afin de les sortir éventuellement de l'actif car elles peuvent fausser la base de calcul de la taxe professionnelle», explique Mohamed Lahyani, expert-comptable, commissaire aux comptes, qui met en garde contre l'inventaire «cocotte-minute ou fast-food». Il s'agit de vérifier que la comptabilité correspond bien à la réalité et de la corriger si besoin, car des éléments peuvent être manquants ou abîmés, insiste l'expert-comptable. Largement utilisé dans les PME et les TPE, l'inventaire intermittent est généralement synonyme de comptage annuel. Par tradition et souvent dans la précipitation, l'opération se déroule dans les deux dernières semaines du mois de décembre. Mis sous pression, les employés des services comptables multiplient des tournées dans les autres départements, les ateliers ou les entrepôts de stockage pour pointer les ordinateurs, les machines, les meubles de bureau, les stocks de marchandises, de matières premières, etc. C'est aussi la période où les DAF et leurs équipes s'assurent que toutes les factures émises ou reçues sont bien en place et conformes. À l'inverse, l'inventaire permanent consiste à passer une écriture de stock à chaque entrée ou sortie d'une marchandise, matière première ou produit fini par exemple. Appelé également «Inventaire informatique», l'inventaire permanent est une pratique qui consiste à contrôler, évaluer et enregistrer entrées et sorties des stocks d'une façon constante au cours de l'exercice comptable, ce qui permet à l'entreprise d'être au courant en temps réel de la quantité, la composition de ses stocks ainsi que de leur valeur. Cette méthode souvent adaptée aux entreprises, dont les produits sont faciles à dénombrer et disponibles en petites quantités, nécessite parfois des moyens de contrôle (tels qu'un ERP) que peu de petites entreprises peuvent s'offrir. Une autre méthode est donc utilisée pour pallier ce problème. La «peine maximale» en cas de contrôle fiscal Sur le plan fiscal, ne pas procéder à l'inventaire des actifs et des passifs peut valoir des ennuis, notamment le rejet de la comptabilité, la reconstitution du chiffre d'affaires et la taxation d'office. C'est la «peine maximale» en cas de contrôle. L'inventaire relève de l'obligation de la tenue de la comptabilité prévue par l'article 145 du Code général des impôts (CGI) : «Les contribuables sont tenus d'établir, à la fin de chaque exercice comptable, des inventaires détaillés, en quantités et en valeurs, des marchandises, des produits divers, des emballages ainsi que des matières consommables qu'ils achètent en vue de la revente ou pour les besoins de l'exploitation». Dès leur entrée dans l'entreprise, comme pour les immobilisations, les stocks d'éléments achetés sont évalués à leur coût d'acquisition qui correspond à leur prix d'achat majoré des frais accessoires qui y sont directement rattachables. Ce sont, entre autres, les stocks de matières premières, de marchandises et autres approvisionnements. Les stocks présentent des risques parce qu'ils peuvent être utilisés comme une variable d'ajustement du résultat. Ce n'est pas par hasard que le mois de décembre est aussi la haute saison pour les transactions sur les fausses factures, la variation des stocks étant un produit imposable, certaines entreprises peuvent succomber à la tentation. La pratique la plus répandue et connue des inspecteurs des impôts consiste à écouler les stocks vers les réseaux de distribution en fin d'exercice et comptabiliser des retours en début d'exercice suivant. Au passage, les complices touchent des commissions sur ces ventes fictives. Ils sont aujourd'hui dans le collimateur de l'administration fiscale qui leur a porté des coups durs depuis l'année dernière. Le volume des fausses factures interceptées par le fisc a chuté de 70%. Et certains animateurs de ce marché ont écopé de peines de prison. L'article 213 du CGI, une arme atomique Sont considérés comme irrégularités graves au sens du Code général des impôts et entraîner la reconstitution du chiffre d'affaires de l'entreprise et l'imposition d'office : le défaut de présentation d'une comptabilité, l'absence des inventaires, la dissimulation d'achats ou de ventes dont la preuve est établie par l'administration, les erreurs, omissions ou inexactitudes graves et répétées, constatées dans la comptabilisation des opérations ; l'absence de pièces justificatives privant la comptabilité de toute valeur probante ; la non-comptabilisation d'opérations effectuées par le contribuable et la comptabilisation d'opérations fictives. Abashi Shamamba / Les Inspirations ECO