Après le départ de Tarik Senhaji pour ses nouvelles fonctions de président de l'AMMC, la nomination de Nasser Seddiqi à la direction générale de la Bourse de Casablanca ouvre une nouvelle phase pour la place financière. Fort d'un parcours construit au cœur de la régulation et des marchés de capitaux, le nouveau DG hérite de chantiers structurants, allant de la montée en puissance du marché à terme à l'amélioration de la liquidité, en passant par le développement du marché primaire et la structuration de la finance durable. La Bourse de Casablanca s'apprête à tourner une page importante de son histoire. Après le départ de Tarik Senhaji, qui aura marqué près de huit années à la tête de l'institution par une modernisation progressive des infrastructures et une ouverture accrue sur l'Afrique, la place financière s'engage dans une nouvelle séquence. À compter du 19 janvier 2026, Nasser Seddiqi prendra officiellement ses fonctions de directeur général, au terme d'une nomination unanime du Conseil d'administration. Cette transition intervient à un moment charnière, où les chantiers engagés appellent désormais une exécution opérationnelle et une montée en puissance du marché. Le choix de Nasser Seddiqi s'inscrit dans une logique de continuité stratégique autant que de consolidation. Son parcours, construit à la croisée de la régulation financière, de la supervision des marchés et des standards internationaux, répond à une exigence de crédibilité institutionnelle. Après plus de 25 ans d'expérience dans les marchés de capitaux, dont une trajectoire structurante au sein de l'Autorité marocaine du marché des capitaux (AMMC), il arrive à la Bourse avec une connaissance intime de ses mécanismes, mais aussi des leviers encore à activer pour renforcer son rôle économique. Un dirigeant issu de la régulation, au service de l'opérateur de marché Avant sa nomination, Nasser Seddiqi occupait la fonction de directeur du Pôle Métiers de l'AMMC, en charge notamment de la supervision des marchés, de la gestion d'actifs et des émetteurs. À ce titre, il a été directement impliqué dans les réformes qui redessinent aujourd'hui l'architecture du marché marocain, en particulier le lancement du marché à terme et l'intégration progressive des enjeux de finance durable. Son profil tranche avec celui d'un dirigeant orienté exclusivement vers la gestion. Il incarne une approche où la robustesse réglementaire, la transparence et la confiance des investisseurs constituent des prérequis à toute ambition de développement. Le marché à terme, pilier du nouveau cycle boursier Parmi les chantiers structurants qui attendent le nouveau directeur général figure en premier lieu la montée en puissance du marché à terme. Après son lancement institutionnel, l'enjeu est désormais opérationnel. Il s'agit de créer des volumes, d'élargir progressivement la gamme des instruments et d'ancrer ces produits dans les stratégies de gestion des investisseurs institutionnels. L'expérience de Nasser Seddiqi dans ce domaine est centrale. Ancien président de l'Instance de coordination du marché à terme, il maîtrise les exigences techniques liées à la gestion du risque, à la compensation et à la sécurité des transactions. Pour la Bourse de Casablanca, ce chantier dépasse la simple innovation produit. Il conditionne la capacité du marché à offrir des instruments de couverture, à améliorer la liquidité du compartiment actions et à se rapprocher des standards des places émergentes comparables. Liquidité et efficacité du marché, un enjeu structurel Au-delà des produits dérivés, la question de la liquidité demeure un défi de fond. Malgré une capitalisation significative, les échanges restent concentrés sur un nombre restreint de valeurs. L'amélioration de la profondeur du marché constitue donc un axe prioritaire, tant pour renforcer l'attractivité de la place que pour en accroître l'utilité économique. Cela suppose l'activation de leviers techniques tels que le prêt de titres, une meilleure articulation entre marché au comptant et marché à terme, ainsi qu'un dialogue renforcé avec les intermédiaires financiers. Sur ce terrain, le regard d'un ancien superviseur des marchés apporte une lecture pragmatique des blocages éventuels et des conditions nécessaires à une animation plus fluide des échanges. Renforcer et consolider le rôle du marché primaire La Bourse de Casablanca a incontestablement parcouru du chemin ces dernières années sur le terrain du marché primaire, comme en témoignent plusieurs introductions récentes ayant suscité un fort engouement des investisseurs, à l'image de celles de SGTM ou de Cash Plus, marquées par des niveaux de demande record. Ces opérations traduisent le travail de fond engagé par la place en matière de crédibilité, de structuration du cadre de marché et de confiance des investisseurs. Dans un contexte où les besoins d'investissement demeurent élevés, notamment pour accompagner la transformation industrielle et énergétique du pays, l'enjeu consiste désormais à consolider cette dynamique afin d'attirer un plus grand nombre d'introductions et de levées de fonds. Ce chantier s'inscrit dans la continuité des efforts menés par la Bourse de Casablanca sur la lisibilité du marché, la pédagogie auprès des entreprises et la coordination avec l'ensemble de l'écosystème financier. L'expérience de Nasser Seddiqi dans la relation avec les émetteurs et sa maîtrise des exigences réglementaires constituent ici un levier stratégique pour accompagner cette montée en puissance. Finance durable et structuration de l'offre ESG La finance durable figure également parmi les axes structurants du mandat qui s'ouvre. La Bourse de Casablanca a déjà amorcé ce virage avec le développement d'indices ESG et la promotion de bonnes pratiques de reporting extra-financier. L'enjeu désormais consiste à consolider cette dynamique et à en faire un segment crédible et lisible pour les investisseurs. Ce chantier s'inscrit dans la continuité des travaux menés par Nasser Seddiqi au sein de l'AMMC, où il a contribué à l'intégration des critères de durabilité dans le fonctionnement des marchés. À la tête de la bourse, il lui reviendra de transformer ces orientations en outils concrets, capables d'accompagner l'évolution des attentes des investisseurs institutionnels. Une ambition régionale à consolider Enfin, la dimension africaine demeure un fil conducteur. Sous l'ère Senhaji, la Bourse de Casablanca a renforcé son positionnement régional. La phase qui s'ouvre vise désormais à consolider cette ambition par des infrastructures robustes, une offre de produits crédible et une gouvernance alignée sur les standards internationaux. Le parcours international de Nasser Seddiqi, marqué par son implication au sein d'instances comme l'IOSCO, renforce cette projection. Sanae Raqui / Les Inspirations ECO