Banquier et passionné de sport Il fut un temps où le tennis national rayonnait dans le monde. Le public marocain vibrait chaque semaine au rythme de Younes El Aynaoui, Hicham Arazi et Karim Alami. Les trois mousquetaires portaient haut le drapeau national, enchaînant les succès dans les tournois ATP, les Grands Chelems et les Masters Series. Leur époque dorée s'étale de 1992 à 2004, entre la victoire fondatrice d'El Aynaoui face à Thomas Muster au Grand Prix Hassan II, et l'épopée australienne d'Arazi en 2004. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : huit quarts de finale en Grand Chelem pour El Aynaoui et Arazi, une finale à Monte Carlo pour Arazi, une 14e place mondiale pour Younes en 2000, des victoires face à Sampras ou Agassi, et l'épopée de Coupe Davis en 2002. Tout cela sous le regard bienveillant de la FRMT, alors dirigée par Mohamed Mjid, paix à son âme. Un engouement populaire, une visibilité internationale... et, pourtant, ces exploits furent davantage le fruit de leur investissement personnel que d'un encadrement structuré. Car après leur retrait, c'est le néant. Pas la moindre performance notable depuis 2004, hormis un titre en challenger à Marrakech en 2007 et une demi-finale ATP à Munich en 2008, signés El Aynaoui. El Arej, Ouahab, Tahiri ? Des éclats sans lendemain. Le tennis marocain a alors sombré dans une période de disette totale. Autre signe du déclin : l'abandon du mythique complexe Al Amal, berceau de tant de souvenirs glorieux. Délaissé, en ruines, il symbolise une époque perdue. Le nombre de tournois internationaux a également chuté. On a manqué l'opportunité d'intégrer les trois mousquetaires aux sphères décisionnelles. Ils auraient pu transmettre, structurer, relancer. Mais, depuis 2022, le vent tourne. Une vraie remise en question s'opère. Les jeunes issus des clubs nationaux montrent un potentiel prometteur. Et les signes d'un renouveau sont là. Premier jalon fort : la nomination de Hicham Arazi comme capitaine de l'équipe de Coupe Davis. Avec lui, la culture de la gagne est de retour. L'équipe n'a perdu aucune rencontre, et s'apprête à affronter la Colombie pour accéder au Groupe Mondial 1. Une victoire ouvrirait les portes des qualifications pour la phase finale. Deuxième signal : la FRMT met désormais les moyens. Elle prend en charge intégralement les frais des meilleurs joueurs. C'est le cas de Yassine Dlimi, entraîné par Arazi lui-même. Troisième évolution : l'émergence de nouveaux tournois internationaux. Au 4 M15 de juin s'ajoutent deux nouveaux tournois en fin d'année : le M15 d'Agadir et le M25 de Marrakech. Objectif ? Offrir aux Marocains une compétition de haut niveau à domicile, sans devoir partir à l'étranger. Quatrième axe, et non des moindres : la future rénovation du complexe Al Amal. Les problèmes juridiques et administratifs sont en voie de résolution. Le Grand Prix Hassan II pourrait y revenir, avec une montée en catégorie vers l'ATP 500, à l'image de Dubaï ou Bâle. Le projet est ambitieux : court central rénové, augmentation de la capacité, espaces de restauration, hôtel 5 étoiles, zone pour concerts et spectacles. Un véritable temple du tennis marocain en devenir. Ces efforts sont louables, mais ils ne suffisent pas. Pour que le tennis retrouve sa place naturelle, il faut aller plus loin. Promouvoir le tennis pour tous, construire des courts de proximité, allouer un vrai budget à la FRMT, soutenir les clubs, intégrer les anciens champions aux instances, et surtout créer un centre élite de formation avec des coachs de haut niveau. Car les talents sont là. Yassine Dlimi, Reda Bennani, Karim Bennani, Yasmine Kabbaj, Aya El Aouni, Malak El Allami... Une génération pleine de promesses. Yassine Dlimi est devenu l'un des meilleurs joueurs universitaires américains. En 2023, il gagne son premier M15 à l'USM et atteint trois finales. En 2025, il joue cinq finales Futures, dont une au M25 de Kigali. Reda Bennani, 15e mondial junior en 2024, enchaîne les performances chez les pros. Il remporte le M15 de Tanger en 2025. Tous deux ont progressé de la 1100e à la 600e place mondiale en quelques mois. Karim Bennani et Yasmine Kabbaj ont aussi soulevé des trophées en 2025. Yasmine pointe à la 430e place mondiale. Une performance remarquable. Alors, peut-on rêver à nouveau ? Peut-être pas de nouveaux Arazi ou El Aynaoui à court terme. Mais si ces jeunes sont bien encadrés, s'ils reçoivent le soutien nécessaire, ils peuvent viser le Top 200, voire le Top 100 mondial d'ici peu. Encore faut-il que les sponsors s'engagent. Sans leur appui, les espoirs risquent de s'éteindre prématurément. Mais avec un peu de volonté collective, pourquoi ne pas espérer revivre des nuits blanches de tennis, comme au bon vieux temps ?