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Des Nouvelles de Tchétchénie
Publié dans Le Soir Echos le 30 - 09 - 2010

Pour nous désintoxiquer d'une confiance sourde et aveugle dans le monde tel qu'il est, rien de tel que l'ouvrage déchirant intitulé « Des nouvelles de Tchétchénie » (Paris-Méditerranée/ Eddif, 2005). Loin de la douceur de vivre à laquelle nous aspirons tous et dont profitent les heureux, il y a les tanks, les mines, les bombes et les grenades, les épouses et les filles violées, les jeunes soldats mués en gangsters et en tortionnaires. Cette réalité tragique des viols et des massacres, des écrivains tchétchènes et russes la restituent avec son lot de meurtrissures et de larmes, toute la géographie purulente de l'alarme qui ne cautérise pas et de la violence qui gagne comme une gangrène. La dignité est profanée maniaquement.
Tout le monde devrait lire « Des nouvelles de Tchétchénie » et aussi « Paysages de guerre sur fond de Tchétchénie » de Juan Goytisolo (Circé, 1997). Huit ans plus tard, les nouvellistes, dont l'écrivain espagnol préface le recueil, semblent écrire l'oreille collée sur un cœur qui va cesser de battre, tandis qu'un guerrier, fou de haine ou d'impuissance, pointe son arme.
Voici Vladimir Kiverstsky qui vit à Saint-Pétersbourg et qui a recueilli le récit d'anciens « kontrakniki » (soldats mercenaires de l'armée russe) blessés en Tchétchénie et soignés à l'Académie militaire de sa ville : « Et on l'a emmenée au sixième étage, on a satisfait sa lubricité de femelle, pour la dernière fois… Hi-hi… Et après, on a attaché autour d'elle des grenades F-1 et on l'a jetée par la fenêtre. Elle n'a même pas eu le temps de crier : à la hauteur du deuxième étage, toutes les grenades ont explosé. Elle a été déchiquetée. Pas un morceau ne s'est posé par terre… » C'est un gosse qui écoute le récit de son père ivrogne revenu amputé de sa guerre en Tchétchénie. Guerre ? Vous appelez ça guerre, mais alors comment s'appelle la barbarie ?
Machar Aidamirova a écrit « La Zatchistka » (littéralement : nettoyages), tandis que Moussa Akhmadov évoque une bougie qui brûlait dans le vent. On se souviendra d'Achmin, qui a trouvé du travail dans une organisation humanitaire arabe. Veuf, il va unir son chagrin à l'amour d'une jeune veuve qui est mère, et aussi désespérée que lui. La délicatesse du récit se faufile comme un intrus merveilleux au milieu des décombres de Grozny.
Soultan Iachourkaev est, lui, l'auteur d'un roman, « Carapiny na oskolkah » (Balafres sur éclats d'obus), paru chez Gallimard en 2005. Sa nouvelle « Les pommes de terre » contient cette question : « Jusqu'où les monstres ont-ils entraîné les enfants ? », mais l'évocation dantesque des « nettoyages » ethniques ne tarit pas le lait de la tendresse humaine que des mères ou des grand-mères préservent jusque dans l'épicentre de la terreur. Le lecteur en vient à dessiner des visages et des corps, à entendre les mots inscrits ou tus.
Les protagonistes de l'horreur perpétrée, subie ou combattue, nous les rencontrons dans « Des nouvelles de Tchétchénie » comme la gorge rencontrerait un clou. C'est la gorge du monde qui vomit ainsi son lot d'horreurs consenties.
Alors souvenons-nous de ce qu'écrit, en préface, Andrei Babiski : « La guerre de Tchétchénie est un territoire où le désespoir grandit sans cesse. » « Des nouvelles de Tchétchénie » nous dit que ces écrivains veulent quelque chose : la justice et la paix. Des rêveurs ? Peut être, mais chacune de leurs phrases est gagée sur leurs larmes.
« La Demande en mariage » de Zamboulat Idiev, auteur tchétchène né en 1964, est un des joyaux de ce chapelet ensanglanté. Désignant la collaboration avec l'ennemi cruel et perfide comme, parfois, la seule issue à la survie, ce texte enfonce le lecteur dans l'intime d'un énorme malheur collectif et c'est la face défigurée de l'homme d'aujourd'hui, le visage révulsant de notre début de siècle qui, soudain, se décape des confettis publicitaires pour désigner, sans conteste, la vraie marque de l'époque, son réel insécable : l'effroi travesti en politique , la haine qui danse comme un fantôme plus vivant que les vivants qui l'alimentent. Zamboulat Idiev suggère cela avec une noblesse de cœur qui délivre une leçon à méditer longtemps. Mais la lecture est-elle le seul vice impuni ?


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