CHAN 2024: les Lions de l'Atlas battent la RDC et se qualifient pour le quart de finale    L'Algérie arme la migration clandestine... Un nouveau chantage politique envers l'Europe    El Jadida : Clap de fin des festivités du Moussem Moulay Abdallah Amghar    Sous les feux d'artifice: Clôture triomphale du Moussem Moulay Abdallah Amghar    Le Roi Mohammed VI félicite le président indonésien    Affaire Potasse au CIRDI : Zachary douglas nommé arbitre à la demande du Maroc    Le Sud de la France en alerte face à un danger élevé de feux de forêts    «Le grand Israël» : Le Maroc signe une condamnation des propos de Netanyahu    Palestine : Ahmed Raissouni appelle les pays arabes à rendre leurs armes à «la résistance»    L'Espagne toujours en alerte maximale face à la canicule et aux incendies    Grève à Air Canada: Ottawa ordonne la reprise des vols    Liban : Le Hezbollah jure de ne pas céder son arsenal    Les dirigeants européens veulent collaborer en vue d'un accord de paix global en Ukraine    Le régime algérien muselle la presse : de nouvelles sanctions frappent des chaînes locales après la couverture du drame de l'autocar    Attaquer Hammouchi, c'est agresser l'Etat marocain    Espagne: Un centre marocain demande une enquête sur les actes terroristes du Polisario    CHAN 2024 / Groupe B : Madagascar double la Mauritanie et rejoint les quarts    Prépa CDM Futsal féminin : Les Lionnes vers le Brésil    SM le Roi félicite le Président de la République gabonaise à l'occasion de la fête nationale de son pays    CHAN 2024 : Dimanche de qualification pour les Lions botolistes face aux Léopards congolais ?    MAGAZINE : « Carte de Séjour », le livre qui métisse des liens    Bilan de la Bourse de Casablanca cette semaine    CHAN-2024 : Le Maroc déterminé à gagner le match contre la RD Congo    Le temps qu'il fera ce dimanche 17 août 2025    Le temps qu'il fera ce dimanche 17 août 2025    Tourisme. Six mois de bonheur pour la destination Maroc    ONP: repli des recettes de pêche côtière et artisanale    EUA: Trump confirme et applique son choix protectionniste et unilatéraliste    Prévisions météorologiques pour le dimanche 17 août 2025    Moroccan Royal Armed Forces present at AFRICOM leadership handover    Diaspo #402 : Abdelaali El Badaoui, driving social change through holistic health    USA : l'athlète marocain Hassan Baraka réussit l'exploit du tour de Manhattan à la nage    CHAN 2024 : Le Maroc s'attend à «un match très disputé» face à la RDC (Tarik Sektioui)    Feux de forêts : le Nord du Royaume sous la menace d'un risque extrême    Le fonds souverain norvégien porte ses avoirs boursiers marocaines à 270 millions de dirhams    Sahara : l'appui exprimé par Jacob Zuma pourrait marquer «le début d'un infléchissement stratégique dans la position de l'Afrique du Sud», note The Corporate Guardian    Motril enregistre 4 358 passagers vers Tanger-Med sur un total de 60 512 durant l'OPE    Boulemane: découverte de trois dents fossilisées de dinosaures géants datées de la période Bathonien    Oujar : La tragédie du "Lisbon Maru" est un message humanitaire, et le Maroc et la Chine sont des partenaires pour la paix mondiale    L'ambassade de Chine à Rabat commémore le 80e anniversaire de la victoire des Alliés avec la projection d'un documentaire chinois    Justice : Coulisses d'une réforme jonchée d'épines [INTEGRAL]    Le dirham s'apprécie de 1,3% face au dollar    Le Maroc désigne l'agence Rooster pour représenter son tourisme au Royaume-Uni et en Irlande    Le duo fraternel Belmir captive Martil lors du Festival des plages Maroc Telecom    Reportage - Moussem Moulay Abdallah Amghar : un formidable catalyseur économique et social pour toute une région    Maroc – Belgique : Belgica Biladi, 60 ans d'immigration dans une exposition et un ouvrage    Les températures attendues ce samedi 16 août 2025    À Tanger, le rappeur Muslim illumine la scène du festival de plage Maroc Telecom    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Le Code pénal au banc des accusés
Publié dans Le Soir Echos le 10 - 03 - 2010

Samedi 6 mars, 14h45.  La salle de conférence de l'hôtel Ibis de Rabat est archicomble. L'assistance à majorité féminine commence à s'impatienter, alors que des retardataires cherchent toujours un siège pour s'asseoir. «Désolée pour ce retard. Le procès s'ouvrira dans quelques minutes ! Les acteurs prennent, juste, un moment pour se préparer», lance au microphone Aatifa Timjerdine, la coordinatrice nationale du réseau Anaruz réunissant une cinquantaine de centres d'écoute des femmes victimes de violence. Cet après-midi, des associations du Maroc entier se sont données rendez-vous, ici, pour assister à un procès pas comme les autres. Il s'agit d'une mise en scène montée par les membres d'Anaruz dans le but de «poursuivre» une loi «injuste».  Le procès symbolique porte le thème «Ensemble pour un Code pénal équitable». Les acteurs enfilent un ruban de couleur verte et quittent les coulisses improvisées à quelques mètres de la salle de conférence. Aatifa Timjerdine reprend son microphone et se place au pupitre : «Nous avons toujours souffert d'un Code pénal inéquitable basé sur une philosophie patriarcale, purement masculine. Il marginalise la personne et lie les crimes de la femme aux mœurs».
Mesdames, messieurs, la Cour ! Silence, le juge, qui ne pouvait être qu'une femme, Me Khadija Rougani (barreau de Casablanca), déclare immédiatement la séance ouverte. Devant le pupitre se place l'avocate de la défense, Me Naïma El Guellaf (barreau de Rabat), et face à elle une petite table derrière laquelle s'assoit Me Mohamed Almou (barreau de Rabat), pour jouer le rôle du procureur. Dossier 1/2010 : Larbi est poursuivi pour violence conjugale, selon l'article 404 du Code pénal. Sa femme, Nejma doit répondre de l'accusation d'avortement prémédité (article 454). Tandis que Jaouhara, responsable d'un centre d'écoute Anaruz, et le couple Hamman et Aïcha sont poursuivis pour avoir aidé Nejma dans sa fugue du foyer conjugal. «Madame le juge, je vais vous dire la vérité : ma femme ne veut pas partager le lit avec moi ! Qu'est-ce que vous voulez que je fasse ? Il faut qu'elle obéisse ! L'acte du mariage, je l'ai bien payé de ma poche, donc j'ai le droit à tout ce que je veux !» Les propos de Larbi suscitent des rires et des rougissements dans «la Cour» où l'on suit le procès avec le plus grand intérêt. Appelée à la barre, Nejma, visage meurtri, lève la tête pour crier : «Il m'a frappée et m'a renvoyée de la maison à minuit après m'avoir violée, car ce rapport sexuel, je n'en voulais pas !  Le médecin que j'ai consulté, ensuite, m'a prescrit un repos de 22 jours. Et, étant donné mon état de santé lamentable, il m'a recommandé d'avorter, alors je l'ai fait». Les trois autres accusés, eux, expliquent avoir tout simplement hébergé une femme en détresse et s'indignent des poursuites dont ils font l'objet pour un acte qu'ils qualifient d'humain : «Nejma a frappé à notre porte le visage couvert de sang, elle avait un pyjama et ne savait pas où aller. Vous vouliez qu'on la laisse dans la rue ?». Hamman et sa femme avaient cru bien faire en recommandant à Nejma d'aller à l'association qui l'a hébergée dans un centre d'accueil. Le procureur se lève pour interroger Jaouhara : «C'est votre association qui a conseillé à Nejma d'avorter ?». La responsable associative ne nie pas avoir eu connaissance de la grossesse de Nejma et souligne que cela devenait un danger pour sa santé. Jaouhara indique aussi que la violence du mari a entraîné un traumatisme chez sa femme nécessitant un soutien psychologique. Le procureur, homme de marbre, focalise son plaidoyer sur les articles 453 et 454 incriminant l'avortement qui, sans l'autorisation du mari et du délégué médical, reste un crime. «Larbi a le droit d'être un père, mais il en a été privé ! Le Code pénal punit l'avortement et sévèrement lorsque la vie de la femme n'est pas en danger et qu'il n'est pas autorisé par les parties concernées. Et le viol dont vous parlez n'est pas recevable, il est même annulé dans l'article 486 du Code pénal. Le débat est clos, monsieur le juge !». La présidente de la Cour toute surprise, fait une petite remarque, l'air enjoué : «Monsieur le procureur, je vous rappelle que je suis  Madame la juge !». Eclats de rires dans toute la salle. Le procès symbolique montre à quel point la loi se conjugue au masculin, même dans la mentalité des membres de la Cour. La partie de la défense, Me Naïma El Guellaf, est offusquée : «La composition de la société n'est pas une recette. Un acte de mariage ne peut pas être synonyme du pouvoir absolu de l'homme sur la femme. L'avortement, à l'instar d'autres pays, relève de la liberté de la femme vis-à-vis de son corps. Le Maroc a ratifié plusieurs conventions garantissant ce droit, il doit, aujourd'hui, tenir ses engagements». Un plaidoyer pour la femme, contre les discriminations dont elle fait les frais dans le Code pénal : «Nous prions la Cour d'accorder son indulgence à Nejma et de rejeter les poursuites contre les trois personnes l'ayant aidée sur le plan humain».
La Cour, après avoir traité une deuxième affaire (dossier 2/2010) concernant la différence entre deux types de viol : l'un ayant provoqué une grossesse et l'autre une défloraison (article 486 et 488 du Code pénal), prend le temps de délibérer. Une dizaine de minutes lui ont suffit. A 17h, le verdict est prononcé : «Concernant votre demande de porter le Maroc à appliquer les articles des conventions signées, la Cour se déclare non compétente. Concernant le délit de Larbi, la Cour condamne ce dernier à être interné trois mois dans un centre psychiatrique et à payer une amende de 20.000 DH, conformément à l'article 404». Larbi devra aussi purger 1 an de prison pour le viol de sa femme, tandis que les autres accusés, y compris l'épouse, ont été acquittés. Quant à la seconde affaire, les viols et les harcèlements sexuels vaudront aux accusés cinq années de prison. Le procès symbolique a soulagé les femmes, exorcisées même les peines de certaines ; mais pour que le Code pénal soit «féminisé» réellement, il faudra plus qu'une dizaine de minutes.
leïla hallaoui


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.