Maintenant au moins nous sommes rassurés. Des journalistes étrangers savent tout sur nous et ils savent même ce que nous ne savons pas sur notre propre vie. Oui mais quel mystère la dedans? Les journalistes étrangers ont l'habitude de se mêler des affaires des autres, ils savent tout sur tout et sur tout le monde. Des encyclopédies complètes. C'est leur affaire après tout. Bien, donc, quand ils parlent du Maroc ça fait partie de leur compétence immense, illimitée, sans bornes et sans garde-fou. On accepte cette ingérence et nous les remercions pour nous ouvrir les yeux sur ce qu'ils croient que nous sommes. Bien sûr ils ont pas mal de gros problèmes chez eux, et malgré tout, ils trouvent le temps et l'esprit pour s'occuper de nous. Le surendettement de leur pays? La note dégradée par les agences de notation? La montée des actes de violence et d'incivilité? Le recul diplomatique? La crise politique qui va encore une fois balayer le gouvernement ? L'ensauvegement de la société? Tout ça n'est rien pour le journaliste étrangers. Il y a mieux à creuser ailleurs. Si cela peut les soulager, un article à propos du Maroc a autant d'impact qu'un pet de crevette dans l'océan. Ça ne fera pas un tsunami mais ça doit rapporter assez pour brader sa crédibilité. Le média étrangers ressemble plus à une page Facebook d'une adolescente affligée par l'acné. Et ça marche, le nombre de vues est en constante augmentation. Que demande le peuple? On en est là dans ce pays étranger. Avant les médias ne recrutaient que de grosses pointures. Des signatures. Aujourd'hui, on fait appel à de petits calibres, certains les appellent petites frappes, mais entre nous ce n'est pas classe, qui acceptent des salaires de misère. Mettons nous d'accord, cela ne veut absolument pas dire que le mal est général, non. Les grands journalistes étrangers, il y en a et ils font du grand journalisme. Seulement les pratiques nuisibles de certains de leurs confrères jettent le discrédit sur un beau métier. Mais, disons le, tout cela ne dérange guère les Marocains. Quand ils réfléchissent à leur avenir, ils ne posent pas les journaux étrangers sur la table. Ils n'ont pas besoin de savoir ce que pensent les étrangers de leur politique ou de leur stratégie économique. Est-ce qu'on a attendu de savoir ce que pensent les autres de notre projet de construction des stades ? Non. Et pour la construction du port TangerMed? Et pour l'autoroute Tiznit-Dakhla? Et pour l'industrie automobile et aéronautique ? Non. Alors? Tout va bien. Quand on a toujours rêvé d'être le meilleur, le gardien de la bien-pensance et du droit chemin, il peut arriver qu'on déchante. Je ne sais pas comment finissent les règnes mais je comprends mieux maintenant comment finit un rêve. Dans quelques jours, le Maroc va inaugurer le stade Moulay Abdallah avec un match contre le Niger. Le premier jour de mise en vente des billets, il s'en est vendu plus de 47.000 tous par internet. Recette? 1,4 million d'euros. En une journée. C'est un petit exemple de ce qu'on peut accomplir quand on règne bien. Il y a des règnes qui renaissent chaque jour. Cela dit, on remercie quand même tous les détracteurs étrangers du Maroc. En publiant des articles sur le royaume, ils contribuent à son rayonnement. Peace and love. La crevette peut se lâcher.