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Peines alternatives : vers une humanisation de la Justice pénale ?
Publié dans L'opinion le 07 - 01 - 2021

Prié de se placer à la hauteur des normes internationales, le Maroc s'apprête à introduire les peines alternatives à l'emprisonnement dans son code pénal, un dispositif très attendu par le corps judiciaire. Face à l'échec de la logique des sanctions, l'approche éducative et humaniste s'impose.
Le code pénal marocain est devant un défi majeur, celui de l'humanisation portée par une nouvelle réforme qui tarde à voir le jour. Cette réforme menée par le ministère de la Justice sur la base des travaux d'une commission spéciale composée des représentants de tout le corps judiciaire, à savoir des avocats, magistrats et académiciens de droit, vise à introduire de nouvelles peines alternatives à l'emprisonnement. L'objectif est de soulager les établissements carcéraux, très encombrés, dont 75% sont en état de surpeuplement.
Eduquer au lieu de punir
Il s'agit pour le Maroc de s'aligner aux normes internationales en matière pénale sachant que le code pénal tel qu'il est conçu aujourd'hui semble incapable d'accomplir sa vocation de dissuasion et de réduction de la criminalité qui ne cesse d'augmenter au fil des années, en témoigne les études qui prouvent son peu d'efficacité à prévenir la récidive. Le projet de loi apporte de nouvelles peines de substitution à la privation de liberté, applicables aux peines de courtes durée (inférieures à 2 ans). Plusieurs formes sont envisagées : travail d'intérêt général, surveillance électronique mobile, amende journalière et limitation de certains droits, etc. La philosophie de cette réforme consiste à infléchir le code pénal vers la primauté de l'éducatif sur le répressif. L'enjeu est de taille : humaniser la justice et dépasser la logique de la sanction qui n'a pas fait ses preuves. Contacté par « L'Opinion », de nombreux experts (avocats, magistrats et savants de droit) nous ont expliqué les dessous de cette réforme et son apport à la baisse de la criminalité.
L'emprisonnement : coût social élevé Le projet de loi entend soulager les prisons des personnes condamnées à des peines de courte durée qui constitue plus de 49% de la population carcérale. Dans certains cas, l'emprisonnement est parfois contre-productif et peut avoir des conséquences sociales et psychologiques très lourdes dans la mesure où il expose les détenus au risque des mauvaises fréquentations, ostracisation sociale, sachant qu'une partie d'entre eux sont des gens ordinaires non imprégnés de culture criminelle. « La société marocaine excommunie les anciens détenus, ce qui rend la réinsertion impossible », estime Mohammed Bouzlafa, chercheur en droit pénal. S'ajoute à cela le coût élevé de la détention, un prisonnier coûte environ 2800 dirhams par mois selon les estimations, soit un SMIG.
Bracelet électronique : Libérer la détention provisoire
Cet assouplissement de la procédure pénale est très attendu par les professionnels de la Justice et notamment les avocats, qui font état de l'ancrage de la culture de l'emprisonnement chez les juges d'instruction et les procureurs. Lesquels recourent souvent à l'incarcération pendant la garde à vue et la détention provisoire. « La détention est la règle générale dans le système judiciaire marocain », déplore Mohammed Majdi, avocat pénaliste au barreau de Rabat, qui nous a expliqué que les avocats peinent à obtenir une poursuite en état de liberté, « c'est tellement dur », a-t-il remarqué, ajoutant sous réserve que « Les juges, parfois, évitent de froisser les plaignants en mettant instantanément l'accusé en prison ». Selon l'avocat, « les juges ne doivent pas être une machine d'incarcération.
Même avis pour Hassan Birrouaine, bâtonnier au Barreau de Casablanca, qui estime que l'emprisonnement est une mesure exceptionnelle, « la règle est la poursuite en état de liberté ». Ceci est d'autant plus nécessaire que plusieurs personnes acquittées par la justice ont dû subir la tourmente de la cellule pendant la durée de l'instruction ou du procès, ce qui nous a été confirmé par plusieurs témoins. À ce point, le ministère prévoit l'usage de la surveillance électronique par un bracelet comme alternative à la détention provisoire. Travaux d'intérêt général, assignation à résidence : un projet encore timide. Le projet de loi réduit les peines alternatives aux cas de détournement de fonds, abus de pouvoir, trafic d'organes et exploitation des mineurs. Or, le champ d'application de ces peines pourrait être élargi aux délits liés à la violence conjugale, à la violence des mineurs, au hooliganisme, à l'usage d'alcool et des stupéfiants et d'autres crimes financiers. Ces cas peuvent être sanctionnés par des travaux d'intérêt général.
Quoique le nouveau projet de loi ne prévoit pas la nature des travaux et fixe seulement la durée à deux heures pour un jour d'emprisonnement au service d'une association ou personne morale, d'autres pistes sont envisageables. M. Bouzlafa préconise d'exiger les personnes condamnées pour violence conjugale à travailler dans les associations de lutte contre les violences à l'égard des femmes: « Ceci sera plus efficace pour la rééducation que la réclusion », a-t-il argué. Les travaux d'intérêt général seraient bénéfiques pour lutter contre hooliganisme, selon Khalil Boubhi, membre de l'Amicale Hassania des Magistrats Marocains, qui recommande de substituer les peines de réclusion surtout pour les mineurs par des travaux ménagers dans les stades.
Pour ce qui est des délits financiers (chèques sans provision par exemple) ou ceux liés à la corruption, l'assignation à résidence est vivement recommandée par les experts auxquels nous avons parlé, ils recommandent d'élargir la résidence surveillée à ce genre d'infractions dont le coût soit supporté par la personne condamnée. Par ailleurs, le rappel à loi semble également une piste à envisager au même titre que les travaux d'utilité publique, l'Avocat Mohammed Majdi estime que c'est un moyen de prévenir les délits anodins sans salir le casier judiciaire.
L'Union Européenne prête à assister le Maroc
L'application des peines alternatives peut, par les moyens qu'elles exigent (ressources humaines, moyens matériels, formation des juges, etc.), paraître onéreuse, pas question pour Mohammed Bouzlafa, ex-membre de la commission de la procédure pénale, qui nous a indiqué que la Commission européenne ainsi que d'autres organismes internationaux sont prêts à débloquer les fonds pour accompagner le Maroc dans cette réforme pénale. Outre cela, la réduction de la population carcérale permettra à l'Etat d'épargner des sommes importantes qui peuvent être allouées à l'exécution des peines alternatives.
Bien que très attendu, il est peu probable que ce projet de loi sorte avant la fin de la présente législature, le texte est envoyé au Parlement dont la date de discussion dans la Commission concernée n'est pas encore programmée. Le ministre de la Justice nous en dit plus (voir les trois questions).

Anass MACHLOUKH
3 questions à à Mohammed Benabdelkader
« Le législateur marocain va octroyer aux juges un pouvoir souverain pour l'application des peines alternatives, selon la nature de l'infraction et le profil du condamné »
Mohammed Benabdelkader, ministre de la Justice et des libertés, a répondu à nos questions sur les détails de la nouvelle réforme du Code pénal.
- La sortie du projet de loi est prévue dans cette législature ou sera-t-elle ajournée à l'après 2021 ?
- Aujourd'hui, et après plusieurs stades de discussions approfondies autour du sujet, le projet précité existe au niveau de la Chambre des Représentants au parlement, nous avons terminé la discussion générale du texte au sein de la commission de justice, de législation et des droits de l'homme. Et c'est à l'institution parlementaire qu'incombe, actuellement, la tâche d'accélérer le processus d'adoption du texte vu les compétences qu'elle a en matière d'adoption des textes législatifs
- Parmi les peines, on trouve l'assignation à résidence qui existe déjà dans le code pénal, y a-t-il des contraintes dans son application dans le code pénal actuel ?
- On doit, tout d'abord, faire la distinction entre la résidence obligatoire prévue par le code pénal actuel et le placement sous surveillance électronique. La résidence obligatoire constitue une peine criminelle principale et ne se prononce par les tribunaux que pour des infractions bien déterminées, alors que le placement sous surveillance électronique prévu par le projet du code de procédure pénale est une mesure octroyée aux juges d'instruction en tant qu'alternatifs à la détention provisoire, ainsi comme une peine alternative.
- Vous avez parlé d'une commission chargée d'approfondir le débat sur cette réforme, pouvez-vous nous en parler davantage (à propos de sa composition et l'état d'avancement de ces travaux) ?
- Le ministère de la Justice a entamé des discussions approfondies avec tous les acteurs concernés, et par conséquent nous avons créé une commission chargée de mettre en œuvre une vision globale pour l'application des peines alternatives, dont la composition comprend tous les intervenants concernés par l'élaboration et l'exécution de la politique pénale (magistrats, avocats, professeurs universitaires, et d'autres intervenants). De même, le projet de procédure pénale prévoit la création d'une commission nationale qui serait chargée de l'exécution des peines alternatives.
Recueillis par A. M
Encadré
Bracelet électronique : Bientôt au Maroc ?
Le placement sous surveillance électronique est une technique largement répandue, surtout dans les pays occidentaux, c'est un moyen d'aménagement des peines de courte durée qui permet à la justice de garder un œil sur les personnes pendant la durée de la détention à domicile tout au long de la durée de la peine purgée. Aux Etats-Unis, premier pays à recourir à ce genre de peine, l'enjeu est de soulager des Etats du coût financier des incarcérations, son usage est facultatif dans les cas de détention provisoire et se fait à la charge de l'accusé ou du détenu pour les courtes peines.
En Europe, la condamnation aux peines alternatives a manifestement augmenté durant les dernières années, appliquées sur plus de 1,8 million de personnes, selon une étude du Conseil de l'Europe qui avait fait état d'une baisse du taux d'incarcération de 6,6% en 2019. En France, où le système pénal est proche de celui du Maroc pour des raisons historiques, la surveillance à domicile par bracelet électronique a été instaurée en 1997 pour la première fois, ce dispositif a été renforcé en 2005 par la surveillance électronique mobile pour des cas bénéficiant de liberté conditionnelle ou pour le suivi socio-judiciaire après la fin de la peine pour les personnes présentant un risque de récidive. En 2020, une nouvelle réforme a élargi l'application de la détention à domicile pour les peines inférieures ou égales à six mois d'emprisonnement.
Cette outil GPS est mis à disposition du juge d'application des peines pour s'assurer que le détenu ne quitte pas le lieu d'incarcération qui peut être loin de sa résidence. Dans ce cas, il faut absolument avoir l'accord du propriétaire du lieur choisi. L'usage du bracelet n'en demeure pas moins conditionné par d'autres obligations dans la législation pénale française qui exige un respect du secret de la vie privée et la capacité du détenu à supporter le bracelet. En vertu du partenariat judiciaire avec l'Union Européenne, cet important outil de réduction des emprisonnements risque d'être introduit prochainement au Maroc. Selon nos sources, une étude de faisabilité serait en cours et son financement serait supporté par l'UE.
Repères
Contrôle d'exécution: Les mesures envisageables
L'Etat va devoir faire face au défi du contrôle de l'application des peines alternatives à l'emprisonnement. Outre le bracelet électronique qui permet un suivi par GPS du détenu, l'exécution des travaux d'utilité publique dépendent de mécanismes de contrôle, à savoir la mobilisation d'assistants sociaux et l'augmentation de l'effectif des huissiers attachés et délégués judiciaires. Dans le cas de détention provisoire ou de résidence surveillée, les détenus doivent mettre leurs biens à la disposition de la Justice qui peut les confisquer en cas de non-respect des conditions de la surveillance électronique.
L'état déplorable des prisons
Mis à part l'encombrement, les prisons marocaines sont dans un état lamentable, estime le rapport de la Cour des Comptes de 2019 qui a fait état de l'étroitesse des cellules (1,8 m2 en moyenne par détenu), ce qui est loin des normes internationales (3m2). Les conditions de détention ne sont guère réjouissantes selon le rapport, les détenus sont exposés au risque d'incendie en cas d'incendie, multiplication des incidents au sein des établissements, sachant que «le taux des agressions a évolué de 4,88% en 2012 à 8,24% en 2017», souligne la même source.


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