Le président du CESE reçoit une délégation de l'organisation de libération de la Palestine    La relance du Comité de libération de Ceuta et Melilla arrive au Parlement espagnol    Plaidoyer international pour les Marocains expulsés d'Algérie : «50 ans et après : Non à l'oubli !»    Le CNDH et le CESE consultés sur la réforme du Conseil National de la Presse    Zapatero : «Le Maroc, un modèle de développement socioéconomique»    Idylle franco-marocaine : "Nous sommes résolus à faire grand", (Christophe Lecourtier)    Le consulat du Maroc à Murcie condamne une campagne de haine contre ses ressortissants    Le député du RNI Mohamed Simo blanchi par la justice dans une affaire de malversation à Ksar El Kebir    Akhannouch salue l'effet des mesures gouvernementales sur l'inflation    La SRM Casablanca-Settat améliore l'approvisionnement en eau potable de la ville de Deroua Grâce à une intervention rapide saluée par le Conseil communal    Start-up: ORA Technologies lève 7,5 millions de dollars en Série A    GAA : Dernier train pour l'Atlantique...    Canicule : Benali annonce des mesures face à l'explosion de la consommation électrique    Interview avec Dr Driss Raouh : « Le Maroc perdrait, d'ici 2030, 2 à 3% de son PIB annuel en cyberattaques »    Depuis Rabat, l'ex-président sud-africain réaffirme son soutien à la marocanité du Sahara    Le soutien du Maroc à la cause palestinienne, sous la conduite de S.M. le Roi, est constant et capital    La visite de Jacob Zuma à Rabat : un signe de changement stratégique dans la position de l'Afrique du Sud sur la question du Sahara marocain    La JNIM mène une guerre aérienne inédite au Sahel à l'aide de drones civils militarisés, dévoile le PCNS dans son dernier rapport    Duncan Minto nommé Directeur général par intérim de Renault Group    Chambre des représentants: Adoption du projet de loi portant création de la « Fondation Maroc 2030 »    Quand l'Algérie redessine la CAN à la gomme    Le parti sud-africain "MK" : Nous soutenons l'autonomie au Sahara sous souveraineté marocaine et nous nous opposons à la fragmentation des Etats africains    CAN (f) Maroc 24 : Une arbitre algérienne retire le logo de Royal Air Maroc en plein match !?    Plegaria internacional por los marroquíes expulsados de Argelia: «50 años y después: ¡No al olvido!»    La reactivación del Comité de Liberación de Ceuta y Melilla llega al Parlamento español    Alerte météo Maroc : Vague de chaleur jusqu'à 47°C cette semaine    Vague de chaleur et averses orageuses de mardi à vendredi dans plusieurs provinces du Royaume    Plus de 14 millions d'enfants non vaccinés à travers le monde, alerte l'ONU    Beni Mellal: l'auteur du sit-in solitaire au sommet du château d'eau est décédé    Egalité des genres : Malgré les contrastes, le bilan s'annonce encourageant    OCP Green Water met en service un pipeline de dessalement entre Jorf Lasfar et Khouribga    Consécration : Abdelhak Najib honoré à Kigali pour la paix et le dialogue des cultures    Michoc devient supporter officiel de la Fédération Royale Marocaine de Football    L'UM6P renforce les liens avec la diaspora à Oslo    Décès de Muhammadu Buhari : le Roi Mohammed VI adresse un message de condoléances au président du Nigeria    CAN féminine de football : le Maroc affronte le Mali en quart de finale    Crash d'Air India: L'Inde ordonne une inspection d'urgence des interrupteurs de carburant des Boeing    Tensions Brasilia-Washington : la Cour suprême brésilienne réfute les accusations de Trump au sujet de Bolsonaro    Cañizares : "Hakimi mérite le Ballon d'or 20 fois plus que Dembélé"    Brahim Diaz perte de vitesse au Real Madrid, mais le club continue de lui faire confiance    Eau dessalée. L'OCP connecte Jorf Lasfar à Khouribga    L'UNESCO inscrit les tombeaux impériaux de Xixia au patrimoine mondial... La Chine poursuit la valorisation de son héritage civilisationnel    Festival des Plages 2025 : Maroc Telecom donne le coup d'envoi    Inscription des tombes impériales de la dynastie Xia de l'Ouest sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO    Maroc Telecom lance la 21eédition du Festival des Plages    Lou Yixiao émerveille le public avec une tenue inspirée des femmes Hui'an de l'époque républicaine chinoise : Quand la magie du passé rencontre l'élégance contemporaine    Jazzablanca 2025 : A citywide celebration of jazz, beyond the stage    Décès de l'animateur vedette de la télévision française Thierry Ardisson    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Interview avec Jacques Sapir : «Le Maroc pourrait s'approvisionner en produits pétroliers russes auprès des raffineurs indiens»
Publié dans L'opinion le 07 - 02 - 2023

Jacques Sapir, économiste spécialiste de la Russie, directeur d'études à l'EHESS et membre de l'Académie des sciences de Russie, analyse le futur des relations économiques Russie-Afrique.
Même s'ils ne sont pas directement concernés par la guerre en Ukraine, les pays africains subissent de plein fouet les répercussions du conflit, notamment la hausse des prix des matières premières (gaz, pétrole, blé). Les pays occidentaux ont-ils mesuré l'impact des sanctions contre la Russie sur le reste du monde ?

Vous avez effectivement tout à fait raison de poser le problème des conséquences de la guerre en Ukraine et des sanctions sur les pays africains. On pourrait aussi y ajouter ceux d'Amérique Latine. Quand ils ont décidé de prendre des sanctions contre la Russie, les dirigeants occidentaux, ceux de l'Union Européenne et ceux des Etats-Unis, ont grandement sous-estimé le poids de l'économie russe et sa place centrale pour les marchés internationaux des matières premières. Cette erreur initiale ayant été faite, ces mêmes dirigeants n'ont pas cherché à la corriger. C'est, me semble-t-il, le produit d'une vision du monde étroitement centrée sur le bassin nord-Atlantique. Se considérant comme «au centre du monde», ce qui est désormais une illusion, ils ont méprisé les problèmes que leurs politiques étaient en train d'engendrer.

Le refus de la majorité des pays africains et arabes de condamner l'invasion russe en Ukraine devrait-il être interprété comme un signe que l'influence occidentale est en perte de vitesse dans ces pays, et que la Russie a une meilleure image auprès des peuples africains et arabes ?

Oui, naturellement. Non que nombre de ces pays soutiennent explicitement la position russe. Mais, la condamnation de l'action de la Russie leur paraît relever d'une politique européenne, et la démonisation de la Russie, à laquelle nombre de pays européens et les Etats-Unis s'adonnent, leur semble ridicule, surtout au regard de ce qui fut fait chez eux. Il y a donc une attitude qui relève du «c'est votre affaire, pas la nôtre». Après, il faut aussi considérer qu'effectivement l'image de la Russie est souvent bien meilleure que celle des pays occidentaux. Il y a plusieurs raisons à cela, l'héritage de la politique de l'URSS, mais aussi une politique de la Russie qui a traité bien plus d'égal à égal avec les pays africains que certains pays européens. Enfin, il y a une indéniable perte d'influence européenne sur le continent africain du fait d'une politique intelligente de la part de la Chine. En France, nous avons tendance à accuser la Russie pour notre perte d'influence en Afrique sans nous rendre compte que cette dernière résulte en fait de nos propres actions (en particulier en matière de développement économique), de notre alignement sur la politique américaine, qui a commencé avec le Président Nicolas Sarkozy, et du fait que, depuis une vingtaine d'années, la Chine est apparue comme une alternative aux politiques occidentales. Plus que du néocolonialisme, c'est de la paresse intellectuelle. Et cette paresse se traduit par un effondrement progressif de l'influence occidentale.

Face aux sanctions occidentales, Moscou va-t-il privilégier dans le futur l'Afrique comme destination pour ses exportations et ses investissements ?

La Russie va certainement chercher à exporter du matériel de transport vers l'Afrique. Elle en a les capacités. De même, les entreprises russes ont investi et continueront de le faire en Afrique. Mais, en termes de priorité, je pense que la Russie va plus privilégier l'Asie, des pays comme la Chine, l'Inde, l'Indonésie, la Malaisie, le Vietnam, que l'Afrique, car les marchés de ces pays sont beaucoup plus attractifs actuellement que les marchés des pays d'Afrique.

Comment la Russie compte-t-elle réaliser ses échanges commerciaux avec l'Afrique sans passer par le dollar (risque de sanctions) et le système SWIFT ?

Vous avez raison de signaler le problème, qui ne concerne pas que le dollar mais aussi l'euro par ailleurs. Dans un premier temps, la Russie va proposer de commercer soit en rouble, soit en yuan, voire même en roupie (en Afrique de l'Est). Les progrès réalisés par la Russie dans la dédollarisation de son commerce depuis les neufs derniers mois indiquent qu'il y a de grandes possibilités pour utiliser ces monnaies. L'utilisation du yuan pourrait d'ailleurs apparaître comme bénéfique pour certains pays qui sont déjà connectés en partie sur le système des paiements chinois qui peut offrir une alternative au dollar et à SWIFT. A terme, il est probable que la Russie va construire son propre système international des paiements. De plus, il y a la possibilité que les BRICS constituent une monnaie commune qui pourrait être utilisée pour les transactions commerciales mais aussi pour les emprunts et les investissements. Des solutions seront donc assez facilement trouvées.

Les statistiques sur les derniers mois montrent une accélération des exportations russes de produits pétroliers vers plusieurs pays non-européens, dont le Maroc. Cela risque-t-il de changer après l'entrée en vigueur des sanctions européennes sur les produits pétroliers russes, prévue le 5 février ?

La question est ici double. D'une part, le Maroc souhaite-t-il appliquer les sanctions de l'UE ? S'il considère que ces sanctions ne le concernent pas, la Russie a tous les pétroliers nécessaires pour continuer le commerce. D'autre part, la Russie vend du pétrole brut à des raffineurs indiens. Le Maroc pourrait donc s'approvisionner en produits raffinés auprès de ces raffineurs.
Maroc-Russie : un rapprochement imminent ?
Ce 5 février est entré en vigueur l'embargo européen sur les produits pétroliers russes. Les pays européens ne peuvent donc plus importer des produits raffinés russes comme le diesel et l'essence. Cet embargo s'ajoute à celui sur le pétrole brut russe, en vigueur depuis le 5 décembre 2022.
Ces sanctions risquent de perturber davantage l'approvisionnement et les prix des produits pétroliers, en constante hausse depuis le début de la guerre en Ukraine. Moscou a déjà exprimé sa volonté de rediriger ses approvisionnements vers d'autres destinations, dont le Maroc et la Turquie.
Les dernières données de Refinitiv font état d'une accélération des livraisons de diesel russe vers le Maroc. Ces exportations ont atteint 735.000 tonnes en 2022, contre seulement 66.000 tonnes une année auparavant. Depuis le début de l'année 2023, elles ont été d'environ 140.000 tonnes. Selon l'agence Reuters, la Russie veut poursuivre dans les prochains mois ses livraisons vers le Royaume.
Cela peut-il déboucher sur un rapprochement Rabat-Moscou ? Fin janvier, le Maroc était programmé dans l'agenda du ministre des Affaires étrangères russe Sergueï Lavrov, dans le cadre d'une tournée africaine. Une visite qui a été finalement reportée. Plusieurs dossiers étaient à l'ordre du jour, comme l'énergie. En effet, les deux pays souhaitent approfondir leurs collaborations, notamment dans le nucléaire civil.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.