« Je vomis sur les convertis opportunistes de la dernière heure qui se sont tus durant ces deux années de terreur et d'abomination à Gaza, et qui vont opportunément se transformer en apôtre de la bonne parole de repentance une fois le génocide consommé et la politique coloniale exterminatrice d'Israël présentée comme impossible à défaire. Je suis écœurée par le silence sans fond des ''intellectuels'', ici et ailleurs, calculant les bénéfices et les risques d'une prise de parole, pondérant l'un par l'autre tandis que les enfants démembrés jonchent les rues de Gaza. Il y a autant de honte pour certains à s'exprimer aujourd'hui qu'il y en a eu à se taire alors. » Ce cri émane de Facebook et des tripes de l'écrivain et professeur Yasmine Chami, une habituée de ce type de claques qui font intensément du bien. Les enfants... En 1987, Bruno Frappat, alors directeur de ce qui est encore le quotidien de référence -Le Monde-, donne une leçon à l'adulte par le truchement de l'enfant. Dans ses chroniques « Si les mots ont un sens », on se heurte à des passages forts en sens, à des éclats éblouissants en valeur: « (...) On croit les enfants vivant dans un petit monde béat, sans aspérités. On s'imagine qu'ils ne savent pas encore, les innocents, que la vie est tragique et qu'ils ont bien de la chance. Qu'ils ne voient rien, ne comprennent rien et n'éprouvent que des sentiments enfantins, sucrés et que, de ce fait, ils n'ont rien à dire de sérieux. Taisez-vous les enfants! Laissez parler qui, de la vie, connaît le sens et le nonsens. Laissez les grands traiter des grandes questions et ouvrez vos petites oreilles aux leçons des adultes sérieux. » 1987, date du déclenchement de la première Intifada. « Voilà la vraie cruauté des enfants: elle ne s'exerce pas d'enfant à enfant comme on le croit trop souvent. Elle vise les grands qui les maltraitent par ignorance ou lâcheté. » En fait, l'enfance dépasse les préoccupations confiées aux adultes.
